Stéphanie Chevalier-Lopez : Le menu anti-Covid

L’Union des métiers et de industries de l’hôtellerie (UMIH) de Côte-d’Or et Stéphanie Chevalier-Lopez, dirigeante de SCL Qualité, ont en commun la solidarité. Pour preuve, ces deux partenaires ont développé des ateliers gratuits de 2 heures en visioconférence à destination des professionnels de ce secteur particulièrement impacté par la crise pour qu’ils puissent rouvrir dans les meilleures conditions. Une initiative que nous vous proposons de déguster sans modération… avant de pouvoir retrouver vos restaurants préférés !

Stéphanie Chevalier-Lopez, la dirigeante de SCL Qualité, centre de conseil en hygiène alimentaire dédié aux métiers de bouche, est, elle aussi, sur le front pour épauler depuis le 17 mars dernier nombre de professionnels. En premier lieu, ceux de première nécessité, à l’instar des boulangers ou bouchers-charcutiers, qui sont restés ouverts et ont permis de nourrir leurs concitoyens dans cette sombre période. Ensuite, les restaurateurs afin qu’ils puissent rouvrir en respectant le protocole sanitaire en cours de finalisation au sein du ministère de la Santé et du Travail. Même si elle « ne disposait pas de boule de cristal » lui permettant de prophétiser les futures règles, notamment celles de distanciation qui inquiètent particulièrement nombre d’entre eux, elle a pu mettre ses compétences d’ingénieur qualité au service d’une profession particulièrement fragilisée par la « guerre sanitaire contre le Covid-19 ». Ce sont, en effet, eux qui ont ouvert le bal des fermetures et du confinement le samedi 14 mars dernier. Et, dans les zones rouges telles la Bourgogne Franche-Comté, ils ne savent pas encore quand ils pourront enfin accueillir à nouveau leur clientèle. En espérant, en outre, que le climat anxiogène ne conduise pas cette même clientèle à fuir leurs établissements de… convivialité. 
Les audits hygiène et, dorénavant, anti-Covid, que Stéphanie Chevalier-Lopez, a développés pourraient, à n’en pas douter, participer à recréer un véritable climat de confiance. Une chose est sûre : l’accompagnement de cette ancienne responsable qualité, diplômée d’un master en qualité nutritionnelle, qui a sillonné la France pour une centrale de découpe de viande et volaille avant de poser ses valises sur ses terres natales de Bourgogne et de s’établir à son compte en 2015, affiche actuellement toute sa pertinence. 
Ses missions du « monde d’avant » (le Covid-19) prennent encore plus de sens aujourd’hui : « la mise en place de plans d’action par rapport aux différents établissements, la mise à jour de plans de maîtrise sanitaire, le conseil pour les créations d’entreprise, les avis sur plan de laboratoire, le travail en parallèle aux architectes ou aux maîtres d’œuvre afin d’apporter ses connaissances sur les contraintes techniques liées à l’hygiène alimentaire… » Ayant ouvert un deuxième centre en Avignon en début d’année et envisageant de s’implanter sur d’autres territoires hexagonaux d’ici la fin 2020, elle se développe afin d’apporter son expertise au plus grand nombre.

Alors que les restaurateurs attendent le « monde d’après » avec une impatience grandissante (on les comprend sachant que leur chiffre d’affaires est de 0 depuis plus de deux mois –, le partenariat qu’elle a tissé avec l’UMIH Côte-d’Or – l’Union des métiers et de industries de l’hôtellerie qui est également sur le front pour aider ses quelque 600 adhérents – a révélé toute sa pertinence ces dernières semaines. Ayant, tout comme l’UMIH, la solidarité chevillée au corps (et au cœur), Stéphanie Chevalier-Lopez a distillé gratuitement, par le biais de visioconférences, ses conseils à nombre de professionnels du département. Et ce, afin qu’ils ne soient pas « mangés » par les futures contraintes en matière d’hygiène sanitaire qui rythmeront prochainement leur quotidien. Nous avons demandé à cette meilleure ouvrière de France (MOF 2019) de nous en dire plus sur le… menu anti-Covid 19 dans les restaurants !

Camille Gablo

Plus d’informations sur www.sclqualite.com

Dijon l’Hebdo : Alors que les professionnels de la restauration attendent, avec impatience, le feu vert du gouvernement pour pouvoir enfin rouvrir, nombre d’entre eux s’interrogent sur les nouvelles règles d’hygiène et de sécurité sanitaire auxquels ils seront soumis. Comment, dans ces conditions, pouvez-vous les conseiller ?

Stéphanie Chevalier-Lopez : « Pour le moment, nous nous inspirons des fiches métiers qui sont apparues pour certains corps de métiers. C’est vrai notamment pour les établissements qui n’ont pas été confinés, où des recommandations et des protocoles ont été validés. Nous regardons également ce qui se passe à l’étranger. Nous voyons comment cela se déroule, quelles sont les conséquences… Cela permet de nourrir la réflexion afin de savoir comment, dans l’Hexagone, devraient être édictées les nouvelles normes dans les établissements ».

DLH : Votre Centre a dû être très particulièrement sollicité depuis le début de la crise sanitaire…

S. C-L : « Lorsque le confinement est intervenu, j’ai eu une surcharge de travail pour les établissements qui sont eux restés ouverts. Il fallait qu’ils puissent continuer d’œuvrer tout en ne mettant pas en danger à la fois le personnel et la clientèle face à la propagation du virus. Il a également été nécessaire de revoir les protocoles de fabrication avec du personnel en moins, avec des équipes réduites. Ce fut vrai notamment pour les boulangers, les bouchers-charcutiers… pour l’ensemble des métiers de bouche. Nous avons mis en place de nouvelles procédures pour, notamment, rassurer les salariés qui restaient sur leur terrain. Il y a les industriels évidemment mais il ne faut pas oublier les métiers de bouche qui sont restés sur le front. La clientèle s’étant beaucoup tournés vers eux, ils n’ont pas chômé d’ailleurs… »

DLH : Comment vous est venue l’idée d’intervenir gratuitement auprès des adhérents de l’UMIH Côte-d’Or ?

S. C-L : « J’ai vu tous ces cuisiniers qui commençaient à développer de la restauration pour les équipes des hôpitaux afin de les soutenir. Je me suis alors interrogée : que puis-je faire, à mon niveau, pour aider ? L’idée m’est venue de mettre en place des ateliers conseils. Je l’ai fait au départ avec mes clients. Et ce afin de les aider à répondre aux questions qui se posaient alors : qu’est-ce qui nous arrive ? Comment peut-on adapter nos bonnes pratiques d’hygiène avec la circulation du virus ? Comment rassurer la clientèle afin qu’elle ne craigne pas de retourner dans les restaurants ? Tout cela, sachant que nous avons tout de même affaire à un public de professionnels qui a l’habitude de respecter des normes d’hygiène… Mon objectif étant ainsi de les adapter à ce danger supplémentaire. J’ai mis en place un premier atelier puis un deuxième, et, après en avoir discuté avec la secrétaire générale de l’UMIH Côte-d’Or, Isabelle Grandin, qui a communiqué l’information auprès de ses adhérents, il y a eu un vrai engouement pour ces ateliers où j’interviens en tant que partenaire de l’UMIH Côte-d’Or. C’est avec cette initiative bénévole que j’ai pu apporter ma pierre à la solidarité. Lors du dernier atelier en visioconférence, ils étaient plus de 80 professionnels à participer afin d’écouter les consignes, qui ne sont pas, je le rappelle encore, des directives, concernant leur métier, et ce grâce aux connaissances que l’on a aujourd’hui. Derrière, nombre de questions se sont faites jour… Nous avons ainsi tenu 8 ateliers et ce sont environ quelque 300 professionnels qui en ont bénéficié ».

DLH : Quelles sont les questions récurrentes que posent les professionnels lors de vos ateliers ?

S. C-L : « Evidemment, les interrogations sont nombreuses sur le port du masque, sur l’utilisation du gel hydroalcoolique, sur la façon de gérer des réceptions… ou encore sur les menus. Par rapport aux menus, nous avons une obligation de résultat afin qu’ils ne passent pas de main en main, de table en table, sans décontamination. Soit l’on est sur une désinfection entre tables, soit sur un système à usage unique, soit encore sur un système électronique. Plusieurs solutions existent, après, à chacun de les adapter à leur établissement, à leur style, à leur clientèle ou encore en fonction du personnel à disposition. La question majeure étant : voilà le résultat demandé et comment l’obtenir dans mon établissement compte tenu des contraintes que j’ai ? Certains s’interrogent s’ils doivent flécher la circulation des clients dans leur établissement. Cela dépend de la configuration, s’ils disposent d’une entrée et d’une sortie différentes. Souvent ce n’est pas le cas, si bien qu’il sera impossible de mettre en place un circuit. En revanche, on peut demander à la clientèle d’attendre à l’entrée, où sera mis à disposition le gel hydroalcoolique, avant de les conduire à une table de libre, ceci permettant à la clientèle de ne pas s’entasser à l’intérieur ».

DLH : J’imagine que beaucoup vous voient comme une pythie et vous interrogent sur les futures règles de distanciation à l’intérieur même de leurs établissements…

S. C-L : « Pour cela, je n’ai malheureusement pas de boule de cristal. Là aussi, nous nous inspirons de ce qui se passe à l’étranger mais aussi de ce que l’on demande à certains professionnels pour qu’ils puissent rouvrir. Nous regardons ainsi par exemple les contraintes appliquées aux coiffeurs… »

DLH : A vos yeux, la France devrait s’inspirer de quel protocole étranger ?

S. C-L : « Je ne pense pas qu’il y ait un exemple plus pertinent qu’un autre parce que cela dépend véritablement des établissements. Je prends l’exemple de la séparation entre les tables. Si l’espace est suffisamment grand, il y a déjà une séparation. Ce n’est pas nécessaire. Dans des espaces plus serrés, on peut l’imaginer et ces séparations pourraient s’intégrer à la décoration. Ce pourrait être quelque chose de très sympa qui permettrait même de relooker les espaces. On voit bien là que les solutions dépendent de chaque type de restaurant ».

DLH : Pour le « monde d’après », selon l’expression désormais consacrée du président de la République, avez-vous, vous aussi, adapté votre activité ?

S. C-L : « Je me suis évidemment adaptée à cette crise et, notamment, dans l’offre de suivi hygiène à l’année. J’ai ajouté un audit anti-Covid afin de vérifier que les établissements respectent les points clés recommandés. J’ai déjà mis en place cette nouvelle grille pour les métiers de bouche. J’attends évidemment les protocoles pour les restaurants. Dans le certificat de suivi en hygiène que je donne aux clients afin qu’ils puissent l’afficher, j’ai développé un label anti-Covid que les professionnels pourront aussi apposer sur leur devanture. Ils pourront ainsi communiquer dessus afin de rassurer leur clientèle. A la base, le suivi en hygiène est déjà apprécié. Cela devrait renforcer le lien avec le consommateur… »