L’Armée de l’Air laisse le tarmac aux gendarmes

Les premiers encadrants de l’Ecole de Gendarmerie débarquent à la Base aérienne de Dijon-Longvic et les derniers militaires de l’Air font leur paquetage. Une page se tourne à la BA 102…

Le hasard du calendrier réserve parfois bien des surprises ! Et ce, qu’elles soient agréables ou désagréables ! La BA 102 fermera ses portes pour ses… 102 ans ! C’est, en effet, le 31 août prochain que l’Armée de l’air abandonnera le tarmac de la base qu’elle avait investie au début de la Première Guerre mondiale. Un peu plus d’un siècle après l’arrivée des 4 premières escadrilles – les célèbres BR 17, BL 18, HF 19 et MF 20 –, c’est donc l’épilogue d’une riche histoire entre Dijon-Longvic et l’Armée de l’Air qui se profile… À un horizon tout proche !

Lors du dernier déjeuner de presse organisé au mess des officiers, le colonel Pierre Réal a confirmé le plan de départ des militaires (de l’Air) encore présents sur le site. Même si les derniers avions militaires – les Mirages 2000 puis les Alphajet– ont déserté le ciel dijonnais depuis 2014, quelque 900 personnels sont encore comptabilisés au sol. Le Centre de parachutistes de l’Air (CPA 20) étant engagé sur tous les théâtres d’opération actuels de la France dans le monde, ce chiffre est évidemment à relativiser. Il n’empêche, comme l’explique le colonel Réal : « Dans la situation actuelle, la continuité des opérations représente le maître-mot de la dissolution. La BA 102 reste opérationnelle jusqu’au 31 août ! »

Le clos Guynemer

Après, les parachutistes du CPA 20 seront répartis entre Orange, Saint-Dizier et Orléans. Au-delà de cette date, il restera quelques militaires de l’Air pour le Bureau des Archives de réserve (16 km d’archives !) ainsi qu’un détachement afin d’entretenir les radars et les antennes, d’une importance stratégique essentielle car ils sont notamment en charge de la surveillance de l’orbite basse. Pour l’instant, la question de la localisation de ce contingent sur le site de la base ou sur la caserne Vaillant et Lejard à Dijon intra muros n’est pas tranchée…

Autre interrogation en suspens, l’avenir du clos Guynemer et de ses 2000 pieds de Chardonnay… Un sujet beaucoup plus anecdotique – vous en conviendrez facilement – même s’il participe à sa façon à l’histoire et à la tradition des lieux. Cette vigne pas tout à fait comme les autres sera-t-elle entretenue par les collectivités ou bien par l’Ecole de Gendarmerie qui est train de s’implanter actuellement ?

Un destin funeste

Les premiers encadrants (ils seront à terme au total 180) débarquent afin que cette école puisse ouvrir à l’automne et accueillir, in fine, 720 élèves gendarmes. Des logements collectifs adaptés, des salles de cours ainsi qu’un amphithéâtre doivent être réalisés afin de satisfaire ce projet, véritable nouveau plan de bataille dévoilé en juillet 2015 par le maire de Dijon, François Rebsamen, alors ministre du Travail, et son homologue de la place Beauvau, Bernard Cazeneuve, pour que le tarmac de la BA 102 ne connaisse pas un destin funeste, autrement dit ne devienne une friche militaire. Le Premier ministre, Manuel Valls, s’est même fendu quelques mois plus tard d’un déplacement dans la capitale régionale pour annoncer une solde de 6 M€ accordée par l’Etat. Celle-ci a pris la forme d’un contrat de revitalisation afin de participer, notamment, à la modernisation de l’aéroport civil de Dijon-Bourgogne, gérée dorénavant, par le biais d’une DSP (délégation de service public), par le groupe canadien, la SNC-Lavalin (voir notre numéro 63 du 6 avril dernier). Et, le 21 avril dernier, lors d’une réunion avec les partenaires économiques au Grand Dijon, destinée à tirer à boulets rouges sur « le recours contre la Cité internationale de la Gastronomie » déposé par le conseiller municipal LR, Emmanuel Bichot, François Rebsamen devait annoncer qu’à terme la BA 102 accueillera plus de monde qu’elle n’en a jamais connu. En faisant le calcul (simple, nous direz-vous, puisqu’au plus fort la base comptait 2500 civils et militaires), l’on ne peut que prophétiser une nouvelle annonce…

Lettres de sang

Les prochains Janissaires de la BA 102 seront en tout cas des futurs gendarmes et arriveront, par compagnie de 125, à partir du 15 octobre. Ils emprunteront le sillage – au sol s’entend ! – des grands noms qui ont fait entrer la BA 102 dans l’histoire. Galanterie oblige, l’on pense d’abord à la première femme pilote de chasse, Caroline Aigle, ou encore à Tanguy et Laverdure qui ont popularisé l’Armée de l’Air, avec la série Les Chevaliers du Ciel.

Mais comment conclure sans évoquer l’As des As de la Première Guerre mondiale, le capitaine Georges Guynemer, tombé à 21 ans le 11 septembre 1917 ! En guise de clôture et d’apothéose, la BA 102 lui rendra un dernier vibrant hommage le 30 juin prochain avec un lever de drapeau qui, lui aussi, sera inscrit dans l’Histoire. En lettres de sang !

Xavier GRIZOT

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La semaine Guynemer

Avant sa fermeture officielle programmée au 31 août prochain, la BA 102 organise du 9 au 14 mai un ultime événement d’envergure : la « Semaine Guynemer » en hommage à l’as des as dont elle porte le nom. Le point d’orgue de cette semaine se déroulera le vendredi 13 mai avec la cérémonie militaire du centenaire de la venue de Georges Guynemer à Dijon en présence, notamment, du chef d’état major de l’Armée de l’Air, le général Serge Soulet, mais aussi de la Musique de l’Air de Villacoublay. Au cours de cette cérémonie qui se déroulera au monument Guynemer, sur le site de la BA 102, des Mirages 2000 devraient effectuer un passage remarqué.

Cette semaine comprendra aussi deux expositions à l’extérieur du périmètre de la base : l’une au Cellier de Clairvaux (visible du 9 mai au 14 mai) intitulée « Dijon vu du Ciel pendant la Grande Guerre » présentée par les Archives municipales ; la seconde « Un as pour parrain » (visible jusqu’au 24 juin) aux Archives départementales, hôtel du Chancelier Rolin à Dijon. Des conférences de Frédéric Lafarge, historien et délégué au patrimoine de la BA 102, ainsi que de Jean-Marc Binot, historien, sont programmées à la salle des fêtes d’Ouges le jeudi 12 mai à 20 h (entrée libre et gratuite). Enfin, pour clôturer cette semaine d’hommage, des souvenirs philatéliques seront vendus à la médiathèque Michel-Etiévant à Longvic le samedi 14 mai de 14 h à 17 h 30.