Peu d’académisme pour la Dijonnaise d’adoption, ce qu’elle aime c’est bouger et plus encore, amener le mouvement et la danse contemporaine là où on ne les attend pas. Rencontre avec une artiste qui ne sépare pas les sphères artistique et humaine.
Dijon l’Hebdo : Comment fait-on pour vivre de la danse ?
Maëlle Desclaux : « C’est un vrai chemin, au début on court d’audition en audition, on démarche énormément et il y a beaucoup d’espoirs déçus, ce sont des périodes éprouvantes pendant lesquelles il faut garder le cap et ne pas perdre confiance. De mon côté, le festival « Suresnes Cités Danse » auquel j’ai participé avec la compagnie Momboye en 2005 a été une porte ouverte vers d’autres expériences, j’ai alors dansé plusieurs années pour différentes compagnies de rues ou pour la scène, les plateaux, en France ou à l’étranger. Le tout avec le statut d’intermittence qui m’offrait un vrai soutien ».
DLH : Avez-vous votre propre compagnie ?
M. D. : « Oui car à Dijon je trouvais que la danse était trop peu mise en valeur comparée aux autres arts. Avec une amie, Estelle de Montalembert, nous avons donc monté la compagnie Numb, qui au départ était un collectif de 4 danseuses, et qui nous permet de créer, de proposer des performances ou des rencontres entre artistes comme en décembre dernier quand, dans le cadre des Nuits d’Orient, nous avons réuni un beatboxeur, un joueur de oud et un vidéaste pour un rendez-vous public. Cela provoque des synergies très riches et porteuses ».
DLH : Pourtant vous ne vous limitez pas à la sphère artistique…
M. D. : « J’aime en effet décloisonner les univers et je suis particulièrement sensible à ce qui touche à l’humain. En 2017 j’ai entendu parler d’un projet que le CHU de Dijon voulait mener autour du mouvement. C’est une infirmière de l’unité psychiatrique Osiris-Beauregard qui souhaitait qu’un danseur ou une danseuse intervienne auprès d’un groupe de patients. J’ai accepté la proposition et conduit une dizaine d’ateliers pendant plusieurs semaines, ce qui fut une expérience très forte. Puis j’ai conduit une expérience similaire en 2018 à la maison d’arrêt. Ça a été extrêmement formateur et enrichissant pour moi comme pour les 6 femmes que j’ai accompagnées pendant les ateliers. Elles avaient peu de rapport avec leur corps mais au cours de ce travail en commun elles ont retrouvé un élan, une posture, un regard posé, un positionnement dans l’espace… C’était magique à observer ! »
DLH : Ce sont des expériences ponctuelles…
M. D. : « Elles peuvent se reproduire ou évoluer, j’interviendrai à nouveau à la maison d’arrêt ce mois de septembre, puis dans le cadre du Festival Tribu nous irons proposer une performance : un mélange d’improvisation dansée et musicale avec le musicien Sud-Africain Sibusile Xaba. Dans le même esprit, j’ai mené un travail avec un groupe de 6 personnes en situation de handicap et en voie de réinsertion professionnelle, auquel une vidéaste a assisté puis créé un film appelé « Hors les murs », disponible sur Viméo et que nous cherchons maintenant à diffuser ».
DLH : Quelles sont vos aspirations ?
M. D. : « Je souhaite vraiment poursuivre ces recherches auprès de non danseurs. J’aimerais aussi inscrire un projet dans la nature ou inviter la nature à rejoindre l’un de mes projets artistiques. Enfin la danse contemporaine se développe sur le continent africain et j’aimerais beaucoup participer à ce mouvement, créer des échanges avec cette terre où je suis née ».
Caroline Cauwe