Lettre à Shell que j’aime

Bonjour Chérie

Je me languis de toi, mais il faut que tu sois patiente car je vais être obligé de venir te voir à pied. Je n’ai jamais connu de jours si ternes. Je compte malheureusement parmi la foule de ces automobilistes imbéciles et sots qui s’obstinent à vouloir faire le plein dans le réseau des 27% de stations touchées par des difficultés d’approvisionnement pour lamentablement finir sur une banquette de covoiturage. Je n’ose même plus aller pêcher à Panthier, à Cercey, au Tillot ou à Grosbois parce que ce sont des réservoirs. Plus rien ne m’intéresse, c’est comme une panne des sens, une sorte d’état stationnaire, je n’ai même plus de poêle à mazout. J’écoute les discours bidons du patronat, des syndicats et du gouvernement et je fais mon plein d’infos catastrophiques, d’ambiance inflammable et de situation explosive. Tous ces bavards de l’inutile me paraissent complètement siphonnés, si loin du vrai, si foin des autres. La CGT reprend du gallon, on est à cent lieues des exploits du capitaine Barril… Je n’ai même plus envie de jouer au jeu si raffiné des Mille Bornes. Au passage, je remarque que rien ne change vraiment : la pompe et la queue restent toujours inséparables. Et l’on nous rabâche la même chanson: plus de super 95 à la Pompili, la moitié des stations Attal-Énergie à sec… la pénurie de pneus chez Michelin et Dussopt. Dans la manipulation des prix, j’ai peur que Leclerc batte Avia…

En attendant, Gilbert Montagné se refait la cerise en chantant « The Fioul » en replay sur tous les plateaux. Par solidarité sans doute les chasseurs se mettent au sans plomb, mais continuent à carburer au gros rouge dans les maisons forestières. Le sergent Macron répète à qui veut l’entendre qu’il s’Agip avant tout d’un conflit entre patrons et salariés et qu’il ne s’en mêlera pas de peur qu’on l’accusât d’être jauge et partie. Je t’embrasse … tu es mon Elf.

Alceste