Gilbert Menut : « La métropole doit en finir avec le maire bashing »

Avec la création de la nouvelle salle culturelle, L’Écrin mais aussi celle de la Maison Alix de Vergy dédiée au tourisme, le maire de Talant, Gilbert Menut, joue la carte de l’attractivité. Mais il affiche aussi sa différence au sein de la métropole. Interview… décapante !

Dijon l’Hebdo : Vous lancez la première saison pleine de votre nouvel équipement culturel, L’Écrin. Quel bilan dressez-vous des premiers mois de fonctionnement ?

Gilbert Menut : « La première mini-saison de l’Écrin s’est déroulée parfaitement, la salle faisant carton plein. L’action culturelle à Talant a pris une nouvelle dimension en accueillant des artistes mais aussi des publics extrêmement variés qui ne seraient jamais venus si nous n’avions pas réalisé cet espace. Ce Prélude a été très utile. Les spectacles des écoles, tout comme les concerts, classiques ou autres, les spectacles de variétés, ont très bien fonctionné. Le public, divers et varié, a répondu présent et la salle a elle aussi répondu aux exigences du public. Les remarques montrent que l’on y est très bien installé et que l’acoustique est de qualité, quel que soit le type de musique… Nous avons l’outil pour être dans une dimension différente des grandes salles. Il ne s’agissait pas de recopier ce qui existait déjà et le format original de 430 places répond parfaitement aux besoins mais aussi aux capacités de la commune ».

DLH : L’Écrin représente un levier pour l’attractivité. Mais, vous avez aussi souhaité favoriser le développement de votre commune, au niveau touristique, avec la création de la Maison Alix de Vergy. N’était-ce pas une façon d’afficher votre différence par rapport à la métropole et à sa politique touristique ?

G. M. : « Ce n’est pas tellement notre différence mais notre complémentarité. Personne, même le plus gros des plus gros, ne peut prétendre monopoliser l’animation d’une métropole. Si l’on a une métropole, il faut avoir un comportement de métropolitain. Prenons comme exemple le Grand Paris. Paris est fondamentale mais les villes autour ont toutes leurs personnalités. Chacune joue son rôle. Dans la métropole dijonnaise, c’est pareil : lorsque vous êtes à Talant, vous n’êtes pas à Chevigny et quand vous êtes à Chevigny, vous n’êtes pas à Chenôve… Et tout cela tourne autour de Dijon. Mais cette vision de donjon, qui fait qu’en dehors de celui-ci il n’y a rien, est une source d’appauvrissement de la métropole ».

DLH : Vous voulez dire que la métropole dijonnaise est différente du Grand Paris…

G. M. : « Déjà par sa taille mais par son fonctionnement aussi ! Il faut que l’on ait un comportement beaucoup plus ouvert qui mette en valeur le dynamisme de toutes les villes et villages du tour de Dijon, en complément de ce qui se passe dans la capitale bourguignonne elle-même ».

DLH : Ainsi la devise d’Alexandre Dumas « Un pour tous, et tous pour un » ne serait pas celle de la métropole…

G. M. : « Je préfère parler des belles bagues. Vous avez une belle pierre et nombre de petits diamants tout autour. C’est comme cela que les communes pourraient toutes briller ! »

DLH : Pourquoi êtes-vous autant vent debout contre le PLUI-HD (Plan local d’urbanisme intercommunal) dont l’adoption bat son plein actuellement ?

G. M. : « Battre son plein est la bonne formule. Le PLUI-HD est à l’image de cette politique inadéquate que je dénonce. Ce document a été élaboré dès son origine comme cela : on nous a dit que les limites des communes doivent disparaître, ce qui fait que des endroits aussi différents que Perrigny et Ahuy sont traités de la même manière. Déjà cela est anormal. Chaque commune doit conserver son caractère. Cette volonté d’uniformisation représente le premier défaut. Le deuxième, c’est le béton ! Je ne veux pas des Lentillères ou des Maraîchers à Talant. L’urbanisation massive que l’on voit actuellement ira deux fois plus vite ».

DLH : La dimension transport, intégrée dans ce PLUI, l’Habitat ayant été associé au Déplacement, ne trouve pas non plus votre aval ?

G. M. : « Ce PLUI Habitat Déplacement est hallucinant. Et quelle est l’information principale en matière de déplacement ? Le tram ne sera pas agrandi. On commence par annoncer rien du tout sur l’équipement qualifié dans le même temps comme le plus structurant. On veut du développement, on veut attirer du monde mais on ne prévoit pas les moyens ni de leur déplacement ni de leur installation. C’est incompréhensible… »

DLH : La métropolisation semble tout de même, actuellement, le paradigme, et pas seulement ici…

G. M. : « Ici, la disparition des communes ne les dérangerait pas plus que cela. C’est le résultat aussi des 10 dernières années de rabaissement des communes, de ce que j’appelle le maire bashing. Cependant, c’est en train de tourner. Globalement, et pas seulement dans la métropole, l’ambiance générale change. L’on se rend compte que la proximité des mairies, des maires manque aux citoyens et qu’il serait bon de relancer la mécanique. Quant aux économies liées à la mutualisation, elles n’ont pas été au rendez-vous : cela coûte de plus en plus cher pour des travaux qui sont de moins en moins réalisés. C’est l’effet balancier et la prise de conscience de l’efficience des communes semble en bénéficier actuellement. Le sénateur de La République en Marche, François Patriat, le dit ainsi très bien : On a fait de fausses métropoles qui pompent leur territoire, il n’y a que quelques vraies métropoles qui irriguent leur territoire, les autres les appauvrissent. Voilà ce qu’a fort justement déclaré l’ancien président de la région à Ahuy le 15 février. C’est limpide ! »

DLH : A la façon dont vous défendez les couleurs de votre commune, la question suivante s’impose : êtes-vous à nouveau candidat aux prochaines élections municipales ?

G. M. : « C’est un sujet sur lequel il faut réfléchir. Ma décision n’est pas définitivement prise. Cela dépend de la façon dont les choses vont évoluer politiquement. Il y a évidemment le paysage national et la déclinaison des options qui sera faite localement dans une bonne entente Les Républicains et En Marche. Nous ne sommes pas obligés d’adopter le drapeau d’un autre ou de se rentrer dedans non plus. A Talant, nous avons l’habitude que cela se passe bien puisque vous avez des Républicains avec un panel ouvert jusqu’au Modem. Et il existe toujours des gens qui sont sans étiquette, qui sont ici pour rendre service. Je ne leur ai jamais mis la moindre pression pour qu’ils prennent une carte. Nous n’avons jamais fermé les portes à Talant, aussi comment pourrions-nous avoir des difficultés pour les ouvrir ? ».

DLH : J’imagine enfin que vous regardez avec une attention particulière ce qui se passe à droite à Dijon en vue des municipales…

G. M. : « Si l’on veut gagner, l’on ne peut pas y aller en ordre dispersé. C’est la défaite assurée. Et il est fondamental que Dijon change de cap. Car, comme le dit François Rebsamen, la couleur politique de la métropole ne se pose pas puisque Dijon est de gauche ! Aussi, si l’on veut mettre en œuvre un changement quelconque dans la métropole, cela commence par Dijon. Et je suis plutôt optimiste. L’idée qu’il faut que l’on s’entende, que l’on travaille ensemble n’est certes pas encore aboutie mais elle est mieux partie que ce que l’on pouvait craindre ».

Propos recueillis par Camille Gablo