Chevigny-Saint-Sauveur : Un management récompensé

Le mois dernier, le maire de Chevigny-Saint-Sauveur a lancé le plus important chantier de la mandature : la rénovation énergétique globale de l’école Buisson-Rond qui deviendra un établissement exemplaire à énergie positive. Et c’est par la plantation d’un arbre que Guillaume Ruet a souhaité symboliser l’événement. Interview d’un maire qui n’a de cesse de bâtir l’avenir au présent… 

Votre commune vient d’être lauréate du prix national Preventica dans la catégorie « management inspirant » pour sa gestion des ressources humaines. Cela a dû vous faire plaisir ?

« Depuis que je suis maire en 2019, j’ai mis les agents au cœur de notre politique Ressources Humaines. Je pense que l’on peut être performant tout en étant humain. Nous avons mené une importante réorganisation afin de mieux travailler et nous donnons tous les moyens aux agents afin de bien réaliser leurs missions et de donner du sens à leur travail. Là où on se distingue, c’est parce que nous avons, dans le même temps, mené une politique pour leur bien-être et santé au travail, notamment dans la gestion du stress. Nous avons une chargée de mission qualité de vie au travail, nous organisons des ateliers de relaxation, de sophrologie, nous avons aussi investi sur l’ergonomie des postes de travail.

Et ce, pour que les agents puissent exercer leurs missions dans les meilleures conditions. Et cela marche : notre taux d’absentéisme a fondu, le climat social est apaisé et nous arrivons à trouver des collaborateurs (ce qui est très tendu dans la fonction publique en ce moment). Ce prix national vient récompenser ce travail. Dans le monde de la fonction publique territoriale, Chevigny-Saint-Sauveur est reconnue comme une ville où la qualité de vie au travail est exemplaire. C’est un retour sur investissement considérable… »

Vous parlez d’investissement. C’est l’occasion d’aborder la question nationale budgétaire et surtout l’endettement record de la France. Selon l’Etat, les collectivités territoriales seraient responsables de tous les maux…

« Cela me fait bondir ! L’État, gauche et droite confondue, notamment Bercy, tient un discours anti élus locaux, car selon eux, nous dépenserions trop et mal. Or tous les chiffres montrent le contraire. Nos budgets sont votés à l’équilibre et si on regarde sur les trente dernières années, la part de l’endettement due aux administrations locales avoisine les 8%, et cela reste stable. Depuis dix ans, on a ponctionné énormément les collectivités territoriales et cela n’a servi à rien puisque, dans le même temps, l’endettement de l’État a continué à s’envoler. Si bien que l’essentiel de l’endettement public aujourd’hui correspond à l’endettement de l’État. Aussi est-ce une baisse des dépenses de l’État sur laquelle il faut travailler et ce n’est pas en tapant sur les collectivités qui gèrent bien et qui investissent – et notre commune en est l’illustration – que cela changera quelque chose.

Il faut rappeler que 70% de l’investissement public provient des collectivités territoriales. Ce sont elles qui vont faire les investissements pour affronter le changement climatique. Si les collectivités territoriales n’étaient pas là, la qualité de vie de tous les Français en pâtirait ! Ce sont eux qui vont être impactés par les choix budgétaires qui sont faits par le gouvernement actuel. Mais je ne lui jette pas la pierre, parce qu’il a dû faire un budget en quelques semaines, en s’appuyant sur les propositions de Bercy. Ce n’était pas simple. Cela fait suite à une dissolution incompréhensible, avec ensuite deux mois de plus pour nommer un Premier ministre. Les décisions prévues dans le projet de loi de finances sont malvenues pour les collectivités et, si on va dans ce sens-là, cela peut être récessif et nous allons avoir des années difficiles ».

Dans le contexte budgétaire contraint, vous avez réussi à tenir vos engagements mais aussi, parfois, à faire plus. C’est grâce à l’inventivité que vous évoquez régulièrement ?

« Quand on fait face une crise – le covid, la crise énergétique et maintenant la crise budgétaire et financière – soit on la subit et on se prend la vague en pleine face, soit on est proactif, on prend des initiatives, on essaye d’être inventif. Et on tente de faire mieux et parfois on peut même faire plus en agissant différemment. Cela nécessite de se projeter, d’anticiper, de ne pas être statique mais d’être agile. Cela demande beaucoup d’énergie, un peu de talent et un brin de chance parfois. Mais aussi et surtout de rassembler largement parce que, seul on n’arrive à rien face à une crise, il faut un bloc autour de soi, que ce soit des élus et des agents qui suivent le cap. Le rôle du chef est de fixer un cap et de s’y tenir ».

L’actualité des terribles inondations meurtrières à Valence en Espagne a illustré, si besoin était, l’acuité de la question du réchauffement climatique. Cela valide l’un de vos engagements majeurs…

« La transition écologique représente l’un des fils rouges du mandat et nous la maintiendrons malgré les difficultés financières. L’actualité que vous évoquiez montre que l’on n’a pas le choix. Ensuite, plus on attend, plus cela coûtera cher. Nous avons une politique globale qui va de la plantation d’arbres – nous en sommes à plus de 2 100, et, en janvier, nous dépasserons les 2 500 –. Et nous poursuivons la transition énergétique. En deux ans, on a baissé de 15% notre consommation d’énergie sur l’ensemble des bâtiments communaux et nous allons aller plus loin.

On mène aussi des dossiers emblématiques, comme la réhabilitation de l’école Buisson-Rond. C’est ma grande fierté du mandat. Cette deuxième école réhabilitée thermiquement sera à énergie positive. Elle produira plus d’énergie qu’elle n’en consomme avec plus de 400 m² de panneaux photovoltaïques… Avec l’autoconsommation collective, cela alimentera des bâtiments communaux. Thermiquement, mais également en termes d’acoustique et de qualité de l’air, en termes d’usage, ce sera l’un des plus beaux établissements du secteur, où nous allierons écologie et éducation… »

Cette réhabilitation nécessite un investissement de taille : 7,2 M€ HT. Sans subvention, auriez-vous pu réaliser ce chantier de taille ?

« Une ville comme Chevigny-Saint-Sauveur ne peut pas dépenser plus de 7 M€ sur un projet sans les co-financements. Le Département nous a donné très rapidement 500 000 €. Nous avons l’État, qui, avec le Fonds vert, nous accorde une subvention exceptionnelle de 1,5 M€. Nous aurons également des fonds européens, un peu de la Région et la CAF nous épaule également. Si bien que nous avons environ 50% de subventions sur cette réalisation d’avenir. C’est très bien et cela nous permet de réaliser un projet durable et ambitieux. Nous avons des subventions parce que nous avons de très bons dossiers. Pour l’école maternelle, la rentrée s’effectuera en septembre 2025. L’élémentaire, ce sera en 2027. Nous lancerons en 2025 les études pour la réhabilitation d’une 3e école, Henri-Marc, pour le début du prochain mandat ».

Vous avez également innové en lançant le Salon de l’Habitat de Chevigny-Saint-Sauveur. Pourquoi avez-vous tenu à organiser ce type d’événement sur votre commune ?

Cela ne sert à rien que la mairie soit vertueuse en termes d’écologie si le sujet n’est pas pris en main par les habitants. Je souhaite que le plus grand nombre d’entre eux puissent s’en saisir, notamment en améliorant la performance thermique de leur logement. Ce Salon de l’Habitat a la vertu de présenter les entreprises locales, de participer à l’emploi, tout en aidant les Chevignois à faire des travaux pour améliorer les performances thermiques de leur logement. Notre projet est global. Nous ne sommes pas juste prescripteurs, nous montrons l’exemple et, ensuite, nous accompagnons les gens pour qu’ils le fassent également. Et nous le faisons dans différents domaines… »

Votre coup de gueule contre les dépôts sauvages a fait grand bruit. Tout comme votre campagne d’affichage « coup de poing… » Était-ce le seul moyen de limiter ce fléau ?

« Les dépôts sauvages représentent, vous avez raison, un fléau national. On a tout essayé : la sensibilisation, la communication. Nous ne sommes pas la ville la plus touchée mais c’est toujours exaspérant de voir des personnes qui manquent de civisme et qui n’utilisent pas les services gratuits des encombrants ou de la déchetterie. Après avoir tout essayé, j’ai pointé du doigt les mauvais comportements et j’ai appelé à la participation citoyenne, ce qui n’est pas de la délation. Nous sommes tous censés signaler aux autorités une infraction quand nous sommes témoins. A partir du moment où il n’y a pas de sentiment d’impunité et que les contrevenants savent qu’ils risquent une lourde amende, cela fonctionne. L’engagement et le civisme sont les grandes causes de mon mandat. Il faut parfois passer à la répression, c’est parfaitement compris et le laxisme, ça suffit ! »

Quels sont les grands projets pour l’année prochaine ?

« En parallèle à la poursuite des travaux de l’école Buisson-Rond que j’évoquais plus en amont, nous ouvrirons un skate parc au parc de la Saussaie et nous réhabiliterons l’accueil de l’hôtel de ville. Nous l’isolerons, installerons une pompe à chaleur, ferons du relamping pour s’inscrire là-aussi dans la transition énergétique. Et nous en profiterons pour le moderniser, le rendre davantage accessible aux personnes à mobilité réduite… Nous accueillerons les habitants dans de bien meilleures conditions et cela participera, là aussi, à l’amélioration des conditions de travail de nos agents ».

Propos recueillis par Xavier Grizot