Les récents événements survenus dans le quartier des Grésilles n’ont pas laissé sans voix la municipalité dijonnaise. C’est la première adjointe, Nathalie Koenders, qui est montée au créneau pour exprimer son indignation et demander la plus grande fermeté à l’encontre des auteurs de ces faits criminels.
Nathalie Koenders, quels sont les sentiments qui vous animent ?
La colère, évidemment. L’indignation, également. Mais aussi un double message : de solidarité en direction des habitants touchés et de fermeté à l’adresse des incendiaires qui doivent savoir qu’on ne leur laissera pas la main.
Et comment traduire cette solidarité et cette fermeté ?
J’ai souhaité, en accord avec François Rebsamen, réunir la presse pour exprimer à la fois mon indignation et aussi la fermeté qui sera toujours la nôtre face à ces actes criminels. Et dire aussi que la municipalité apporte tout son soutien à la population et notamment aux personnes dont les véhicules ont été endommagés. J’invite ces dernières à se rapprocher du CCAS de la ville de Dijon qui prendra à sa charge la franchise de leur assurance. Les habitants des Grésilles souhaitent, et c’est bien normal, vivre paisiblement dans leur quartier. Nous y veillerons.
Nous espérons qu’une réponse ferme et rapide soit donnée à ces faits. J’ai demandé à rencontrer le plus rapidement possible le Directeur départemental de la Sécurité publique et la Procureure de la République pour qu’ensemble on trouve des solutions efficaces face à ces événements qui pourrissent la vie de nos concitoyens. Les habitants ont besoin d’avoir des réponses après ces actes délictueux qu’ils soient commis aux Grésilles ou bien dans d’autres quartiers de Dijon.
Concrètement, qu’est-ce que la ville peut faire ?
Ces actes criminels ne sont pas nouveaux. On se souvient que le 4 novembre dernier un véritable guet-apens a été organisé contre les forces de l’ordre et les pompiers qui ont essuyé un jet de cocktail molotov. Cela aurait pu être dramatique. Ce sont des actes inqualifiables qui auraient pu provoquer la mort de personnes. Il nous importe de savoir où en est l’enquête. On sait que des noms ont circulé. Les auteurs auraient été identifiés. Y a-t-il eu des interpellations ?
Comment agir efficacement en cohérence avec la police nationale pour mettre un terme à ces actes ? La sécurité publique, c’est de la compétence de l’Etat. Donc de la police nationale. Je rappelle que la mairie a une responsabilité de tranquillité publique qu’elle assure avec la police municipale. Le maire a déjà décidé d’élargir l’amplitude horaire de nos policiers municipaux. Ils vont très prochainement travailler jusqu’à une heure du matin. 30 policiers supplémentaires sont en voie de recrutement. Cela prend un peu de temps : lancer un appel à candidatures, recevoir les postulants, les sélectionner et embaucher les plus motivés. Une bonne partie de l’effectif sera opérationnelle dans le courant du mois de janvier.
Une police municipale équipée de tasers ?
C’est prévu. Les pistolets à impulsion électrique demandent des autorisations bien particulières, une formation spécifique et une aptitude médicale. Une quinzaine d’armes va être achetée prochainement pour équiper nos policiers.
Mais la police municipale n’a pas les mêmes prérogatives que la police nationale…
C’est vrai, mais nous ne nous privons pas pour autant d’organiser de l’îlotage, une présence soutenue dans les quartiers. Malheureusement, nos policiers n’ont pas le droit de faire des contrôles d’identité. Ils n’ont pas, non plus, la possibilité d’accéder directement au fichier des véhicules. Quand il y a un véhicule incendié, elle est obligée de faire une demande à la police nationale pour connaître le propriétaire. Pour moi, c’est une perte de temps. Ne serait-il pas plus simple de simplifier certaines missions de la police municipale ?
Je fais partie de la commission de sécurité des communes urbaines de France que co-préside François Rebsamen avec son homologue de Saint-Etienne. L’objectif est de faire remonter au ministère de l’Intérieur toutes les problématiques auxquelles nous sommes confrontés. Et il y en a…
Comment peut-on interpréter ces débordements délictueux ? Des réactions à des interpellations récentes ?
Il est important de rappeler que de 2007 à 2012, il y a eu 13 000 policiers et gendarmes en moins. Depuis 2012, de nombreux postes ont été remis en place. Le problème, c’est qu’on met beaucoup plus de temps à reconstruire qu’à détruire. On n’a pas vu encore sur le terrain les effets de cette évolution des effectifs dans la mesure où les nouveaux éléments passent par une formation qui les mobilisent d’abord dans les écoles. A terme, il faudra remettre en place cette police de proximité supprimée sous l’ère Sarkozy.
Apparemment, il y aurait un lien de cause à effet entre des interpellations pour des affaires de stup et les derniers incendies criminels. Mais je pense qu’une des causes profondes est certainement liée à la baisse des moyens dédiés à la prévention spécialisée dont une des missions est d’apporter un soutien à ces jeunes désoeuvrés, de plus en plus polytoxicomanes, qui se sentent exclus de la société et qui se lancent dans des trafics avec les gains faciles qui en découlent. C’est un vrai problème de fond et toute une chaîne qu’il faut réactiver : la répression bien sûr mais aussi un travail de prévention avec des éducateurs spécialisés.
La prévention, c’est qui ?
C’est le département. C’est une de ses compétences. Il y a une confusion qui s’est installée : le président du conseil départemental explique que la lutte contre la délinquance ne figure pas dans ses prérogatives. Il se trompe. La prévention spécialisée, ce n’est pas la lutte contre la délinquance. C’est un travail bien en amont qui est entrepris et qui est aujourd’hui considérablement perturbé par la baisse des crédits qui menacent même certaines structures.
Le Grand Dijon a-t-il un rôle ?
On a mis en place, au niveau du Grand Dijon, une association de médiation qui s’intègre dans la chaîne de la tranquillité publique. Elle n’est opérationnelle que depuis le mois de septembre et une vingtaine de médiateurs a été recrutée dans le courant de l’automne. Là aussi, c’est un travail de prévention qui est attendu.
Dans le domaine de la sécurité, vous avez souhaité mettre un accent tout particulier sur l’ensemble des festivités de la fin de l’année…
On est toujours en état d’urgence. Dès lors qu’elle organise des événements de grande ampleur, la ville se doit de prendre des mesures de sécurité. C’est un dispositif sur lequel il est difficile de communiquer. Simplement, je peux vous dire que la police municipale a été renforcée durant toute cette période et vous avez pu remarquer des blocs de béton place de la République pour empêcher toute intrusion de véhicules. »
Propos recueillis par Jean-Louis PIERRE