Mardi d’automne. Rue du Nuits-Saint-Georges aux Bourroches. Une fois à l’arrêt du bus Pommard, place à l’étonnement : le quartier résonne de bruits d’atelier de réparation, de scie, de marteau, de meubles que l’on déplace. Voilà des décibels bien sympathiques, et quasi inhabituels à notre époque qui « loge » ses activités artisanales, industrielles à la périphérie des villes. A qui, à quoi doit-on la résurrection de ce concert de… musique sérielle ? Le passant trouve la réponse au n° 11 devant la boutique et l’atelier de transformation de « La Recyclade ».
Depuis septembre, cet endroit un peu excentré de Dijon – il avait connu un bel élan pavillonnaire dans les années 50/60 – connaît un second souffle. Rencontre avec Frédéric Ramette, ingénieur au chômage, à la source de cette belle initiative, ainsi qu’avec son équipe de bénévoles. Derrière le comptoir construit en bois de palette récupéré – toute une signification en soi – Frédéric Ramette accueille les clients. Oh, pardon ! Les adhérents. Ce quinquagénaire à l’esprit généreux s’en explique : « Nous nous inscrivons dans une démarche solidaire. Tous ceux qui se portent acquéreurs d’un meuble, d’un livre, de vaisselle ou de vêtements récupérés chez des particuliers, dans la rue, dans les poubelles adhèrent ainsi à l’éthique, à la philosophie du gaspillage « taux zéro » qui nous animent. Comment ? En payant un droit d’entrée fixé au gré de chacun. Cette liberté, nos prix modiques expliquent le nombre actuel de 300 adhérents. En un seul mois, avouez que c’est très encourageant. J’insiste sur un élément essentiel : non seulement, nous nettoyons, nous réparons, mais plusieurs de nos bénévoles font preuve d’une grande créativité : confection de tables basses en bois de palettes, chaises retapissées avec des étoffes recyclées, boucles d’oreilles réalisées avec des capsules de Nespresso, etc. Nous comptons bien sur le bouche-à-oreille, sur une distribution de prospectus dans les boîtes aux lettres pour nous faire connaître et parvenir à sensibiliser les gens au respect de l’environnement, soucieux également d’échapper à la surproduction industrielle ou au tout-jetable ».
La Recyclade s’appuie sur des partenaires : le Conseil départemental de Côte-d’Or, la Métropole de Dijon (notamment la déchèterie). Petits prix et grands plaisirs, c’est l’un des slogans-clefs de ce qui se veut une « SPA des objets, des meubles ou de l’habillement ». L’ingéniosité, l’astuce sont au rendez-vous pour imaginer des sacs à mains faits dans des jeans, des décorations de jardin ou de maison, des lustres, des armoires anciennes ou des bahuts totalement relookés. Même les CD retrouvent… figure humaine, transformés en tête de Mickey ou visages baroques. Le stock est tel, précise Frédéric Ramette, qu’il a fallu louer des garages à l’extérieur : « Nous avons un stock varié. Nous sommes sollicités par pas mal de personnes désireuses de se défaire de choses, dont elles n’ont plus l’usage. Et puis, c’est fou de voir ce qui est jeté ! Tant mieux, d’ailleurs ! Cela fait notre attractivité. Toutes les classes sociales viennent et reviennent à La Recyclade. Les jeunes au budget modeste peuvent équiper un appartement pour moins de 300 € ! »
La finalité de La Recyclade, c’est bien entendu de parvenir à terme à créer des emplois stables, rémunérés. Et à se faufiler sur la voie d’une économie parallèle viable, « anti-gaspi ». En un mot, à contre-courant des excès générés par une société de surproduction. Bref, la Recyclade résout l’équation suivante : un objet jeté dans la rue, dans une poubelle, mis au rebus dans un grenier ou une cave a toutes les chances d’y « être ré-enchanté ». Joli happy-end !
Marie-France Poirier
La Recyclade, 11 rue du Nuits Saint-Georges, 21000 Dijon. Tel. 06 31 60 86 56. Horaires : Mardi au vendredi de 13h30 à 18h30 ; samedi de 9 h à 18h30. Accès : T2, arrêt Bourroches et Bus (L14 et L15 arrêt Pommard. Larecyclade@laposte.net