Chopine Dijon : L’heure de vérité

 

La clientèle de « Chez Gérard » ne donne pas dans le Petit Livre Rouge des Verts, à deux exceptions près : le jardinier du quartier et Edouard, notre Bonobo de député à l’Assemblée Nationale des Oasis. Inutile de dire que c’est la franche rigolade parmi les piliers du bar, ce matin-là, à l’annonce de la garde à vue de l’ancien secrétaire d’Etat écologiste Jean-Vincent Placé, en raison d’un état d’ivresse avancé.

Antoine, l’irréductible de la brocante est de retour d’un énième vide-grenier. Le voilà lancé dans un speech, « épaulé » par son panaché de 10 heures du mat’ : « Tiens, ça me fait penser au fameux sketch de Bourville. Sûr que Placé a eu la trouille de boire de l’eau sous couvert qu’elle pourrait être ferrugineuse. » Bruno et Jean, nos Insoumis de service, galvanisés de surcroit par le Big Bazar à la SNCF : « Ah ! Nous aussi, on a eu notre tranche de rigolade, mais grâce à une autre écolo : Cécile Duflot, qui confie au quotidien Le Monde : « Je quitte la politique avec beaucoup de sérénité ». Ben, figurez-vous que nous, les Mélenchon, on est ravi de la voir se barrer. La voilà propulsée en juin prochain à la tête d’Oxfam France ! Franchement, le pantouflage a encore de bien beaux jours dans la caste privilégiée des nos ex-politiques… » Edouard – jamais aussi terre-à-terre que les bipèdes du troquet – chasse d’une chiquenaude ces brèves de comptoir : « Vous feriez mieux de vous pencher sur ce qui a fait l’actualité il y a peu, et dont on se demande si vos consciences en ont tiré une leçon : une fois retombée l’émotion collective suscitée par les morts du colonel Beltrame et de Murielle Knoll, que-reste-t-il ? Vous revoilà retournés à votre train-train quotidien. Et je parie même qu’il ne vous est pas venu à l’esprit de vous interroger sur ce fait troublant : plus de trente mille Dijonnais ont défilé pour manifester en ville après l’attentat de Charlie Hebdo, alors que c’est à peine s’il y a eu 150 personnes  pour se recueillir Place de la République en mémoire de Murielle Knoll, cette vieille dame juive victime d’un crime antisémite.»

Silence total. Déni de la réalité. Les Juifs sont des Français à part entière. Alors, à quand une réconciliation de toute la France avec elle-même ?  Partout les déserts de la pensée gagnent du terrain…

Marie-France Poirier