Étourderies ou tartuferies ?

La Haute autorité pour la transparence de la vie publique, ou HATVP, a été créée sur les cendres de la tristement célèbre affaire Cahuzac. Du nom de ce ministre des Finances de François Hollande, chargé de faire la chasse aux fraudeurs fiscaux alors même qu’il était détenteur d’un compte en Suisse. L’archétype du pompier pyromane.

Cette autorité administrative indépendante a notamment pour compétence de contrôler avec soin les déclarations de situation patrimoniale et les déclarations d’intérêts et d’activités des « grands » élus. Histoire de vérifier, notamment, que lesdits élus ne se sont pas enrichis à l’issue de leur mandat. On peut critiquer cette transparence à outrance et ce voyeurisme malsain, une sorte d’américanisation de la vie politique, mais quand on parle d’argent public, on est en droit de savoir s’il est bien utilisé.

La HATVP vient de publier le résultat de ses enquêtes approfondies sur les déclarations des députés élus à l’été 2022. Elle n’a relevé « aucune infraction légale nécessitant de saisir la justice » comme le souligne Le Monde dans son édition du vendredi 17 février. Aucune infraction, certes, mais quelques étourderies. Ou, pour le dire avec des pincettes et de façon plus administrative, des « erreurs formelles ou des inexactitudes non substantielles ».

Et Le Monde de citer notamment Yaël Braun-Pivet. On parle quand même de la Présidente de l’Assemblée nationale. Le 4ème personnage de l’Etat a tout simplement « oublié » de déclarer 40 000 euros actions de sociétés cotées en Bourse. 40 000 euros ! Quand on n’a pas de tête…

Marine Le Pen, quant à elle, manque également d’attention. La patronne du RN au Palais-Bourbon a ainsi omis de déclarer ses participations financières dans deux SCI. Après tout, ce n’est pas grand-chose deux SCI. Sauf si les sociétés sont évaluées à plus de 600 000 euros.

Que dire de François Ruffin. L’Insoumis avait estimé la valeur de sa société de production audiovisuelle à un peu moins de 34 000 euros. La HATVP l’a revue légèrement à la hausse. Oh, trois fois rien : plus de 460 000 euros. Etre révolutionnaire marxiste et fâché avec le grand capital, rien de plus naturel.

Fâchée avec les chiffres, Sandrine Rousseau l’est assurément. Sinon comment expliquer que sa SCI, qu’elle avait évaluée à 500 euros, a été « corrigée » par les membres de la Haute autorité à hauteur de presque 110 000 euros.

C’est quand même curieux et un peu inquiétant tous ces élus qui semblent autant largués au moment d’évaluer leur propre patrimoine. Ils sont censés écrire la loi qui s’appliquera ensuite à tous les Français alors qu’eux-mêmes paraissent n’avoir qu’une vision toute relative des règles qui s’imposent à eux.

Que des « erreurs formelles » ou des « inexactitudes non substantielles » selon la HATVP. Alors, certes, errare humanum est, l’erreur est humaine, mais quand on se trompe à ce point, quand on minore son patrimoine de plusieurs dizaines de milliers d’euros, ce n’est plus une étourderie, c’est de la tartuferie.