Le Cactus de Jean-Pierre Collard

La gourmandise est un vilain défaut, paraît-il … Dans une (récente) vie antérieure, j’ai pu le constater. Prenez un gentil commerçant qui souhaite prendre sa retraite ; il cherche un repreneur et … n’en trouve pas ! Les quelques candidats rencontrés disaient : « Ah, mais vous n’avez que le dimanche pour vous reposer ? » ou bien « Et les invendus ? Les fournisseurs vous les reprennent ? », ou bien « Les banques me demandent trop de garanties », ou bien « ça ne marche que parce que c’est vous », etc. Enfin, des entrepreneurs dans l’âme sans un € en poche, ça n’aide pas !

Bref, reste la solution de la cession du droit au bail. Je vous épargne la législation et la jurisprudence afférentes à ce sujet…Il n’en reste pas moins que lors de cette cession le propriétaire du dit local commercial dispose de deux facultés : Primo, il peut majorer le montant du loyer à sa guise. Secundo, en cas de changement d’activité, il peut exiger une déspécialisation.

Dans le cas qui nous intéresse, après moult palabres, où des intermédiaires plus ou moins intéressés se manifestent, le repreneur du droit au bail s’est vu « coller » 11 % de majoration du loyer et une déspécialisation de 20.000 €. Ouf, seulement 11%, car la demande initiale était de … 25 % ! On croit rêver, si ce n’est pas de la gourmandise, qu’est-ce que c’est alors ?! Vous me direz que c’est la loi de l’offre et de la demande, certes, et que rien n’obligeait le repreneur à accepter ces conditions. Il n’en reste pas moins que l’affaire s’est déroulée à Dijon il y a quelques mois et que je constate, comme tout un chacun, que de plus en plus de commerces qui sont à vendre, généralement par effet du papy-boom, ne trouvent plus de successeurs tant la hausse des loyers et autres conditions annexes viennent freiner le peu de candidats.

Tenez-vous bien braves gens, selon des recoupements effectués auprès d’agents spécialisés, il y aurait près de 200 commerces en tous genres qui seraient à transmettre et pour lesquels les dossiers ne passent pas auprès des banques, essentiellement parce que les loyers seraient devenus prohibitifs.

Problème en effet ! Que va devenir notre centre ville si, bientôt, la marque la plus connue s’appellera « A VENDRE » ?

L’esprit d’entreprise existe toujours, encore faut-il lui donner un cadre raisonnable et la municipalité serait bien inspirée de se saisir de ce dossier pour que la gourmandise
(rapacité ?) des uns ne devienne pas demain la première cause de désertification commerciale de notre ville… J’en conviens, ceci dépasse le cadre dijonnais et seule une législation au niveau national pourra éviter ces abus tout en sauvegardant les intérêts des différentes parties. Au passage, nous serions tous gagnants et les villes garderaient un peu plus de leur âme.