Le 13 mai 1940, lors de son discours d’investiture au poste de premier Ministre, Winston Churchill déclarait : « Je n’ai à vous offrir que du sang, de la sueur et des larmes ». A ma connaissance, c’est le seul chef d’Etat qui ait pu accéder (et rester) au pouvoir avec pareille promesse ! Je m’interroge à présent : et si l’histoire se répétait, cette fois en France, dans des circonstances certes bien différentes ? En six paragraphes, j’aimerais revenir sur certaines thématiques ; elles supposent qu’on explique clairement au peuple de France où on veut le mener, en posant comme postulat qu’il est tout à fait capable de le comprendre, ce que le dernier résultat de la Primaire de la Droite et du Centre semble avoir partiellement démontré.
Premièrement : du rôle de l’Etat. Est-ce trop demander qu’il assume uniquement ses fonctions régaliennes, à savoir l’éducation, la santé, la justice et la défense ? A défaut, on aboutit à ce paradoxe que chaque corporation se tourne vers lui comme le sauveur susceptible de distribuer des milliards que nous n’avons pas et, simultanément, les mêmes viennent se plaindre de son interventionnisme qui s’exprime forcément à grand renfort de règlementations et d’impôts toujours réinventés… J’attends ce Churchill français qui rendra l’Etat plus fort et plus cohérent sans se soucier de tous les professionnels de la mendicité ou des statuts périmés.
Deuxièmement : des collectivités locales. Indépendamment de leurs mérites réels ou supposés, les différentes lois de décentralisation ont toutes entériné le contrôle a posteriori des engagements de dépense, travers maintes fois dénoncé par la Cour des Comptes. Il est évident que des folies budgétaires ont eu lieu et qu’il a bien fallu les combler par de nouveaux impôts décidés au niveau local. Cette anomalie due à un Etat qui s’en lave les mains et à des féodalités désuètes doit être corrigée ; des dotations, oui, des dépassements non ! J’attends ce Churchill français qui saura rétablir un peu d’ordre dans la maison France, ne serait-ce qu’en imposant le contrôle a priori.
Troisièmement : de la République. Le président ne peut pas à la fois fixer le cap, être le garant d’une vision à long terme et garder les mains dans le cambouis des affaires quotidiennes. Ce retour aux fondamentaux de la V° République m’apparaît essentiel. J’attends ce Churchill français qui saura redéfinir le cadre républicain, qui fera de nouveau vivre nos institutions et qui, élu pour un seul mandat, n’aura pas à se soucier de sa réélection mais bien du sens de son action.
Quatrièmement : de la Nation. Le Larousse la définit ainsi : « Ensemble des êtres humains vivant dans un même territoire, ayant une communauté d’origine, d’histoire, de culture, de traditions, de langue et constituant une communauté politique ». La France de 2016 ressemble de plus en plus à une juxtaposition de communautés et, osons le mot, d’égoïsmes qui s’efforcent de s’affranchir de ce creuset originel. J’attends ce Churchill français qui ne trahira pas sa propre Nation au bénéfice improbable d’un « machin » devenu incontrôlable, tellement multi-tout qu’il n’est plus que l’ombre de lui-même.
Cinquièmement : de l’économie et du chômage. En la matière, tout ou presque aurait déjà été essayé, avec les résultats que l’on sait ; nous sommes devenus les mauvais élèves d’une Europe elle-même déjà bien malade. On ne pilote pas un pays comme une formule 1 et les adeptes du « y’a ka faut qu’on » seraient bien avisés de s’en souvenir. J’attends ce Churchill français qui osera expliquer qu’il nous faut désormais travailler 39 heures par semaine tout en étant payé 35 et ce uniquement pour rattraper notre retard sur nos principaux concurrents en Europe ; il saura expliquer qu’en travaillant plus, en chômant moins, la collectivité pourra réduire les impôts. Ce n’est là ni du sang, ni des larmes, juste un petit peu plus de sueur. Et tant pis pour les fanatiques des fameux avantages acquis qui devront être mis au pas et se calmeront après un ou deux mois de grèves avec des bulletins de paye à zéro.
Sixièmement : de la solidarité. S’il y a un domaine où le monde entier nous regarde c’est bien celui de notre fameux modèle social et c’est tant mieux. Encore faut-il avoir les moyens de le sauvegarder ! Car les abus sont légion : citons le chèque en blanc donné à chaque citoyen sur la Sécu qui, bonne fille devenue un peu bébête, traite sur un pied d’égalité un petit rhume comme une affection grave; citons également les allocations familiales versées à des familles où la polygamie de fait est avérée ; citons les retraites versées à des centenaires algériens dont personne ne vérifie l’existence… Je m’arrête là car cette litanie des dérives serait trop longue ici. J’attends ce Churchill français qui n’hésitera pas à trancher en faveur de l’intérêt national, rappelant sans cesse qu’il n’est de grandeur pour une Nation que dans ses efforts collectifs équitablement répartis.
Au temps de Churchill, la Grande-Bretagne était en guerre. Mais aujourd’hui, en France, ne sommes-nous pas en guerre contre des institutions dévoyées, contre le chômage, contre les gabegies de toutes sortes, contre le délitement de notre identité, contre cette déresponsabilisation des citoyens, etc. ? La réponse sera dans les urnes au printemps prochain.