Guillaume Lorisson : « L’attractivité de Dijon joue un rôle essentiel »

Prix au mètre carré, volumes de ventes, montant des transactions… La quasi-totalité des indicateurs immobiliers ont atteint des valeurs records en 2021. Guillaume Lorisson, président de la Chambre départementale des notaires de Côte-d’Or, revient sur cette année exceptionnelle et évoque ce que pourrait être le marché dans les mois qui viennent.

Dijon l’Hebdo : Si vous deviez résumer l’année 2021… ?

Guillaume Lorisson : « L’immobilier, en 2021, a été caractérisé par un grand « boom ». On peut qualifier cette année d’exceptionnelle à tous points de vue. Dans les volumes d’activités, bien sûr, alors même qu’on était déjà sur des chiffres de ventes très élevés dans les années 2018, 2019 et même 2020 malgré la crise du covid. Plus que jamais, l’immobilier représente une valeur sûre ».

DLH : Même constat sur notre région ?

G. L : « La Côte-d’Or et Dijon s’inscrivent naturellement dans une dynamique nationale. L’activité immobilière a connu une nouvelle accélération qui s’est traduite sur l’ensemble du département par une progression qui a dépassé les 11 % pour atteindre des niveaux record. Effet mécanique, les prix ont naturellement suivi ce mouvement et ont augmenté de 6,5 % sur le département. C’est un peu moins que sur l’ensemble du territoire national -hors Ile-de-France- où on est à 7,5 % pour les appartements et 9,1 % pour les maisons ».

DLH : Et les zones les plus éloignées de Dijon ont, elles aussi, profité de la situation ?

G. L : « 2021 a remis au goût du jour des biens et des secteurs qui étaient jusqu’alors quelque peu en souffrance. On a senti l’effet post-covid qui a souligné l’envie d’un certain nombre de personnes de s’éloigner des centres urbains. Je pense notamment à l’Auxois-Morvan, au Montbardois, en partie au Châtillonnais où l’immobilier n’était pas au mieux jusqu’alors avec de petits volumes de ventes et de petits prix. Il fallait même parfois des années pour vendre une maison. 2021 a tout particulièrement modifié la donne sur ces secteurs géographiques ».

DLH : Comment les prix ont-ils évolué ?

G. L : « A Dijon, le prix médian des appartements anciens a atteint 2 400 € le m2. Des montants qui peuvent paraître élevés et qui ont pris plus de 20 % en l’espace de deux ans. Des montants qui restent très éloignés des marchés parisiens et lyonnais. On voit de plus en plus de personnes qui viennent investir à Dijon parce que le prix de l’immobilier reste encore raisonnable.

Si on prend le prix de vente des maisons, il est aujourd’hui à un prix médian de 262 000 € sur Dijon, de 253 000 € dans la périphérie dijonnaise. On est là sur des hausses de 4 à 5 % bien plus fortes que celles qu’on a pu constater ces années dernières. L’attractivité de Dijon – capitale régionale y est évidemment pour beaucoup.

La Plaine et le Val de Saône, l’Auxois-Morvan ont vu le prix des maisons augmenter de 10 à 11 % mais avec des prix médians de 114 000 €, beaucoup plus bas que sur la Métropole.

Sur le neuf, on sort là aussi d’une bonne année avec d’importants volumes. A Dijon et sur la Métropole, où se concentrent l’essentiel des constructions neuves, le prix médian est à 3 500 / 3 600 € le m2. Il reste inférieur au prix médian français qui est à 4 060 € ».

DLH : Les difficultés en approvisionnement de matériaux ne risquent-elles pas de freiner les ventes ?

G. L : « Pour l’heure, on ne peut parler de ralentissement des ventes de biens immobiliers neufs. Les difficultés d’approvisionnement que l’on peut constater ici ou là dans certains secteurs n’impactent pas réellement, pour le moment, le marché et les volumes de ventes. Cela impacte surtout les délais de livraison qui sont, de facto, un peu plus longs.

Le marché du neuf se caractérise à Dijon par une dynamique de renouvellement du parc dans le sens où il n’y a véritablement plus de terrains disponibles. Les dernières grandes opérations arrivent à leur terme et, aujourd’hui, l’immobilier passera inéluctablement par de la démolition et de la reconstruction. Ce qui, à mon sens, est une bonne chose dans la mesure où cela permet, la plupart du temps, de démolir des habitations inadaptées sur le plan thermique au profit de logements répondant aux normes énergétiques et plus confortables pour leurs occupants. C’est ce qu’on appelle « reconstruire la ville sur la ville ». On le voit, par exemple, dans le cadre d’opérations d’aménagement sur d’anciens sites militaires, industriels, administratifs. Ce sont aujourd’hui des solutions qui répondent à de véritables besoins ».

DLH : Comment voyez-vous cette année 2022 ?

G. L : « L’année 2022 se présente sous de bons auspices, dans la dynamique de sortie de la crise sanitaire, d’un plan de relance à la fois français et européen de nature à soutenir l’activité économique et d’un taux de chômage qui apparaît statistiquement assez bas. Ces perspectives d’avenir sont à même de donner confiance et envie d’investir dans l’immobilier.

Le début d’année est revenu sur des standards plus calmes et traditionnels. L’immobilier neuf est pour moitié un immobilier d’investisseurs qui sont aujourd’hui dans l’attente de voir si les dispositifs d’accompagnement fiscaux seront prolongés et, bien évidemment, le contexte de l’élection présidentielle provoque toujours un réflexe de prudence.

L’activité a été tellement forte l’année dernière qu’on a eu le sentiment que les acquéreurs et les investisseurs ont eu besoin de souffler un peu en janvier et février. Mais on a constaté ces dernières semaines un retour d’activités significatives comme en témoignent les compromis de ventes de ce mois de mars soutenus par des taux d’intérêt qui restent attractifs même s’ils ont tout de même légèrement augmenté. Cela nous amène à penser qu’on est en train de prendre le tournant d’une année moins frénétique et plus classique.

Force est de reconnaître que le marché immobilier, qui manque de biens à vendre, devrait s’assagir avec des volumes qui resteront tout de même significatifs et des prix qui devraient se stabiliser.

Les prix sont élevés et, pour tous ceux qui souhaitent vendre, il ne faut pas hésiter. C’est le moment de faire le pas. Les acquéreurs, les agents immobiliers n’attendent que ça : voir des biens sur le marché. Ce serait la meilleure façon de voir les prix se stabiliser.

On reste toutefois dans une incertitude liée au contexte international mais qui ne semble pas affecter outre mesure l’appétence de nos compatriotes pour acquérir des biens immobiliers ».

DLH : L’augmentation des carburants ne va-t-elle pas mettre un coup d’arrêt à ces envies de s’installer dans des zones péri-urbaines ou rurales ?

G. L : « Je n’en suis pas sûr. Ces déplacements vers l’extérieur ont été motivés par l’envie de vivre dans un cadre plus « nature », plus verdoyant, moins concentré que dans les zones urbaines. C’est le schéma classique des gens qui partent avec leurs enfants pour profiter d’un jardin. Et puis cela a été aussi le fruit de l’évolution des modes de travail. Beaucoup de ces personnes qui se sont éloignées des villes ont la possibilité de télé-travailler au moins une journée par semaine, voire plus. Et dans ce cas là, l’impact transport n’est absolument plus le même. Si on rajoute à cela l’arrivée massive de véhicules hybrides ou électriques, écologiquement plus vertueux, qui vont faire baisser les coûts de déplacement, nos clients reconnaissent que l’éloignement n’est pas un handicap dans la mesure où une partie de leur vie professionnelle s’appuie sur le virtuel. Le développement de la 4G, de la 5G, de la fibre leur permet de mener une vie de citadin depuis la campagne. On arrive ainsi à maîtriser ses dépenses malgré l’éloignement. Le marché de l’immobilier est en quelque sorte le vrai témoin d’une forme de transition écologique ».

Propos recueillis par Jean-Louis Pierre