Tomber, mais toujours se relever

À 68 ans, le Dijonnais Rhossetos Angeliniadis entretient le projet de commercialiser son side-car conçu pour personnes en situation de handicap. Lancé huit ans auparavant, ce projet audacieux et très honorable à la fois a nécessité des heures de réflexions. Être indépendant et libre lorsque l’on est paraplégique, c’est possible. La créativité et la détermination font toujours bon ménage… Rhossetos le prouve.

Certains bruits réveillent en nous notre besoin d’exister. Le moteur qui gronde, les pneus qui crissent, tous ces sons ont résonné à l’intérieur de Rhossetos. C’est lors d’une rencontre de motards à Dijon quand il avait 14 ans, qu’il a réalisé qu’il était destiné à faire de la moto. Son besoin de liberté, de puissance et de rapidité s’est renforcé au vu de ces motos qui rugissaient. C’est ainsi qu’est née cette passion. Sa première compétition date des années 70. Il s’agissait d’une course à l’américaine pendant huit heures avec deux pilotes. Résultat de la course : il repart avec onzième avec les meilleurs classements nationaux. Il évoque aussi la fois où il a remporté son premier titre de champion de France en 1977 : « Je courrais après, c’était mon rêve » dit-il avec la sensation de revivre cet instant.

Il dédie sa passion à une boutique qu’il décide d’appeler Angel’s moto. Il en est très fier. En effet, c’est un commerce qui vit depuis plus d’une quarantaine d’années. La passion en latin est synonyme de « souffrance ». Bien que ce terme philosophique prenne aujourd’hui une autre tournure, désignant ainsi l’attirance envers un loisir par exemple. La passion a bel et bien été une souffrance pour Rhossetos. Un jour de mai 1999, il a subi un grave accident qui lui a privé l’usage de ses jambes. Ne pouvant poursuivre sa raison d’exister et ayant cesser de nourrir tout espoir après ce tragique accident, l’ex-champion de France de moto réalise que l’aventure ne doit pas se terminer ainsi.

Des objectifs plein la tête

L’espoir renaît de ses cendres… Après avoir assisté à une course pour handicapés, Rhossetos se dit que la vie continue malgré tout. Il entreprend alors l’idée de participer au « Lengends cars cup ». Ce sont des voitures avec un look plutôt original : grosses roues, taille réduite. Rhossetos, obstiné, ne s’arrête jamais. Avec une créativité sans faille, il se jette à l’eau. Il imagine un véhicule sur-mesure avec un système de conduite adapté pour effectuer des courses en Lengends Cars.

C’est également cette même envie de montrer qu’un paraplégique peut conduire malgré son handicap, qu’il se lance alors dans un travail de longue haleine. Un side-car adapté à sa situation. C’est la volonté de se débrouiller seul, sans l’aide de personne et en toute indépendance qui l’a incité à penser cet engin.

Avant de concevoir ce véhicule, sa seule préoccupation était de savoir s’il aurait suffisamment d’argent pour le faire aboutir. Motivé, déterminé, il sait ce qu’il veut et est prêt à tout donner pour se rapprocher des sensations qu’il vivait durant ses courses. La liberté, la rapidité seront bien présentes. En revanche, la conduite reste inenvisageable car le projet n’est pas encore commercialisé.

« Si j’habitais en Hollande ou en Amérique, j’aurais pu l’immatriculer. Mais en France, c’est loin d’être le cas. »

Ce projet de taille relève également d’un manque d’adaptabilité dans le secteur automobile pour les handicapés. C’est ce que veut souligner Rhossetos. En effet, lorsque l’on est handicapé, il faut réfléchir à un ensemble d’aménagements supplémentaires : un siège, une voiture, un aménagement intérieur sur-mesure. En clair, de grandes sommes d’argent pour pouvoir vivre une vie normale, comme tout le monde. « Si on compte le prix de mon siège qui est de 5 000 € et le prix d’une voiture qui tourne autour des 20 000 €, on se rend compte que rien n’est adapté pour nous. Les prix sont exorbitants et on ne reçoit aucune aide, on doit se débrouiller avec ce qu’on a. Tout le monde a ses soucis, il faut continuer d’avancer malgré tout ».

Quant à la boutique de Rhossetos, elle subit le même traitement que les autres magasins durant le confinement. Aucune rentrée d’argent pour le moment. Comment envisage-t-il le déconfinement ? En restant très prudent et en prenant en compte les gestes barrières. « Tout le monde a ses soucis, il faut continuer d’avancer malgré tout ».

Alice Capezza