Christine Martin : « L’art participatif »

Du 5 avril au 31 mai, vous pouvez voter pour choisir une œuvre dart que vous souhaiteriez voir sortir des réserves et exposée au musée des Beaux-Arts. Alors que des Bisontins rencontrés dans lexposition temporaire « Vieira da Silva » la félicitent pour la gratuité de ce temple culturel dijonnais, ladjointe à la culture, Christine Martin, nous dévoile cette opération inédite, intitulée « LŒuvre des Dijonnais », qui lui tient particulièrement à cœur.

Ce message des visiteurs bisontins a dû aussi vous aller droit au cœur

« Il est particulièrement agréable de voir toutes celles et tous ceux qui se pressent au MBA. Il y a non seulement des touristes, des Bisontins, des Anglophones mais aussi des Dijonnais. Et ce, toutes générations confondues. Les personnes sont subjuguées déjà par les lieux qui ont entièrement été rénovés mais aussi par le fait que les collections permanentes et l’actuelle exposition temporaire sont gratuites. La gratuité des musées représente un enjeu majeur d’accès à la culture et de l’attractivité de la ville. Nous savons très bien que les 5 musées dijonnais gratuits représentent une véritable force de notre territoire. Ouvrir largement les portes de la culture, c’était très intéressant et cela l’est toujours. C’est une façon de dire aux Dijonnaises et au Dijonnais : venez dans ces musées, ils vous appartiennent. C’est votre patrimoine. C’est une belle attention et une grande générosité. Notre objectif est de partager la culture au plus grand nombre. Cependant, nous le savons, si nous ne faisons qu’ouvrir les portes, nous aurons le plaisir d’accueillir unetelle ou untel qui est déjà venu(e) plusieurs fois mais le public que nous cherchons à atteindre à travers cette démocratisation ne franchira pas toujours le pas. Si nous ne sortons pas de nos murs, si nous ne portons pas une attention particulière à celles et ceux qui estiment que les établissements culturels sont trop intimidant, si nous ne sensibilisons pas les enfants dès leur plus jeune âge, comme nous le faisons auprès des scolaires, cela ne fonctionne pas. Il faut imaginer des programmations répondant aux attentes, en faire des lieux de partage, de citoyenneté aussi, totalement ancrés dans le territoire ».

Et cest ainsi quest née cette opération originale intitulée « lŒuvre des Dijonnais »…

« Comment faire participer les uns et les autres au choix des œuvres présentées dans les musées ? Ce n’est pas toujours compréhensible de l’extérieur : pourquoi telle ou telle œuvre n’est pas exposée ? Il existe tout un tas de raisons qui président au fait qu’une œuvre soit en réserve. Un exemple : le musée des Beaux-Arts est né de son école de dessins de Devosge et, à Dijon, nous avons la chance d’avoir une collection d’arts graphiques extrêmement importante. Seulement ils ont la particularité de s’abîmer très facilement. Les dessins ne peuvent être présentés que durant 3 mois, ensuite ils doivent retourner en réserve pendant 3 ans. Les dons ne sont pas toujours non plus présentables tout de suite. Des restaurations sont souvent nécessaires ».

Quel choix a motivé les œuvres soumises au vote ?

« C’est un projet formidable. Il vient dire des choses sur ce que l’on appelle la démocratie culturelle. C’est la possibilité offerte aux citoyens de participer à des programmations. Les conservatrices ont choisi 6 œuvres à soumettre au vote. A partir de la plateforme numérique Dessinons Dijon ou sur un bulletin à glisser dans des urnes placées à l’entrée des 5 musées municipaux, les gens vont pouvoir voter. Et toutes les œuvres sont intéressantes. La Table de Gallé, restaurée récemment, est formidable. Nous sommes désormais quasiment certain que le Chenet qui n’a jamais été montré est une commande de Philippe le Hardi. Il vient témoigner de ce qu’était la vie au Palais ducal du temps des Ducs de Bourgogne. Celui-ci est le témoin d’une histoire. C’est aussi le cas du buste reliquaire de Marie Madeleine attribué à Jan Borman qui a sculpté la partie bois du tombeau de Marguerite de Bourgogne. Je peux citer aussi une acquisition récente d’une peinture de Marie Raymond de l’École de Paris. Là cela vient raconter l’histoire de la Donation Granville dont les œuvres sont particulièrement représentatives de cette école. La série d’estampes retraçant l’histoire du Japon nous permet de faire écho à l’exposition Asie qui aura lieu à la fin de l’année… »

Nest-ce pas en substance une forme dart participatif ?

« C’est un projet qui veut réellement faire entrer les Dijonnais au cœur de la programmation du musée. Et ce, d’une manière un peu ludique. Nous espérons, par cette opération, que des personnes qui ne se sont jamais déplacées au MBA le fassent… C’est, en effet, comment apporter de la participation. Dans tous les choix aujourd’hui, que ce soit l’aménagement d’un jardin ou d’une cour d’école, le citoyen a envie de participer. Cela fait longtemps que Dijon déploie des processus de démocratie participative, à travers les commissions de quartiers qui sont devenues les ateliers de quartiers. C’est aussi vrai sur les grands enjeux portés par la municipalité, comme avec Génération Dijon, le nouveau projet éducatif de la ville. Et, avec cette opération, nous faisons de même avec la culture. C’est une bonne manière d’inciter les uns et les autres à s’approprier les établissements culturels mais c’est un enjeu plus vaste : l’appropriation des uns et des autres de leur ville. Ils peuvent ainsi se dire : je peux contribuer à ma façon à la construction de ma cité ! »