Dijon sous la neige. Huit heures du mat’. Eléonore, la femme de Gérard est furieuse : les chasse-neige sont passés dans Dijon, mais le sol gelé a en partie rendu caduque leur action. Bref, ce vendredi, elle a dû sortir le paillasson et mettre des serpillères sur le sol du troquet. C’est la gadoue-la gadoue tout partout. Elle râle, engueule son bonhomme : »T’es trop con, Gérard, pourquoi-ke-t’as ouvert ? »
Antoine, retour d’un vide-grenier de Fontaine-lès-Dijon : « On peut à peine circuler. J’ai mis 50 minutes pour arriver ici. Ca m’étonnerait qu’on aperçoive notre Bonobo d’Edouard aujourd’hui. Entre les lustres de l’Assemblée nationale des Oasis et la chaleur sous sa canopée, l’a pas l’habitude du froid. »
Quand on crie au loup … Bref, Edouard et son attaché parlementaire surgissent, avec de grosses moufles tricotés en fibres de palmier. Suivis de Bruno et Jean, plus Insoumis que jamais, et fort en colère contre « les services de voierie, dont on se demande à quoi réfléchit leur hiérarchie ! On a mis une heure en voiture pour venir de Varois. ’’
Edouard qui a une oreille au Grand Dijon : « Vous n’y êtes pas du tout. Tout a été mis en œuvre. Cependant, on ne dicte pas sa feuille de route à la météo. Avez-vous au moins songé à partir plus tôt ? Allez-vous longtemps vous targuer de vos scores d’escargots ? » Sur ce, Arnaud fait son entrée, lui aussi mal embouché : « Non, mais où va-t-on ? Je pars au Relais H de la Gare chercher Le Monde et Les Echos. Je comptais sur le tram… Je t’en fiche : j’ai attendu en battant la semelle et j’ai dû marcher, en baskets. Oui, marcher ! C’est un scandale. Excuse-moi, Edouard, la France régresse ; et on n’est pas loin de remonter aux temps préhistoriques, quand une feuille de cigarette ne nous séparait pas des chimpanzés… »
L’allusion blesse fortement Edouard dont le QI dépasse de loin la moyenne des homos sapiens : « Je rentre de mission en Alaska. Et figurez-vous que mes copains Inuit et Québécois me disent : « Dis-donc, Edouard. On va te passer en replay un reportage de BFM TV. Le journaliste fait le point-météo sur un de vos bleds français : Montpellier ou Lyon, on ne sait plus… Vos citadins qui s’emmêlent les sabots ou les pneus dans 4 cm de neige n’avaient rien à envier à nos patauds de Manchots. C’était d’un drôle ! Vous devriez nous envoyer ces yétis des villes repeupler la banquise et réhabiliter nos igloos.»
Marie-France Poirier