Je vous livre, chers lecteurs, un petit argumentaire à l'usage des honnêtes professionnels qui vont dans le monde et qui pourra toujours servir. Les modestes formules suivantes permettront à chacun de répondre à des journalistes trop incisifs, à des enquêteurs pervers, à des experts mal intentionnés ou à des juges partisans. Elles ont l'avantage de prendre poliment le citoyen pour une cruche sans susciter sa rébellion :
- Si vous êtes footballeur, sauf Ribéry, dites à l'occasion : « On joue match après match », « C'est la loi du sport », « On ne lâche rien ». Le cas échéant, utilisez sa variante « On n'a rien lâché ». Vous pouvez même tenter l'audacieux « On ne lâchera rien ». Après un attentat ou quelque catastrophe, dès que l’émotion s’estompe un peu et que les soixante secondes de la minute de silence sont écoulées, prononcez les paroles sacrées en ces circonstances : « Le Football reprend ses droits ! » Dans ce cas, n'oubliez pas de prononcer la majuscule.
- Si vous êtes Ribéry, répétez à qui veut l'entendre: « J'ai mal à mon arrière-dos dont auquel on me le soigne hormis des piqûres ».
- Si vous êtes une actrice inconnue et que vos avantages vous précèdent, dites à ceux qui vous demandent comment vous avez décroché votre premier rôle principal : « J'ai rencontré le producteur par hasard et tout s'est fait très vite ». N'ajoutez jamais « Mon lapin ! »
- Si vous êtes ancien quelque chose reconverti en consultant, enfoncez bien le clou à l'antenne en disant : « Quels sont vos projets d'avenir ? », « Pluton en a déjà parlé dans le fameux mythe de la caserne ». Ne confondez jamais avec Platoon. Pour aller plus loin dans un entretien, risquez l’incisif : « Que voulez-vous incinérer par là ? » Et commentez la réponse avec un effrayant : « Tout cela va coûter des sommes gastronomiques ! »
- Enfin si vous êtes un homme politique, nous vous conseillons les phrases clefs suivantes : « Cela n'est pas une affaire de personne », « C'est à lui ou à elle qu'il faut le demander », « Je n'ai jamais dit ça. Il faut replacer mes propos dans leur contexte ». Au début d’une affaire embarrassante, commencez toujours par : « Il faut laisser la justice faire son travail » ou « Il faut laisser son travail faire la justice ». De toute manière et en toute circonstance, ne soyez jamais inquiet car l'expérience s'acquiert vite et le public avale facilement les plus grosses couleuvres, les serpents à sornettes et autres fariboles.
Alceste