Françoise Le Corre à Saint-Philibert : Minuscule et Infini

Françoise le Corre est une référence dans le milieu de la restauration d’art et la conservation de tableaux que musées ou particuliers lui confient. Aujourd’hui, cette femme passionnée, habitée d’une fougue intérieure sort du cadre… des œuvres d’autrui : elle met sa maestria, la technique de son métier au seul service de son imaginaire. Ce sont ces très récentes créations qui sont exposées depuis le 30 mars dans l’enceinte de l’église Saint-Philibert jusqu’au 16 avril.

Ce lieu abrite, le temps de l’exposition « La texture de l’infime », le sacré profane d’une œuvre qui s’exprime dans le symbole, dans la transcendance. Françoise Le Corre se fait le passeur entre le réel d’objets minuscules jetés, oubliés, ou cassés et les rives d’un continent magique où elle leur redonne une raison magnifiée d’exister.

Le plus déroutant, c’est qu’à partir de l’objet « en minuscule », elle réalise une œuvre en « majuscule » – ici une lettre en coquillette pour un potage, une étiquette à l’ancienne, et là une plume de stylo Schaeffer, le bris d’un vase en cristal, ou encore la spirale parfaite d’un coquillage d’à peine quelques millimètres etc.

Françoise Le Corre ose la mésalliance esthétique d’associer cette humilité des petits riens à un support précieux – marbre, écrin ancien, bois ou bronze. Toutes ses installations sont exposées dans des vitrines qui jouent sur les illusions optiques… Et là - métamorphose suprême - naît sous l’œil des visiteurs la sensation d’immensité cosmique, d’éternité. Nous voilà conduits vers les régions, les galaxies où ne dominent ni temps, ni espace. Vers une sorte de cabinet de curiosités à l’agencement orchestré par l’écriture mécanique, par le hasard de l’association d’idées. Mécanique et hasard, certes ! Mais pas que… Car le talent de Françoise Le Corre, c’est de se jouer avec raffinement des faux-semblants, de nous entraîner à l’intérieur d’un jeu de rôle sophistiqué et explorateur d’un cosmos habité d’une nano-lune, d’un trait de lumière à l’état de chrysalide. Son art est rédempteur, d’une beauté insolite : de petites choses reléguées aux oubliettes de nos vies sont ainsi mises en scène sur un galet, un socle d’ardoise ou au milieu de mini colonnes.

Ses réalisations affichent l’audace, le baroque des jeux de mots, des traits d’esprit propres au génie français. Laissez-vous charmer par le jeu flamboyant d’un petit sachet de très anciennes étiquettes percées de leurs ficelles rouges à qui Françoise Le Corre prête vie, jusqu’à nous faire penser au dragon d’un Nouvel An chinois !

Marie-France Poirier

L’exposition se déroulera jusqu’au 16 avril (du mercredi au samedi de 14 heures à 18 heures ou sur rendez-vous). Cet événement a pu voir le jour grâce à la Ville de Dijon qui a mis Saint-Philibert à la disposition de l’artiste. Par ailleurs, Françoise Le Corre est soutenue dans cette entreprise par l’Université de Bourgogne (dont Valérie Morisson, maître de conférence) et par le laboratoire universitaire « Texte, image et langage ».