Jean-Patrick Masson : « Un progrès majeur en un quart de siècle »

Vice-président de Dijon métropole, Jean-Patrick Masson pilote la délégation transition écologique, déchets et énergies renouvelables. Présent depuis 2001 dans l’exécutif de François Rebsamen, Jean-Patrick Masson a apporté sa patte (environnementale) à la capitale régionale. Et c’est un (doux) euphémisme. L’édile dijonnais revient sur les grandes réalisations et détaille les grands projets durables.

DLH : L’unité de production et de distribution d’hydrogène permet à Dijon de se projeter réellement dans le futur… durable. Pouvez-vous nous détailler ce projet phare ?

J.-P. M : « Il faut retenir trois éléments essentiels. En premier lieu, il s’agit de faire fonctionner des véhicules avec de l’hydrogène provenant de sources renouvelables. Cela signifie que nous utiliserons l’énergie électrique produite par l’usine d’incinération, le champ photovoltaïque au Nord de Dijon sur le centre d’enfouissement technique mais aussi des certificats d’origine, c’est à dire bénéficiant de la garantie que les énergies utilisées soutiennent bien les énergies renouvelables. Cela montre bien que sur un territoire nous pouvons faire preuve d’intelligence avec les ressources dont on dispose. Ensuite, c’est l’ambition de ce projet : il concernera 9 bennes à ordures ménagères – 8 pour la métropole et 1 pour la communauté de communes de Liernais puisque nous travaillons conjointement avec elle sur l’achat de ces véhicules – ainsi que 27 bus dans les années à venir. Le 3e élément n’est autre que le calendrier : notre objectif est que la mise en fonctionnement de ce dossier débute fin 2021 parce qu’il est nécessaire d’inventer toute la chaîne. Nous sommes, avec ce projet, dans l’innovation au niveau national – aujourd’hui il n’existe pas en France de flotte de bennes et de bus de cette importance fonctionnant à l’hydrogène. Nous avons vu, avec le nouveau plan de relance, que plusieurs milliards seraient accordés sur l’hydrogène. C’est une bonne nouvelle mais nous, nous avons anticipé. Notre volonté est de systématiser l’usage de l’hydrogène sur notre territoire à l’horizon d’une décennie ».

 

DLH : Et, dans le même temps, vous poursuivez l’extension du réseau de chaleur urbain…

J-P. M : « L’extension du réseau de chaleur apporte en effet aussi pleinement sa pierre à l’édifice de la transition écologique. En 10 ans, nous sommes passés de quelques réseaux de quartiers, relativement marginaux, à une centaine de kilomètres. En 2023, nous serons aux alentours de 120 km pour les 2 réseaux alimentés respectivement à 80% et 60% d’énergie renouvelable (avec une ambition d’aller sur le second également à 80% d’ici 2025). Grâce au réseau de chaleur urbain, nous avons aujourd’hui la possibilité de limiter davantage l’utilisation des énergies fossiles pour produire de la chaleur. A terme, celui-ci desservira 55 000 équivalents logements et permettra de réduire la facture énergétique. Nous œuvrons ainsi à la transition énergétique tout en augmentant le pouvoir d’achat des Dijonnais ».

 

DLH : Quelles ont été les raisons majeures qui ont fait que la commission européenne ait retenue le projet RESPONSE d’auto-consommation collective de Dijon métropole sur le quartier de la Fontaine d’Ouche ?

J-P. M : « Nous sommes avec ce projet RESPONSE dans la consommation collective sur un groupe d’immeubles, composés d’habitations et de deux écoles, où nous aurons à la fois de la réhabilitation thermique, de la production d’énergie mais aussi – et c’est là où réside la grande originalité – le monitoring de l’ensemble. Nous aurons des énergies provenant du réseau de chaleur urbain, du photovoltaïque local mais aussi des énergies gérées par du stockage spécifique. Celui-ci sera de deux natures : le stockage par batteries automobiles connectées au réseau ainsi que le stockage par eau chaude. Car il faut savoir que l’un des grands problèmes rencontrés par ce type de projet est de mettre le plus en adéquation possible les courbes de disponibilité énergétique et de consommation. Pour les usagers, ils verront ainsi leur consommation diminuer eu égard à la rénovation thermique, soit là-aussi une baisse potentielle de leur facture, et ils ne seront alimentés que par des énergies renouvelables. C’est la plus importante expérimentation française en la matière et la seule sur le plan européen portant sur de la réhabilitation. Ce projet démarrera le 1er octobre prochain et s’étalera sur 5 ans. En 2022, la réhabilitation des bâtiments sera achevée et l’ensemble des dispositifs énergétiques seront mis en place. A partir de cette date, nous passerons à la seconde phase qui sera celle du monitoring ».

 

DLH : Qu’est-ce qui, parmi toutes les villes candidates au titre de capitale verte européenne, a fait, selon vous, la différence pour pouvoir être retenu parmi les 4 finalistes ?

J-P. M : « C’est l’ensemble des projets que je viens de citer qui légitiment le fait que nous ayons pu candidater et être retenus parmi les finalistes du concours de Capitale verte européenne. Nous étions prêts grâce à tout ce qui a été fait mais aussi à tous les projets que nous avons inscrits. Je pourrais également citer le coefficient de biotope par surface que nous avons inscrit dans le PLUI-HD ou encore bien d’autres exemples. Concernant la biodiversité, le jury a également constaté que c’était un point d’excellence. La forêt des enfants ou encore la science participative autour de la biodiversité, mené par le Jardin des Sciences, ont, notamment, fait la différence. La participation citoyenne a particulièrement été appréciée par la commission européenne. Nous sommes ainsi remarquables et donc remarqués au niveau européen ».

 

DLH : Vous qui faites partie des rares élus encore présents depuis 2001 dans l’exécutif de François Rebsamen, comment résumeriez-vous les grandes étapes durables franchies par Dijon ces dernières années ?

J-P. M : « Nous avons remis à niveau lors du premier mandat. Lors du deuxième, nous avons réalisé des grands projets. Nous avons été pleinement innovants à l’occasion du troisième. Et là, sur le mandat qui s’ouvre, nous allons effectuer un véritable saut qualitatif. Il n’est pas technique, il est celui du fonctionnement, de la gouvernance et des services. En instituant cela de façon systémique, nous aurons réalisé un progrès majeur en un quart de siècle ! »

Camille Gablo

 

« Ici commence la mer »

Dijon l’Hebdo : L’élimination des plastiques a été également mis en exergue dans le programme municipal de « Dijon c’est Capitale ». Comment entendez-vous aussi relever ce défi planétaire ?

Jean-Patrick Masson : « Cela représente en effet un enjeu majeur. Les orientations mondiales, européennes et nationales sur l’élimination des plastiques avec les problèmes que l’on connaît sont fondamentales. Nous avons, avec le futur contrat qui nous lie à Suez, la captation de tous les plastiques dans l’eau. Il faut avoir la capacité de capter le plus en amont possible de telle manière à protéger les milieux. Là aussi c’est novateur puisque personne d’autre ne le fait aujourd’hui. Ce sera, à mes yeux, l’un des grands progrès que l’on fera en matière de protection de l’environnement sur la qualité de l’eau. Nous sommes sur un dispositif technologique visant à récupérer directement dans le flux, dans les égouts, des plastiques, y compris ceux de taille relativement petite. Ces dispositifs viendront compléter les dégrilleurs (qui existent pour les plastiques de taille, à l’instar des bouteilles par exemple) et seront installés en tête et en fin de station. Afin de développer la sensibilisation de nos concitoyens à cet enjeu capital, je rappelle aussi que nous avons lancé l’implantation de plaques devant les avaloirs où est inscrit Ici commence la mer ».