Lors du dernier meeting du camp présidentiel à Aubervilliers, le Premier ministre Gabriel Attal a sorti l’artillerie lourde pour en appeler à « un sursaut » : « L’Europe est mortelle, et voter pour l’extrême droite, c’est appuyer sur la gâchette ! » Une chose est sûre, c’est votre bulletin de vote qui représente la seule véritable cartouche démocratique… Rendez-vous dans les urnes le 9 juin !
« Je ne peux rien pour qui ne se pose pas de questions ! » La célèbre formule de Confucius pourrait être remise au goût du jour le 9 juin au soir, lorsque les résultats des élections européennes tomberont. Et notamment, sur les plateaux des chaînes d’infos, quand défileront les grands perdants de ce scrutin qui chercheront à justifier… l’injustifiable !
Car, en ce qui concerne la principale réponse, il n’est pas besoin d’être une pythie en politique pour la connaître. Caracolant en tête de tous les sondages depuis son entrée dans l’arène électorale, Jordan Bardella et la liste du Rassemblement national vont s’imposer. Les banderilles que tous les autres ont bien tenté de lui planter n’auront pas égratigné le statut de grand favori du « jeune premier » de l’extrême droite, crédité de 32 % dans les dernières intentions de vote.
Rien n’y a fait : que ce soit le rappel de l’inaction du RN au Parlement européen depuis 2019 – même lors du vote sur le Pacte sur l’immigration et l’asile, leur antienne de campagne tout de même, le RN n’a pris en charge aucun rapport, laissant ses homologues italiens et allemands du groupe Identité et Démocratie (ID) à la manœuvre. Même le rappel des anciennes accointances de Marine Le Pen avec la Russie de Poutine, qui menace l’Europe avec son invasion de l’Ukraine, n’aura pas inversé la tendance – Éric Dupond-Moretti a tout de même déclaré à Dijon que, « si celle-ci l’avait emporté lors de la dernière Présidentielle, je serais mort, car j’aurai eu le vaccin russe Spoutnik contre le Covid et je n’aurais pas pu survivre ! »
Toutes les attaques contre Jordan Bardella et consorts ont été vaines, le jeune adepte du général Bonaparte s’apprêtant à vivre son 2e passage du Pont d’Arcole… Et d’une façon encore plus triomphale qu’en 2019 où sa liste s’était déjà imposée (23,34%) mais juste devant celle présidentielle (22,42%). La seule vraie question concernant la liste « La France revient », qui n’est pas sans rappeler « America is back » d’un certain Ronald Reagan, est la suivante : dépassera-t-elle réellement les 30% ?
Les remparts dijonnais résisteront-ils ?
Les lumières du passé éclairant toujours l’avenir, il faut se souvenir aussi qu’en 2019, en Bourgogne, les 8 départements avaient déjà placé le RN en tête (23,91% en Côte-d’Or). Seules les grandes villes avaient résisté à la vague, et Dijon encore plus que les autres. Dans la cité des Ducs, le RN (15,43%) n’avait fini que 3e, loin derrière LREM (25,56%) et devancé par Europe Écologie-Les Verts (16,72%).
Les remparts de la ville de François Rebsamen, qui, depuis, s’est rapproché du président Emmanuel Macron, vont-ils résister ou bien vaciller ? Qu’en sera-t-il dans les autres communes de la métropole : à Quetigny, Fontaine-lès-Dijon, Talant et Saint-Apollinaire, où, là-aussi, le RN avait été repoussé ? A Chenôve, Chevigny-Saint-Sauveur ou encore Longvic où il avait déjà été en tête ? Voici quelques-unes des interrogations…
Les autres concernent évidemment la liste présidentielle menée par Valérie Hayer. L’actuelle présidente du groupe Renew au Parlement européen réussira-t-elle in fine à percer le mur de la notoriété et à éviter la déroute annoncée pour le camp macronien, le « ni de droite ni de gauche » étant usé par 7 ans d’exercice du pouvoir ? La fille et petite-fille de paysans de la Mayenne, macroniste de la première heure, maintiendra-t-elle son sillon devant celui de Raphaël Glucksmann et la liste PS, qui, dans les derniers sondages, la talonnent de près ?
Sous les 5%, la Berezina
Quid également du score de Manon Aubry (La France Insoumise) ? La stratégie pro-palestinienne des proches de Jean-Luc Mélenchon se traduira-t-elle dans les urnes ? Qu’en sera-t-il aussi pour Marie Toussaint et les écologistes, qui, à la différence de 2019 où ils avaient fini 3e, semblent avoir perdu de leur verdissement ? Même si tous les observateurs s’accordent sur la qualité de sa campagne, François-Xavier Bellamy maintiendra-t-il Les Républicains à flot ? Marion Maréchal et sa liste zemmourienne Reconquête réussiront-t-elles à ne pas couler sous la barre fatidique des 5 % ? Car, sous ce seuil minimal pour obtenir des députés, c’est la Berezina, pour rester dans la métaphore napoléonienne !
Combien de listes sur les 38 en présence enverront-elles des Grognards à Strasbourg (la France a 81 sièges à pourvoir sur les 720 que comptent cette assemblée issue de 27 pays) ?
Et, bien sûr, la participation dépassera-t-elle les 50 % qu’elle avait difficilement atteints en 2019 ? Pour toutes ces réponses, il faudra attendre le 9 juin au soir… Mais c’est à partir de ce dimanche qu’il faudra se poser les bonnes questions. Car, sinon, le « juste milieu » cher à Confucius ne sera plus qu’un souvenir ! En France bientôt aussi…
Xavier Grizot





