Voyage dans le temps : Dégustation (verticale) du caractère international

Il faudra patienter pour découvrir le bijou qu’est « l’Ile d’Emeraude ». Cette édition 2020 de la Foire aurait dû, en effet, dérouler le tapis rouge (enfin vert dans le cas présent) à l’Irlande. D’ici là – et dans l’attente également de retrouver les pubs –, nous vous proposons une dégustation (verticale) du caractère international de l’événement gastronomique dijonnais. Retour en arrière…

Gaston Gérard aurait été fier de voir ce que SA foire est devenue. L’ancien maire de Dijon fut, en effet, à l’origine de cet événement afin, comme il l’expliquait à la veille de la première édition en 1921, de « faire revivre les vieilles traditions culinaires et gastronomiques de la Province de Bourgogne illustrée par ses vins fameux et la cuisine non moins célèbre de ses Ducs ». Pour ce faire et avec l’appui de l’industriel dijonnais Xavier Aubert, il s’inspira du modèle lyonnais de la Foire des Soieries. Organisée, à ses débuts, dans les salons du palais des Ducs et place de la Libération – jusqu’à l’église Saint-Philibert tout de même – puis, devant l’affluence grandissante, place Wilson et allées du Parc où étaient érigées des constructions en bois provisoires afin d’accueillir les exposants, son rayonnement fut régional puis national. Trois ans après la sortie de terre du parc des Expositions boulevard de Champagne avec le soutien de la Ville et de la Chambre de commerce, elle s’intitula, en 1959, la « Foire française de l’alimentation », dépassant alors son caractère régional. Ce n’est qu’en 1963, en accord avec la Fédération des industries alimentaires, que le gouvernement lui accola le qualificatif d’« internationale » : en 1969, un « Salon international de l’alimentation » s’y déroula pour la première fois mais exclusivement dédié aux professionnels. Et c’est en 1975 qu’elle prit définitivement le titre de « Foire internationale et gastronomique… », grâce à l’agrément du ministère du Commerce et de l’Artisanat.

Jean Battault, grand chasseur… de talents étrangers

Gaston Gérard, qui fut le premier membre d’un gouvernement français à être chargé du Tourisme (à l’époque cette délégation était liée aux Travaux publics !), se serait félicité, c’est certain, de cette croissance et de cette ouverture à l’internationale. Lui qui se fit le chantre, lors d’une tournée de taille dans 32 pays, jalonnée de pas moins de 600 conférences, de l’intérêt, à l’étranger, de découvrir les trésors – gastronomiques et vineux – de l’Hexagone ! Il aurait, à n’en pas douter, été fier que, chaque année depuis 1980, ce caractère international soit illustré par l’invitation d’un hôte d’honneur étranger. Une typicité accentuée par Jean Battault, président de Dijon Congrexpo, dont le talent de chasseur… de talents étrangers n’est plus à prouver (tout comme celui pour le gibier à poils ou à plumes). Les bouteilles jetées à la mer par l’ancien patron emblématique du liquoriste Gabriel Boudier ont toutes trouvé preneur, permettant, au fil des années, à des millions de visiteurs de voyager, depuis Dijon, vers de lointaines contrées.

Si la Covid-19 n’était pas passée par là, annulant l’organisation de cette édition 2020, nous aurions eu droit cette année à un nouveau bijou : « l’Île d’Emeraude ». L’Irlande et ses charmes gaéliques (et l’on ne parle pas seulement de ceux brassés ou distillés) auraient ainsi succédé à l’envoûtement et aux mystères de l’Inde, le Gange ayant cheminé, de concert, l’année dernière, avec l’Ouche. En 2018, la Foire de Dijon s’était laissée bercer par la Dolce Vita, cette douceur de vivre italienne popularisée par le film de Federico Fellini, Palme dor à Cannes en 1960. Et nous pourrions continuer longtemps ce retour en arrière : Vietnam, Allemagne, Chili, Portugal, Afrique du Sud, Argentine, Ile Maurice, Hongrie, Grèce, Thaïlande, Liban, Espace, Chine, Mexique, Maroc, Russie, Québec, Corée du Sud… telle est la longue liste des pays invités depuis l’édition 2000. Evoquer ces souvenirs internationaux de la Foire, c’est un peu le moyen, pour notre rédaction, de vous faire voyager alors que les frontières ne sont plus ouvertes comme avant. Une chose est sûre : vivement l’après, vivement la 100e édition de la Vieille Dame qu’est NOTRE Foire internationale et gastronomique de Dijon. Une Vieille Dame qui est dans une forme éblouissante. Il faut dire que, comme l’écrivait Montaigne, « les voyages forment la jeunesse ! »

Camille Gablo