Bien vieillir : les notaires ne manquent pas de solutions

La cinquantaine passée, de plus en plus de personnes pensent à préparer leur succession. Il est vrai qu’il y a des choses plus amusantes à faire dans la vie, mais cela vaut la peine de se pencher sur « l’après » en prenant des mesures concrètes pour protéger ses biens et sa famille. Anticiper c’est une manière d’être tranquille. Ce que confirme Me Pascal Massip qui a en charge la communication de la Chambre départementale des notaires de Côte-d’Or.

Dijon l’Hebdo : Cette formule « bien vieillir », qu’est-ce que cela recouvre pour les notaires ?

Pascal Massip : « Ce que les notaires constatent, en Côte-d’Or, c’est principalement une recherche de sérénité qui s’appuie sur trois axes forts : assurer une auto-suffisance de la fin de vie vis à vis d’un système social qui est de plus en plus défaillant, la volonté de protéger le conjoint survivant et le souci de bien transmettre aux héritiers, principalement les enfants. Un souci qui relève de deux problématiques différentes : tout d’abord, au plan fiscal, la recherche d’une transmission au moindre coût, et, sur le plan organisationnel, familial et civil, la recherche de la formation de « lots » qui soient équitables et qui apporteront à la fois satisfaction et paix dans les familles après le décès des parents ».

Dijon l’Hebdo : Comment assurer efficacement cette auto-suffisance que vous évoquez ?

P. M. : « Il convient de ne pas se laisser surprendre par l’effet ciseau entre l’augmentation du coût de la fin de vie, notamment lié à l’obligation, parfois, de séjourner dans des maisons de retraite plus ou moins médicalisées, et le montant des retraites qui se dévalorisent peu ou prou.

Les notaires sont souvent sollicités pour un audit du patrimoine et valider ainsi la compatibilité des revenus avec le besoin du financement de fin de vie. Nous sommes amenés, ensuite, à conseiller des arbitrages patrimoniaux qui sont destinés souvent à soutenir les revenus. Cela peut être, par exemple, des placements sous forme de SCPI qui vont favoriser un fort revenu au détriment d’une valeur patrimoniale dans le long terme. On peut aussi avoir des ventes en viager : là on aliène complètement le patrimoine et son capital pour privilégier des revenus la vie durant de la personne. On a même maintenant des prêts viagers hypothécaires qui permettent à des seniors de souscrire des emprunts qui leur apportent un capital en donnant en garantie leur patrimoine immobilier qui sera aliéné au moment de leur disparition pour que les descendants remboursent l’emprunt. Les notaires mettent régulièrement en place ces solutions patrimoniales destinées à accompagner de la meilleure façon la fin de vie ».

Comment assurer une bonne protection du conjoint survivant ?

P. M. : « La protection du conjoint survivant va être adaptée par les notaires en fonction du régime matrimonial. Elle peut revêtir deux aspects : soit la donation traditionnelle entre époux, soit un changement de régime matrimonial pour adopter une communauté universelle de façon à ce qu’il n’y ait plus de succession au décès de l’un des deux conjoints. Nous avons là une transmission de l’intégralité du patrimoine au profit du conjoint encore vivant ».

Combien peut-on donner à ses enfants sans payer d’impôts ?

P. M. : « Transmettre, de son vivant, une partie de son patrimoine à ses enfants ne signifie pas forcément que des droits devront être payés. Consentir un don de son vivant à un enfant, qu’il s’agisse d’un bien ou d’argent, ne pose aucun problème pratique. Mais pour que l’opération soit exonérée de taxes, il faut respecter certaines limites. Depuis 2012, le montant qui échappe totalement au fisc, appelé « abattement », est de 100 000 euros. Chaque enfant peut ainsi recevoir 100 000 euros de votre part et 100 000 euros de son autre parent sans payer d’impôts. Vous pouvez même renouveler l’opération tous les quinze ans ».

Et pour les biens immobiliers ?

P. M. : « Concernant les biens immobiliers, on peut faire des donations de pareil montant, soit jusqu’à 100.000 euros avec exonération ».

Pourquoi faire une donation ?

P. M. : « Donner, c’est une manière d’anticiper sa succession en aidant de son vivant ses enfants, ses petits-enfants, d’optimiser fiscalement la transmission, les abattements se renouvelant tous les 15 ans et d’éviter les éventuelles difficultés liées au partage de la succession. Et pour éviter tout conflit ultérieur, mieux vaut recourir à une donation-partage. Il est important de s’assurer les conseils d’un notaire qui est, je le rappelle, le spécialiste du droit de la famille. Une donation n’est jamais un acte anodin et l’acte de donation notarié peut contenir diverses dispositions d’un grand intérêt pour le donateur et ceux qui reçoivent ».

A quoi sert la donation-partage ?

P. M. : « Elle permet de régler tout ou partie de votre succession de votre vivant en opérant un partage définitif des biens donnés entre les donataires, qui ne peut pas être remis en cause au décès du donateur. Les biens donnés sont en principe évalués en valeur au jour de la donation-partage.

L’objectif de la donation-partage est de répartir votre patrimoine équitablement entre vos enfants, et ainsi de régler par avance votre succession. Un tel acte concerne donc tous vos enfants, chacun touchant au moins l’équivalent de sa part de réserve. C’est le notaire qui se charge, en accord avec vous, de confectionner les lots puis de les transmettre aux enfants ».

Propos recueillis par Jean-Louis PIERRE