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« S’il y a 49-3 [sur le projet de loi immigration], la conséquence sera une motion de censure ». C’est Éric Ciotti, patron des Républicains, qui a agité le chiffon rouge sur LCI, lundi 2 octobre. Et c’est une menace à prendre très au sérieux pour l’exécutif même s’il n’est pas certain que ce soit Emmanuel Macron qui ait le plus à perdre.
Jusqu’à maintenant, et même s’il dispose d’une majorité relative, le gouvernement Borne a passé tous les obstacles parlementaires sans encombre. Les 18 motions de censures ont toutes été largement rejetées. Seul le texte déposé en réaction au 49-3 dégainé sur la réforme des retraites a failli être adopté. A 9 voix près. Une vingtaine de députés LR avaient en effet joint leurs voix à celles des oppositions de droite et de gauche. Pour toutes les autres motions, les 59 députés LR ont toujours refusé de censurer le Gouvernement.
Pour deux raisons. Déjà, pour apparaître aux yeux des Français comme une opposition « responsable ». Mais surtout par pure stratégie politicienne. Les députés LR issus des urnes de juin 2022 savent en effet pertinemment qu’ils sont des miraculés. Après le score calamiteux de Valérie Pécresse au premier tour de la présidentielle (4,7%), partir au combat des législatives relevait du chemin de croix. Et ceux qui ont sauvé leur peau n’ont guère envie de repartir prématurément au front. Or, c’est ce qui se passerait vraisemblablement si une motion de censure était votée et que le Gouvernement Borne était renversé. Macron n’aurait alors d’autre choix que de dissoudre l’Assemblée nationale et de convoquer les électeurs pour un nouveau scrutin législatif.
Pour les députés LR, la motion de censure est donc une arme nucléaire à un coup. S’ils décident d’appuyer sur le bouton, c’est l’apocalypse parlementaire assuré pour le pays et… pour eux !
En cas de dissolution de l’Assemblée et de législatives anticipées, les députés LR seraient en effet probablement peu nombreux à retrouver leurs sièges au Palais-Bourbon. La faute à une stratégie politique de gribouille, illisible et incompréhensible par leurs électeurs depuis plus d’un an. Un seul exemple : comment expliquer qu’ils n’ont pas voté unanimement une réforme des retraites qu’ils appellent de leurs vœux depuis des années ?
Mais avec le projet de loi sur l’immigration, les amis de Ciotti et de Marleix sont placés entre le marteau et l’enclume. Soit ils votent un texte qui contient plusieurs dispositions qu’ils jugent inacceptables, au risque de passer pour des « mous » et décevoir une nouvelle fois leurs électeurs sur un sujet qui les rassemble. Soit ils refusent, obligent Élisabeth Borne à passer par le 49-3 et votent ensuite la motion de censure qui renverse le Gouvernement.
Deux options aussi mauvaises l’une que l’autre. Dans le premier cas, ils se renient une nouvelle fois et perdent le peu de crédibilité qu’il leur reste mais conservent leur mandat jusqu’en 2027. Dans le second, ils font passer leurs convictions avant la tambouille politicienne mais obèrent leur chance de rempiler au Palais-Bourbon en cas de retour prématuré aux urnes. Deux possibilités. La peste ou le choléra.