Voilà le genre d’adresse qui ne paye pas de mine, discrètement nichée au fond d’une rue Berbisey qui en a vu d’autres, à boire et à manger. N’est-on pas dans l’un des quartiers dijonnais qui abrite des dizaines de tables en enfilades, pour tous les goûts, tous les coûts et tous les coups, de cœur et de bambou ? Eh bien affirmons le d’emblée : l’Âge de raisin fait mieux que tirer son épingle (ou sa fourchette) du jeu, dans son style bistrot traditionnel à ambiance, pas salsa mais plutôt accordéon et jazz. La façade est traditionnelle, et on découvre une tout petite salle nichée derrière des rideaux à gros carreaux rouge. Il y a même un caveau, pour les groupes, et une jolie terrasse, pour quand les beaux jours sont revenus (ce qui est le cas).
On découvre surtout, dès qu’on s’est fait une place sur la banquette, une carte simple et appétissante, sur une base bourguignonne et traditionnelle, servie par un couple se répartissant bien les rôles, salle et cuisine, bar, conseils et service. Madame, peu visible (mais pour la bonne cause) officie aux fourneaux, Monsieur, la casquette rivée sur la tête, tient le bar (enfin, je m’entends, je ne sous-entends pas que le bar le tient !). Duo gagnant, assurant devant et derrière sur le solide et les liquides.
Du classique, du traditionnel disais-je. On peut déguster là planches de charcuteries et de fromages, le tout racé et origines certifiées, et puis tartes salées et sucrées, et des plats de Maman (ou de Mamie), pot au feu, bourguignon, blanquette de veau, petit salé…
Le patron a la passion des origines, c’est le roi de la traçabilité ! Ben c’est sûr qu’on n’est pas au rayon charcuterie industrielle d’un hyper hard discount, avec des produits indistincts transpirant sous cello. Et pour cause, il connaît le moindre producteur, le plus petit fournisseur, privilégiant les produits régionaux, les filières locales, le beau bio pas bobo. Une viande, une saucisse, un légume, un petit rouge régional, qui atterrissent dans votre assiette ou votre verre ? Il vient vous en raconter l’histoire, amoureusement, filières et généalogie ; et puis les modes de production, l’effet des saisons… A se demander s’il ne connaît pas le prénom du cochon !
On est rassuré : tous les produits sont frais, et travaillés sur place ; le menu (moins de 15 euros le midi) change tous les jours, au gré des envies et du marché. De l’entrée (quiches, salades…) aux plats de résistances et jusqu’aux desserts, le micro-ondable n’est pas prêt d’arriver sur votre table à l’Âge de raisin. Et les prix se tiennent, pas de coup de matraque en vue, mais un budget raisonné, comme l’agriculture privilégiée ici.
On peut s’attabler, surprise, devant un cocido, pot-au-feu espagnol au chorizo ; ou un petit salé à la belle saucisse et aux lentilles dûment estampillées. Les desserts se permettent des pas de côté, par rapport à la ligne traditionnelle et familiale, crème brûlée au thé fondante, avec sa tuile aux amandes et un marshmallow maison au citron. Pas une carte extensible en 4 langues donc, mais des produits choisis en amont, et choyés en cuisine.
Mais comme son nom le donne à comprendre, l’Âge de raisin, c’est aussi un bar à vin. La plupart les bouteilles proposées sont issues de l’agriculture biologique ou biodynamique. Et là encore, le patron vous en racontera, sur climat, sols et techniques traditionnelles.
Pendant que les clients se sustentent à bon escient, une joyeuse équipe d’habitués, au bar, refait le monde (dijonnais) verres en mains. Bref, une adresse conviviale, qui devrait se faire sa place et son trou (l’établissement a ouvert en 2011), grâce au côté authentique et bonne franquette, et à l’amour porté aux produits, qui le rendent bien au final.
L’Âge de Raisin, 67 rue Berbisey, 21 000 DIJON