« Tosca » est un opéra fait d’amour et de haine, sur fond de politique, d’art et de religion. C’est aussi un opéra d’action et de rebondissements.
La musique de Puccini ne laisse aucun répit aux personnages, ni aux spectateurs. C’est ce qui fait le succès de l’œuvre depuis sa création en 1900.
C’est grâce à Verdi et à Sarah Bernhardt que Puccini a composé « Tosca ».
Il s’en est fallu de peu que Puccini ne compose pas « Tosca ». La musique aurait dû être d’un certain Alberto Franchetti, né en 1860 à Turin, deux ans après Puccini. Un contrat avait même été signé entre Franchetti et l’éditeur Giulio Ricordi.
Le livret, confié à Luigi Illica, est déjà prêt, lorsque les trois hommes se rencontrent à Paris, à l’automne 1894, pour une lecture du texte chez Victorien Sardou, l’auteur de la pièce dont est tiré l’opéra.
Verdi, qui est à Paris pour la création d’Otello, assiste à la rencontre. Il se passionne pour ce drame, et affirme que s’il composait encore, il mettrait volontiers en musique cette « Tosca ».
Les propos de Verdi sont répétés à Puccini, qui pensait à cet ouvrage depuis cinq ans déjà, depuis ce jour de 1889 où il a vu la pièce à Milan, avec celle qui avait créé le rôle à Paris et qui le jouait à travers l’Europe : Sarah Bernhardt.
Certes, Puccini ne comprend pas le français, mais il est frappé par l’action théâtrale de l’ouvrage. Il écrit alors à Ricordi pour lui demander de se renseigner sur l’acquisition des droits. Mais Puccini est un éternel indécis, et le projet traîne en longueur. Il ne reste toutefois pas inactif et entretemps il compose Manon Lescaut puis s’attelle à La Bohème.
« Pour composer, Puccini est allé sur la terrasse du Château Saint-Ange, écouter les cloches des églises de Rome. »
Cet avis de Verdi sur « Tosca » va réveiller l’intérêt de Puccini, qui revoit la pièce de Sardou à Florence en 1895, toujours avec Sarah Bernhardt dans le rôle-titre. Il faut malgré tout lever un obstacle de taille : demander à Franchetti de renoncer à « Tosca ». C’est Ricordi qui s’en charge, en expliquant au compositeur que le sujet est immoral et qu’il risque de choquer le public. Franchetti semble s’en effrayer et se désiste.
Le livret est alors confié à Giuseppe Giacosa, qui a déjà travaillé avec Puccini pour « La Bohème », et qui sera le librettiste de « Madame Butterfly ». Giacosa remodèle le texte, non sans tergiversations avec Puccini qui commence à composer au cours de l’été 1896. À deux reprises, Puccini rend visite à Victorien Sardou, qui accepte tant bien que mal un resserrement de son œuvre : trois actes au lieu de cinq, et seulement neuf personnes au lieu des vingt-trois de la pièce. Pour plus de réalisme, Puccini se rend aussi sur la terrasse du Château Saint-Ange à l’aube, pour écouter les cloches des églises romaines, et en capter leur sonorité qu’il utilisera dans le final de l’Acte I.
La partition est prête en octobre 1899, et on raconte qu’en traçant l’ultime double barre, Puccini se serait exclamé : « La musique fut écrite par Dieu d’abord, par moi ensuite. ».
Le triomphe de « Tosca » est immédiat, le public est captivé par l’action que Puccini a brillamment mise en musique.
La première de « Tosca » a lieu le 14 janvier 1900, à Rome, dans la ville où se déroule l’action. Le lever de rideau est retardé par une alerte à la bombe. Le Préfet de Police demande au maestro Leopoldo Mugnone de jouer l’Hymne National comme si de rien n’était. Le chef commence à diriger lorsqu’une rumeur vient de la salle. Il se retourne pensant que la bombe a été découverte, mais en fait ce sont des spectateurs pestant contre des retardataires ! Finalement la bombe était une fausse alerte, et Tosca peut enfin commencer. La première est un triomphe public; les critiques, eux, sont réservés, voire hostiles, ce qui n’empêche pas le succès de l’ouvrage qui est donné au Met l’année suivante, puis à Paris en 1903.
Les spectateurs se passionnent pour cette histoire d’amour et d’action, sur fond de religion, d’art et de politique : la victoire de Napoléon sur les troupes autrichiennes à Marengo.
« Tosca » est fait de passions et de rebondissements, et met en scène des personnages et des situations réalistes, s’inscrivant dans le courant vériste porté par Mascagni et Leoncavallo, mais aussi Verdi et Giordano.