Dijon l’Hebdo : Dijon qui figure parmi les villes les plus intelligentes au monde… Comment réussit-on un pari aussi audacieux ?
François Rebsamen : « Dijon intègre aujourd’hui un cercle très fermé. Celui des métropoles innovantes qui ont créé un système permettant de mieux répondre aux exigences du monde actuel. Ce n’est pas pour rien que notre métropole a été finaliste des Smart City Awards de Barcelone aux côtés de Singapour, de Londres, de Santiago du Chili… Être comparé à de telles villes, jouer dans cette cour, c’est signe que nous avons pris la bonne direction. Le projet OnDijon s’intègre parfaitement dans notre vision de la ville et de la métropole pour les usages d’aujourd’hui et de demain. Nous avions une idée de ce que nous souhaitions pour notre collectivité et pour les administrés. Puis des grandes entreprises ont répondu à notre cahier des charges, nous ont accompagné dans ce projet unique. Grace à l’intelligence collective, nous avons pu, sur des années, affiner notre idée. Et il y a quelques jours, nous avons lancé OnDijon. Il y a aura un avant et un après pour la métropole et pour ses habitants. »
DLH : Qu’est-ce qui fait que ce dispositif est aujourd’hui inédit en France ?
F. R : « Il y a plusieurs volets que nous pouvons identifier comme particulièrement innovants. Déjà, réunir en un seul lieu 1 poste de pilotage regroupant 6 postes de la gestion de la collectivité, c’est une 1ère prouesse. Ce centre névralgique rassemblera 75 personnes.
OnDijon est inédit en France par son ampleur : toutes les communes de la métropole sont impliquées et directement concernées par le système, ce n’est pas rien, 23 collectivités et 260 000 habitants ! Par exemple, nous allons commencer à remplacer 34 000 points lumineux par des LED sur tout le territoire. C’est aussi la première fois qu’un projet répond à la fois à des problématiques d’entretien de la voie publique (encombrants, travaux de voirie…), d’efficacité des interventions sur l’espace public et de mobilité. Il y a l’aspect financier à ne pas négliger : nous développons un modèle économique et financier innovant par lequel les économies générées par la modernisation des services et des équipements publics, notamment l’éclairage, permet de financer de nouveaux services. Je le rappelle, nous allons faire 65% d’économies d’énergie ! Je suis fier de dire que nous sommes un modèle en la matière. Notre métropole recevra dans les mois à venir des délégations des villes du monde entier. »
DLH : En quoi le quotidien des habitants de la Métropole va-t-il être amélioré ? On parle de nouveaux services qui pourraient voir le jour ?
F. R : « Cela va permettre de simplifier et de mieux coordonner les interventions et les travaux d’entretien des services de la métropole sur l’espace public : les encombrants, les espaces verts, la propreté… ce qui veut dire une plus grande réactivité des agents et donc un niveau de service public jamais atteint. Dans les prochains mois, une application pour smartphone permettra aux habitants de la métropole de signaler en direct des évènements sur la voie publique : accidents, pannes, encombrants… D’autres développements viendront ensuite. »
DLH : Le risque dans cette « ville intelligente » qui fait la place belle aux technologies numériques, n’est-il pas de reléguer l’humain au second plan ?
F. R : « Je pense que c’est le contraire. La technique nous rend ici des services qui permettent aux humains de ne pas perdre de temps. Il faut bien comprendre que cet outil permet de rationaliser et d’améliorer l’efficience du service public. Derrière chaque écran, chaque LED lumineuse connectée, il y a un agent qui contrôle, transmet, traite les informations. Il y a des équipes d’intervention désormais mieux coordonnées. Allo Mairie existera toujours et les habitants pourront continuer à appeler la collectivité. Nous offrons aujourd’hui une possibilité supplémentaire d’interaction entre les habitants et la collectivité. Par ailleurs, et c’est à mon sens très important, développer ce projet a permis la formation de nombreux agents de la collectivité. Nous avons acquis de nouvelles compétences. »
Propos recueillis par Jean-Louis Pierre
François Rebsamen et Florissimo : « Je souhaite avoir le temps d’engager une vraie réflexion sur l’évènement »
Dijon l’Hebdo : Ce devait être une « symphonie végétale »… C’est devenu aujourd’hui une cacophonie qui envahit l’espace politique. La suppression de Florissimo, en 2020, marque-t-elle de votre part une volonté de durcir les relations avec Dijon Congrexpo depuis la mise en place de la nouvelle délégation de service public pour la gestion du Palais des Congrès et du Parc des Expositions attribuées dans les conditions difficiles que l’on sait ?
François Rebsamen : « Une cacophonie, oui. Orchestrée bien souvent par des personnes mal attentionnées. J’ai clairement expliqué les raisons de ce REPORT, et j’insiste sur le mot. Pour Florissimo, il y en a trois. Premièrement, le poids financier de l’évènement : ce sont les services de la ville qui organisent Florissimo, de A à Z. Cela coute très cher. Oui, Congrexpo nous reverse une grande partie des dépenses. Mais cela ne couvre pas la totalité des frais engagés par la collectivité. Et, je l’indique au passage, nous ne récupérons pas les 20 € du ticket d’entrée par personne, ce qui représente un coût très élevé pour une famille avec deux enfants par exemple.
Nous sommes contraints aujourd’hui par l’Etat au respect d’une limite de l’évolution des dépenses à 1,2%, ce que l’on appelle la contractualisation. Cette règle n’existait pas il y a 5 ans, lors de la précédente édition de Florissimo. Cette contractualisation prend en compte chaque centime que nous dépensons. En revanche, elle ne considère aucune recette, pas un euro, et donc pas le remboursement partiel de Congrexpo ! Je ne souhaite pas que la collectivité dépasse ce plafond des 1,2%.
Deuxièmement, je crois profondément que le salon doit évoluer. Être plus écologique, plus durable, plus attractif, plus en phase avec les attentes des gens. Je ne parle pas seulement de la thématique annuelle, je pense à un nouveau modèle, sur le fond et la forme. D’ailleurs, la majeure partie des grandes villes ne participe plus à ce type de manifestation. Je souhaite avoir le temps d’engager une vraie réflexion sur l’évènement. 185 000 visiteurs tous les 5 ans c’est bien, mais nous pouvons mieux faire. Pour cela, nous repousserons d’un an ou de deux ans l’exposition s’il le faut. Enfin, troisième point, Florissimo aurait dû se dérouler quelques jours avant les élections municipales de 2020. Nous ne souhaitons pas que certain, très procédurier, tente un recours sur la manifestation. Il pourrait contester les frais engagés par la collectivité pour les faire imputer dans les comptes de campagne de celui ou celle qui sera candidat. C’est un risque que je ne veux pas prendre. »
DLH : Les mots et les formules échangés ne relèvent plus de la joute verbale. Peut-on parler aujourd’hui de guerre ouverte entre la ville et Dijon Congrexpo ?
F. R : « Je n’aime pas ce vocable guerrier. Il n’y a pas de combat, pas de bras de fer. Ce n’est pas ma conception des relations que devraient avoir un délégataire, Congrexpo, et son délégant, la Ville de Dijon. Avec ces postures, nous n’arriverons à rien. »
DLH : Une « paix des braves » est-elle envisageable ?
F. R : « L’avenir nous le dira. »
Propos recueillis par J-L. P