Le 25 février au Cèdre à 19 heures, le maire de Chenôve a présenté les 3 projets retenus dans le cadre du concours d’idées pour les futurs Vergers du Sud, cet éco-quartier qui verra le jour en lieu et place de l’ancien site de maintenance Divia. Thierry Falconnet nous explique sa conception de la nouvelle urbanité de l’entrée Sud de la future Métropole. Interview d’un maire qui veut bâtir sa ville en concertation avec ses habitants…
Dijon l’Hebdo : Le dossier des anciens entrepôts Divia s’apparentait à une véritable arlésienne, tellement les contraintes urbanistiques semblaient lourdes. Assiste-ton réellement aujourd’hui aux prémices de la sortie de ce dossier ?
Thierry Falconnet : « L’Arlésienne, c’est quelque chose dont on parle toujours, et qui ne vient jamais. Donc non, le dossier Les Vergers du Sud est lancé. D’abord, on ne parle plus, vous l’avez remarqué de site ex-Divia mais des Vergers du Sud, donc cela veut dire qu’il y a une identité de ce quartier qui a été réfléchie. Les Vergers parce que nous sommes dans la zone qui était, au début du siècle, dévolue, à la culture des petits fruits, en lien avec l’activité vinicole. Le Sud, car c’est l’entrée Sud de Chenôve, de l’agglomération et donc de la future Métropole. L’identité visuelle est en cours d’élaboration, parce que, très clairement, elle va servir le projet jusqu’à sa finalisation, c’est à dire, jusqu’à ce que les derniers logements soient livrés. Il y a effectivement des contraintes et elles ont été intégrées dans le cahier des charges du concours d’idées. Je rappelle ces contraintes : la ligne à haute tension – une ligne de desserte – était trop chère à enterrer (entre 4 et 11 M€) ; les bâtiments Divia qui ont été réhabilités par le Grand Dijon, notamment pour accueillir des associations culturelles. Dans le concours d’idées, le maintien des ces bâtiments a été intégré. Cela ne veut pas dire qu’ils ne seront pas retraités de manière visuelle et urbanistique, dans un futur proche. Donc les contraintes, on les connaissait. Cependant, il était important qu’on aboutisse à un accord satisfaisant pour la Communauté urbaine, qui est propriétaire du tènement et la Ville de Chenôve à Chenôve qui possède peu de réserves foncières mais qui a besoin de reconstituer du logement et de se relancer en dynamique. Les derniers chiffres de l’INSEE montrent que nous sommes dans la bonne voie : certes l’augmentation de population est encore un frémissement (plus 54 habitants) mais la perte de population est aujourd’hui enraillée. C’est en grande partie le fait d’un renouveau et d’une amélioration sensible des relations entre la Communauté Urbaine et la Ville de Chenôve, et je peux le dire, entre le maire de Chenôve et le président du Grand Dijon ».
Dijon l’Hebdo : Vous avez ainsi à votre façon imaginer aujourd’hui l’habitat de demain…
T. F. : « Ce projet, il doit s’inscrire résolument dans le présent de Chenôve et de l’agglomération, mais aussi, et cela correspond au titre de votre dossier sur l’habitat, permettre d’imaginer la ville de demain. C’est à dire qu’en tant que maire, on ne doit pas oublier que les projets d’aujourd’hui sont en vie pendant plusieurs dizaines d’années. Donc, c’est bien à la fois une nécessité actuelle de créer un éco-quartier à cet endroit-là, mais c’est aussi une nécessité d’avoir une vision prospective et une vision d’avenir sur ce que sera le quartier et la ville de demain ».
Dijon l’Hebdo : Améliorer la qualité de vie, promouvoir, par ce projet, le Vivre ensemble, mais aussi favoriser l’attractivité de Chenôve, tel est le triptyque qui vous a conduit à retenir ces 3 projets ?
T. F. : « Je suis très critique avec la formule du Vivre Ensemble. Je préfère parler de nouvelle urbanité. L’urbanité, c’est d’abord le fait de la ville de par sa racine étymologique, c’est aussi la manière de vivre en ville et c’est enfin tout le faisceau de relations qui existent entre les habitants et le fait urbain lui même. Les maîtres mots, ils sont ceux aussi de mon équipe municipale, c’est à dire la qualité et le cadre de vie. Il ne faut pas réitérer les erreurs qui ont été commises dans les années 50-60. Il ne s’agit pas de recréer un grand ensemble sur les Vergers du Sud mais d’être dans une densité de population, à la fois rentable pour les promoteurs et pour les aménageurs qui s’y installeront, mais aussi tout à fait vivable pour les habitants. Ensuite, ce sera un quartier de mixité sociale selon une répartition qui reste encore à déterminer. J’aime bien l’idée de la parité, 50% d’accession et 50% de logements locatifs. Je pense que la mixité, la diversité, c’est ce qui fait la richesse d’un quartier et d’une ville. Troisième axe très important, c’est le développement durable. Ce quartier doit être exemplaire en matière de protection de l’environnement, d’économie et d’utilisation d’énergie, de déplacements. Je serais assez favorable à un quartier sans voitures, avec des espaces de stationnement en bordure, tout en favorisant à l’intérieur des déplacements doux : le vélo, la marche, éventuellement des voiturettes électriques. Cela doit être un espace urbain où l’on respire, où l’on se rencontre… Et n’oublions pas que ce projet des Vergers de Sud est immédiatement à côté de l’éco-quartier de l’Arsenal et du stade Léo-Lagrange et de ses 9 hectares, un véritable poumon vert à Chenôve. On pourrait imaginer une forme de coulée verte au au Sud de l’agglomération ».
Dijon l’Hebdo : Le projet du cabinet CALC, avec les télécabines et la tour totem, fait en tout cas rêver. N’est-on pas dans une utopie urbaine ?
T. F. : « Est-ce qu’on a le droit de rêver un peu ? Vous faites référence à ce projet porté par le Cabinet CALC, mais nous avons aussi 2 autres projets qui vont dans des directions différentes. Le 1er est plutôt un projet classique qui déjà pourrait préfigurer ce que physiquement cet éco-quartier pourrait être, très ancré dans les réalités urbaines actuelles. On a un autre projet qui propose une méthode, à laquelle nous tenons particulièrement à Chenôve depuis le 21 septembre 2015. A savoir la concertation. Je voudrais que ce quartier soit construit avec les habitants, non seulement avec ceux des Vergers du Sud, mais aussi avec tous ceux de Chenôve. Il faudra qu’on réfléchisse à cet éco-quartier en termes de continuité urbaine avec ce qui est déjà existant et là où les gens vivent déjà. C’est la raison pour laquelle nous allons associer les habitants à chacune des étapes de la construction de ce quartier. Par le biais de la réunion publique du 25 janvier au Cèdre, d’une exposition à la Maison du Projet, d’une boîte à idées où les habitants pourront déposer leurs remarques, leurs propositions. Nous allons aussi installer 2 bornes numériques connectées : l’une à la Maison du Projet et l’autre à la Maison commune. Ils pourront aussi apporter leur pierre à l’édifice sur les réseaux sociaux. Les conseillers citoyens et participatifs de Chenôve pourront participer à la réflexion. Ce sera un projet fédérateur pour tous les habitants ! »
Dijon l’Hebdo : Les télécabines, proposées dans l’un des projets, seront, c’est certain, particulièrement commentées…
T. F. : « Ce sera peut-être un téléphérique urbain, mais ce sera peut-être le prolongement du tram. Pourquoi le téléphérique ? Parce que c’est l’idée de la liaison entre l’existant, le nouveau quartier des Vergers du Sud et l’ambition touristique de Chenôve. Depuis l’arrêt Carraz qui marque la frontière intangible entre Dijon et Chenôve, les télécabines fileraient sur le plateau et surplomberaient le bourg viticole de Chenôve. Les habitants, les touristes pourraient le prendre et, à son terminus, aller se promener sur le plateau. Ils pourraient descendre déguster aux Pressoirs une bonne bouteille de Marsannay, etc. Ce périple pourrait commencer depuis la Cité internationale de la Gastronomie et du Vin au cœur des Climats de Bourgogne. A ce stade, l’idée est de ne pas brider l’imagination collective avec des questions budgétaires qui seront de toute manière déterminantes dans le choix du projet et dans son phasage. C’est un projet à l’horizon 10 ans pour un quartier qui vivra pendant 50 ans. Nous sommes vraiment sur une vision prospective de l’avenir de Chenôve ».
Dijon l’Hebdo : Que répondez-vous à ceux qui pourraient estimer que vous voyez trop grand ?
T. F. : « Pourquoi les habitants de Chenôve n’auraient pas droit à cette audace, à cette créativité urbaine, au développement durable, à une image de marque dont tout le monde pourrait retirer de la fierté ! Pourquoi un téléphérique, qui existe à Grenoble par exemple, serait délirant pour Chenôve ! Certes, nous n’avons pas à concurrencer Montjuïc à Barcelone mais l’idée de liaison est séduisante. Et, j’aime aussi beaucoup l’idée du totem, aux dernières normes énergétiques, à la façade végétalisée… cette tour aux multiples usages : stationnement, logement, bureau mais elle pourrait être aussi la station du téléphérique ou bien du futur prolongement du tram. Ce totem pourrait être la marque d’identification dans l’entrée de Chenôve et de l’agglomération. C’est un projet enthousiasmant ! »
Dijon l’Hebdo : Ce projet ne montre-il pas aussi la relation gagnant-gagnant entre Chenôve et la communauté urbaine ?
T. F. : « Il existe deux manières d’aborder la relation de Chenôve à la Communauté urbaine future Métropole. La première, ce serait d’en avoir peur à l’instar de certaines forces politiques qui rejettent l’Europe car elle fait peur. Je pense qu’il faut, au contraire, que nous soyons dans une confiance réciproque, dans une relation de réciprocité, de gagnant-gagnant. Chenôve a tout à gagner à participer activement à la réflexion sur la métropole. J’en veux pour preuve le Projet de Territoire, auquel le maire de Chenôve, 2e vice-président de la Communauté urbaine a contribué, à sa juste mesure, à l’élaboration. Chenôve jouera toute sa place dans la future Métropole et celle-ci a tout intérêt d’avoir un Pôle sud dynamique dont Chenôve est le chef de file.
Propos recueillis par Xavier Grizot