Spécial Collectivités : Tille et Norge, l’exemple d’une fusion réussie

 

Dijon l’Hebdo : « La loi Notre a provoqué un bouleversement pour les quelque 36 000 communes françaises. Si, depuis 2010, elles étaient obligées d’adhérer à un groupement de communes, la loi de 2015 a fixé le seuil minimal des intercommunalités à 15 000 habitants contre 5 000 auparavant. Ce qui a provoqué une accélération des regroupements. Quel premier bilan tirez-vous de la mise en place de la communauté de communes Norge et Tille depuis le 1er janvier de cette année ? »
Ludovic Rochette :
« Il faut savoir que les regroupements se sont opérés sur des critères qui étaient uniquement démographiques. Les grandes difficultés, dans les fusions, ce ne sont pas les hommes et les femmes, ce ne sont pas les objectifs, ce sont les disparités de compétences. Ici, la fusion a été bien préparée en amont entre deux territoires qui se connaissent. Par conséquent, le travail de 2016 s’est appuyé sur un diagnostic très lourd. Celui de 2017 a vu la mise en place de simulations et d’un premier volet de décisions. Le regret, c’est qu’il est extrêmement compliqué, dans la gestion d’une fusion, de lancer des investissements, sources d’enjeux et de développements économiques. Car les entreprises attendent nos commandes. »

 

DLH : Comment avez-vous géré les équilibres et les sensibilités entre deux territoires qui se sont vus contraints de fusionner ?

L. R : « Le rôle d’un président, c’est d’être fédérateur, de mettre du liant. Une tâche facilitée par Patrice Chiffolot, le président de Plaine et Tille avec lequel on s’est très vite mis d’accord sur les fonctions de chacun. Pour ce qui le concerne, en tant que vice-président, il dispose de toutes les délégations et on a choisi, au sein de l’exécutif, un système paritaire entre les deux anciens territoires sans qu’il y ait une quelconque crispation. De la même manière, toutes les commissions sont co-présidées par deux élus issus des deux anciens territoires. »

 

DLH : La loi délègue obligatoirement aux intercommunalités de nouvelles compétences. Quels seront vos choix en la matière ?
L. R :
« Il y a des compétences que l’on est obligé d’assumer comme le développement économique, les Gens du voyage, la gestion des milieux aquatiques, les ordures ménagères… et il y a des compétences optionnelles. Le but, c’est de les intégrer pour être encore plus efficace mais aussi pour arriver à un niveau de dotations incitatif. Ce qu’on appelle la DGF bonifiée. D’ici la fin de l’année, on devrait se doter des compétences suivantes : politique de ville, liée essentiellement à la prévention de la délinquance, le logement étudiant, la voirie communautaire, les équipements sportifs au-delà d’une certaine surface et les maisons de service public. Nous arriverons ainsi à 9 compétences que nous assumerons sur une liste de 12. Nous envisageons, dès l’année prochaine, de nous doter de la compétence eau qui nécessitera la fusion de syndicats. Mais quand on s’appelle Norge et Tille, ça relève de l’évidence.

 

DLH : Une hausse de la fiscalité issue de la fusion et de la prise en charge de ces nouvelles compétences est-elle inévitable ?

L. R : « Pour notre territoire, c’est évitable grâce à notre espace péri-urbain qui se développe avec de nouveaux habitants et de nouvelles entreprises qui nous permettront de gérer au mieux notre fiscalité.

 

Vous le précisez, la Communauté de Communes Norge et Tille est un territoire qui accueille de nouvelles populations actives. Comment les équipements publics s’adaptent-ils à cette évolution démographique dynamique ?

L. R : « Il faut distinguer les établissements publics et les établissements au public. Nous avons deux types de générations qui viennent s’installer chez nous : les familles, plutôt trentenaires, qui vont bénéficier d’infrastructures tournées vers la petite enfance, et des couples à la retraite, qui ne sont pas en perte d’autonomie mais qui s’inquiètent légitimement, qui vont se tourner vers des villages seniors qui se développent sur nos territoires. Il faut évoquer aussi les équipements commerciaux qui ne font pas défaut que ce soit à Arc-sur-Tille ou Saint-Julien. »

« La base nautique d’Arc-sur-Tille, une véritable pépite qui a une forte potentialité de développement touristique. »

DLH : N’avez-vous pas été tentés de rejoindre la Métropole dijonnaise, si proche de vous ?

L. R : « Nous avons fait un choix mais on ne tourne surtout pas le dos à la Métropole parce qu’on travaille déjà avec elle au sein du SCOT, le schéma de cohérence territorial. Nous sommes à ses côtés et il serait complètement irresponsable de l’ignorer. »

 

DLH : Vous misez sur le développement économique. La proximité de Dijon, capitale régionale, n’est-elle pas un frein ?

L. R : « Bien au contraire. En terme de zone d’activités, on offre des aménagements qui sont différents, souvent moins vastes, mais complémentaires. On a une Métropole qui bénéficie d’une belle accessibilité, d’une belle image aux niveau national et européen et on a tout intérêt d’être à ses côtés pour en profiter. Et si nous profitons de la Métropole, la Métropole profite aussi de nous. Nous sommes l’espace « vert et bleu » avec nos chemins de randonnées, nos lacs, la base nautique d’Arc-sur-Tille dont la fréquentation repose à 90 % sur la population de la Métropole. »

 

DLH : Tourisme et patrimoine sont donc deux atouts importants pour la communauté de communes Norge et Tille ?

L.R : « Pour nous, il est important de montrer que l’on n’est pas dans un espace artificiel. On pourrait penser qu’on a une population qui vient dormir dans nos villages et qui va travailler à Dijon. La réalité est bien plus complexe. Notre espace a une véritable identité forgée par notre patrimoine bâti et naturel. Nous avons, avec la base nautique d’Arc-sur-Tille, une véritable pépite qui a une forte potentialité de développement touristique. »

 

DLH : Derrière les grands dossiers, il y a aussi, plus simplement, la gestion du quotidien. La collecte du verre, par exemple, qui fait débat. Quelles solutions efficaces pensez-vous mettre en place pour satisfaire le plus grand nombre d’administrés ?

L. R : « L’exemple de ce débat montre la sérénité de notre nouvelle entité face aux questions qui se posent. Nous avons l’héritage de deux systèmes différents. Le porte à porte pour le Val de Norge et l’apport volontaire pour Plaine et Tille. Aujourd’hui, on étudie la manière d’uniformiser ce système à l’échéance 2020. Se posent aussi d’autres questions : la gestion des restaurants scolaires, la base nautique, l’école de musique. Nous les traiterons dans un cadre serein et professionnel.

 

DLH : Afin de résoudre une équation budgétaire très délicate pour l’année 2018, le gouvernement va de nouveau compter sur un « effort » des collectivités locales. Dans quels secteurs pourrait porter cet effort ?

L. R : « Les efforts que nous allons faire sont déjà conséquents. Les communes qui vont devoir financer, par le biais de la communauté de communes, le système d’instruction des autorisations d’urbanisme, en est une illustration. La communauté de communes qui prend en charge, de manière volontaire, de nouvelles compétences, c’est aussi un bel effort. Tous nos contrats de prestations ont été revus. Je pense sincèrement que nous avons tout étudié en matière d’efforts et je ne vois pas où on pourrait faire mieux ».