Nous avons demandé à Pierre Pribetich, le « Monsieur Urbanisme » de la métropole, de commenter l’évolution des prix de l’immobilier sur Dijon. Le président de la SPLAAD (Société publique locale Aménagement de l’agglomération dijonnaise) explique quels leviers ont permis de rendre la capitale régionale plus attractive…
Dijon l’Hebdo : Comment analysez-vous les augmentations des prix de l’immobilier sur Dijon ?
Pierre Pribetich : « L’attractivité s’accélère. Plusieurs raisons concourent à ce phénomène. En premier lieu, Dijon tient pleinement son rôle de capitale régionale de la Bourgogne Franche-Comté et cet effet va se poursuivre parce qu’une grande partie de l’activité est en train de se concentrer sur la métropole dijonnaise. Ensuite, même si cela n’est pas mesurable facilement, nous sentons des délocalisations de Paris, notamment sur les professions qui ne nécessitent pas une présence absolue autour des berges de la Seine mais simplement de pouvoir rejoindre assez rapidement leur lieu de travail. Quelques affaires se sont ainsi traduites. Enfin, l’attractivité s’accélère avec une volonté accrue d’être sur Dijon. Ce cercle vertueux continue de s’amplifier et cela va se poursuivre. On constate ainsi un réel engouement sur les maisons individuelles. On le voit avec la durée très brève des annonces ».
DLH : Est-ce la raison pour laquelle vous avez innové avec des programmes tels que l’îlot vert Saint-John Perse ?
P. P.: « Les gens ne veulent plus aller à l’extérieur et souhaitent s’implanter à Dijon même. Nécessairement cela renforce le prix des maisons individuelles. François Rebsamen et moi-même, nous en avons tiré des enseignements avec plusieurs programmes d’accession à la propriété dédiés à des maisons individuelles. C’est en effet le cas de l’opération pilote intitulée Saint-John Perse, la Maison dans tous ses états, composée de 40 logements individuels qui sont livrés actuellement et qui permettent d’illustrer cette capacité d’habiter en ville en maisons individuelles dans un cadre environnemental privilégié. Je pourrais aussi citer un autre programme appelé Les Belles House qui est en cours d’élaboration. Sur le quartier Arsenal, celui-ci portera sur 140 maisons logements individuels afin de répondre à cette forte demande. Ce programme permettra d’avoir une diversité de produits sur Arsenal, puisque nous aurons, dans ce quartier, des logements dans des immeubles mais aussi des maisons individuelles ».
DLH : Le baromètre immobilier de la Chambre des notaires de Côte-d’Or montre que les prix des appartements et des maisons est en hausse sur la capitale régionale. Comment faire pour que tout un chacun puisse trouver un logement dans les meilleures conditions ?
P. P : « L’ancien monte, le nouveau aussi. Pour éviter d’avoir un emballement, cela nécessite de continuer à produire pour réguler l’offre mais c’est vrai que le foncier commence à se réduire. Les opportunités deviennent de plus en plus complexes afin de mener à bien des opérations. La Ville, la SPLAAD font en sorte de ne pas rentrer dans ce cycle infernal d’augmentation des prix de manière à pouvoir produire des logements accessibles. Je rappelle que c’est l’un des axes majeurs du PLUI-HD (Plan local de l’urbanisme intercommunal-habitat déplacement) avec la volonté de faire 25% d’accession abordable ».
DLH : Avec vos nombreux programmes de logements depuis 2001, vous avez œuvré pour que la population dijonnaise ne cesse d’augmenter. Est-ce la condition sine qua non d’une ville attractive ?
P. P : « Je pense que nous dépasserons assez rapidement la barre des 160 000 habitants puisque nous avons beaucoup de programmes qui devraient être livrés cette année sauf s’il y a une reprise importante de la pandémie. Nous avons tenté de produire en quantité, en qualité et surtout en diversité, de manière à essayer d’accroître le nombre de logements à loyer modéré. Nous sommes quasiment aux 20% imposés par la loi et nous avons rattrapé le retard dans le domaine. Il faut continuer de produire du logement écologique, de qualité, permettant d’offrir à nos concitoyens, quel que soit le quartier de Dijon ou de la métropole, une véritable diversité de produits : depuis le locatif à loyer modéré à l’accession libre, en passant par l’accession abordable. Le PLUI-HD est un outil de création de cette mixité puisqu’il impose d’une manière générale d’avoir 25% de logements à loyer modéré, 25 % d’accession abordable et 50% d’accession libre. Avec les 15 000 logements qui devraient être construits dans les 10 ans à venir, nous aurons une offre qui s’étoffera ».
DLH : Vous avez évoqué le volet construction mais la rénovation et l’éco-réhabilitation de logements sont aussi essentielle, notamment pour la transition énergétique. Le projet RESPONSE qui ne concerne pas moins de 377 logements dans le quartier de la Fontaine d’Ouche représente-t-il votre vitrine dans le domaine ?
P. P : « C’est un projet européen qui s’inscrit dans notre volonté d’être capitale verte européenne. Il va transformer la Fontaine d’Ouche, l’accompagner dans sa mutation écologique de manière à pouvoir isoler des bâtiments, générer de l’énergie… C’est en effet un projet global pour enclencher la révolution écologique sur l’ensemble du territoire métropolitain ».
DLH : L’attractivité des métropoles passe aussi par la qualité et la diversité de l’enseignement supérieur dispensé. Qu’en est-il du nombre d’étudiants dans la capitale régionale ?
P. P : « La métropole de Dijon comptait en 2012 32 465 étudiants. En 2018, leur nombre atteignait 36 967. Cette croissance importante du nombre d’étudiants qui, à terme, devrait dépasser les 40 000 est inhérente à l’investissement de la métropole et la région. Dans les 5 ans qui viennent, avec tous les efforts faits pour le futur Campus Métropolitain, l’ESIREM (Ecole supérieure d’ingénieurs numérique et matériaux)… et, je l’espère, la future école d’architecture, devraient concourir à accueillir plus de 5 000 étudiants supplémentaires ».
DLH : L’implantation à la rentrée 2022 de l’Ecole supérieure d’électronique de l’ouest (ESEO) et de l’Ecole spéciale des travaux publics, du bâtiment et de l’industrie (ESTP) dans le futur campus métropolitain y concourra aussi pleinement…
P. P : « Ce projet est porté par la SPLAAD qui réalise, avec les entreprises, ce bâtiment particulièrement novateur. C’est un bâtiment audacieux, de mutualisation, qui traduit la volonté de la métropole d’élargir et d’accompagner la palette de l’enseignement supérieur. C’est le cas avec ces deux écoles d’ingénieurs dans un pays qui en manque cruellement. Dijon est fière d’accueillir l’ESTP et l’ESEO ! »
Propos recueillis par Camille Gablo