Jet d’Encre N°101 : Morfal l’Irlandais

 

Notre chronique judiciaire te livre aujourd’hui, cher lecteur, une singulière affaire dans le strict respect des deux piliers de notre justice : la présomption d’innocence et le secret de l’instruction. Je te laisse seul juge de ce que tu vas découvrir.

De source proche de l’enquête, notre accusé potentiel, Morfal l’Irlandais serait né à Galway, d’un père peinard et d’une mère porteuse. Sa vraie mère ne lui a pas donné naissance, car on sait aujourd’hui qu’elle n’avait qu’un ovaire, ce que confirme son gynécologue de l’époque dans son livre intitulé « Mes chères Patientes ».

Morfal a connu une enfance difficile et la grande famine lui a laissé quelques séquelles avec un ulcère perforant dans la partie supérieure droite de l’estomac. C’est cette pathologie qui a causé son aigreur envers la société et qui l’a poussé à assassiner sa compagne Maria, une chanteuse d’opéra descendant de la famille Calas, jadis défendue par Voltaire. Le couple connaissait depuis quelques temps des crises de plus en plus fréquentes qu’on ne peut considérer comme des adminicules : dispute le 25 novembre sur le parking de Super U parce que Maria avait oublié le jeton blanc en plastique destiné au caddie ; violente altercation le 2 décembre au domicile sous prétexte que Morfal, une fois de plus, n’aurait pas tiré la chasse d’eau ; échangisme de gifles au cours d’une soirée chaude avec d’autres couples le 3 décembre ; absence des époux au domicile entre 22 h et 22 h 05 le 15 décembre confirmée par un ticket de péage, par les caméras de surveillance où l’on reconnaît formellement les chaussettes Dim de Morfal et par des préliminaires révélés quasiment inexistants par l’autopsie, lors du dernier orgasme de Maria. Sur ce dernier point chacun sait que Morfal a fait ses études dans une Zone à Éjaculation Précoce…

Nos quatre experts BFN, un ancien vigile, un commissaire priseur, un guérisseur et un philosophe islamiste, ont expliqué longuement aux télé-jurés au cours de notre troisième édition spéciale, le pourquoi du rebondissement dans cette affaire : Maria, qui ne portait jamais de gilet, n’a pas été tuée par balles, mais son cœur a été transpercé par une flèche le 14 février. Aucun doute possible pour nos spécialistes : la blessure ne correspond pas à un trou de balle. Les relevés de traces d’ADN sont formels : il ne s’agissait pas d’un faux-jeton de Super U, mais bien de celui qui manquait au porte-clefs de Morfal.

On a donc du mal à comprendre que Morfal, malgré les preuves accablantes que nos experts ont pu livrer aux enquêteurs, malgré les longues explications fournies par les avocats des deux parties, malgré les multiples témoignages venant de sources proches de l’enquête, reste muré dans son silence d’autant qu’il avait été vu par deux témoins lors de son mariage avec la Calas.

Alceste