Souvent négligée, pas suffisamment protégée du bruit, l’ouïe est fragilisée et vieillit parfois prématurément. Explications avec le professeur dijonnais Philippe Romanet.
Quels sont les premiers signes qui devraient conduire les seniors à consulter un ORL ?
Professeur Philippe Romanet : « En vieillissant, on entend moins bien. Avec l’âge, c’est physiologique, on perd progressivement de l’audition sur les fréquences aigües car ce sont les plus fragiles. C’est ce qu’on appelle la presbyacousie. Tout le monde est atteint mais de façon différente dans la mesure où ne sommes pas tous programmés génétiquement de la même façon. C’est comme les cheveux blancs. Ils peuvent apparaître à 40 ans, 50 ans ou bien encore plus tard. Par ailleurs, il y a des facteurs environnementaux qui peuvent accélérer cette presbyacousie. Les personnes qui travaillent avec beaucoup de bruit autour d’eux seront atteints plus rapidement. Les chasseurs également. Tout comme les personnes qui souffrent de problèmes généraux comme le diabète, l’hypertension artérielle… ».
DLH : Et comment la décèle-t-on ?
Ph. R : « Il y a un signe très particulier. Si on parle dans une pièce sonore avec une seule personne, on n’est pas gêné. Par contre, dès qu’il y a un bruit ambiant, avec plusieurs personnes qui parlent, par exemple, on entend mais on ne comprend pas tous les mots. C’est incontestablement le premier signe qui doit alerter sur un début de surdité et qui doit amener à consulter parce qu’il y a des solutions »
DLH : La meilleure parade, c’est donc de faire un bilan auditif ?
Ph. R : « Tout à fait. Le bilan, c’est d’abord consulter un ORL qui va faire un premier examen pour déterminer s’il n’y a pas de causes locales comme un simple bouche de cyrumen ou des pathologies de l’oreille qui pourraient être passées inaperçues telles qu’une perforation, des épanchements… Pour être sûr d’avoir un appareil auditif en bon état, il convient de faire un audiogramme qui va évaluer l’audition sur différentes fréquences. On obtiendra ainsi une courbe audiométrique qui sera le reflet de ce qu’on peut entendre. Dès lors, un traitement pourra être prescris ».
DLH : Quel type de traitement ?
Ph. R : « La presbyacousie, c’est une atteinte de l’oreille interne. Il n’y a pas de solution chirurgicale. Celle-ci ne traite que des pathologies qui atteignent le tympan ou les osselets. Ce sont des surdités de transmission qui n’ont rien à voir avec l’âge. La seule thérapeutique de la presbyacousie, c’est la prothèse auditive avec un récepteur qu’on va placer dans le conduit auditif externe ».
DLH : La chirurgie a-t-elle beaucoup évolué depuis ce qui constituait, en 2007, une première bourguignonne, avec l’implantation réussie du premier appareil auditif complet sur un patient sourd, âgé de 60 ans, que vous avez réalisée au CHU ?
Ph. R : « En dehors de l’implant cochléaire qui est une chirurgie très récente qui consiste à installer une sorte d’oreille artificielle dans l’oreille interne et qu’on réserve à des surdités totales, il existe des implants d’oreille moyenne qui vont se substituer aux prothèses auditives qui ne marcheraient pas. Cela ne concerne qu’un très faible nombre de surdités liées à l’âge ».
Propos recueillis par Jean-Louis Pierre


