Depuis deux ans, il est souvent question de Talant parmi les communes de la métropole. Ce fut ainsi la première à armer sa police municipale… Nous pourrions également citer le fait qu’elle ait décidé de baisser ses impôts ou encore son interventionnisme sur le dossier privé du centre commercial du Belvédère. Le maire Fabian Ruinet est évidemment pour beaucoup dans la nouvelle action publique qui anime la cité talantaise. Entretien…
Dijon l’Hebdo : Quelle a été votre philosophie depuis que vous avez pris les rênes de la municipalité talantaise en 2020 ?
Fabian Ruinet : « Nous essayons d’avancer sur tout un tas de sujets. Il n’y a pas de chasse gardée, pas d’investissement unique sur un seul sujet. Nous faisons du sport, de la culture, du développement économique, etc…et, quand nous le pouvons, nous adressons un message essentiel. Je prends comme exemple la culture avec la présentation de notre projet ALT 360 ou encore la domiciliation du collectif Art’Go dans un bâtiment municipal. Ces artistes interviennent dans nombre d’univers, y compris au sein d’entreprises, autrement dit ils n’ont aucune idée préconçue. Notre objectif est que la culture transmette un message profond et qu’elle puisse être visible dans tous les quartiers. Nous commençons ainsi à réaliser un itinéraire de Street Art qui débute dans le quartier du Belvédère. Je leur ai donné une orientation pour décorer la place Mendes-France. Ce sont eux qui ont choisi les thèmes : mangas, Dieu, Zeus, l’évolution des livres, du parchemin aux ouvrages d’aujourd’hui. Selon moi, l’art doit provoquer quelque chose et c’est ici le cas… Cela plaît énormément, de nombreux d’adolescents viennent voir et c’est assurément ce public cible que nous souhaitons attirer sur le plan culturel. Une des artistes, Mme Studio, qui fait de la customisation, est extraordinaire et pourra intervenir auprès des jeunes de tous les quartiers. En complément, j’ajouterai que l’art peut-être aussi au service du développement économique de territoire. Nous avons une belle programmation éclectique à l’Écrin. Il y a les spectacles mais aussi une activité économique. L’événementiel, avec toutes les offres possibles, fonctionne très bien. Nous avons là une démarche très professionnelle. Tout est imbriqué… »
DLH : C’est, en substance, la démocratisation culturelle chère à André Malraux…
F. R : « Comme vous faites référence à l’auteur de la Condition humaine, sachez que nous luttons aussi contre la désaffection du livre. C’est la raison pour laquelle nous avons voulu la gratuité pour tous de la bibliothèque. Nous avons également revu les horaires d’ouverture de ce service essentiel. Nous allons, dans les prochains moins, revoir l’organisation du bâtiment afin de favoriser les flux de circulation et les échanges entre les lecteurs. Nous redéfinirons les espaces et nous reverrons entièrement la présentation des ouvrages. Nous voulons que ce soit un tiers lieu. Pourquoi ne pas boire un café, lire le journal et, in fine, prendre des livres ? Nous avons développé toute une partie manga qui marche bien au niveau des jeunes… Nous voulons toucher tout le monde ».
DLH : Qu’avez-vous réalisé dans le domaine sportif ?
F. R : « Nous avons commencé par donner un sérieux coup de main au club de foot. L’enjeu résidait dans la rénovation des vestiaires mais ce n’était pas le seul… Le club est dorénavant doté d’une équipe de filles et nous avons voulu cette diversité. Nous accompagnons le tennis qui est en difficulté en matière de licenciés. Pour cela nous allons redynamiser le club en le dotant d’infrastructures plus modernes (nouveau club house, terrains de paddle…). Nous avons également créé dans notre espace naturel sensible (ENS) un parcours sportif avec des agrès en bois mais aussi un parcours permanent d’orientation comprenant 20 bornes fixes et 20 bornes amovibles, le premier de la métropole de ce type au demeurant. C’est une démarche de sport-santé mais aussi écologique parce que cela évite le piétinement dans cet espace protégé ».
DLH : Pouvez-vous nous en dire sur l’école inclusive qui pourrait voir le jour dans votre commune ?
F. R : « Sur ce dossier complexe, nous avons fait le choix d’avancer avec une association spécialisée. En effet, nous accompagnons l’association « Un avenir pour Chloé », présidée par Géraldine Duprat, afin de créer à Talant une structure d’accueil pour des enfants souffrant de handicap. Nous souhaitons créer une école conductive afin de les faire progresser. Ce serait là une véritable innovation qui s’inspirerait de ce qui se fait à l’étranger. Les enfants pourraient être scolarisés le matin dans les écoles de Talant puis dans ce lieu dédié l’après-midi. J’ai vu la rectrice d’Académie sur le sujet. Notons aussi que l’Agence régionale de santé (ARS) nous aide beaucoup sur ce dossier ».
DLH : La poursuite de l’activité du Centre commercial du Belvédère était menacée à l’automne dernier et vous avez pris à bras le corps ce dossier…
F. R : « La reprise du centre commercial du Point du jour représente un dossier majeur. Celui-ci était dans une situation telle qu’il allait fermer. 100 000 euros étaient nécessaires pour la remise aux normes. Nous avons mis tous les propriétaires autour de la table et nous avons proposé une solution de secours. Afin de réaliser les investissements d’urgence, nous avons proposé aux copropriétaires de récupérer en gestion municipale les parties communes du centre. Ils ont immédiatement accepté cette solution de la dernière chance. Le gain est tel que nous allons immédiatement réaliser des économies de fond (en supprimant par exemple la vieille chaudière à gaz du centre et en la remplacent par un branchement écologique au nouveau réseau de chaleur urbain que j’ai voulu à Talant). Dans les prochains mois, nous allons ouvrir le centre commercial en deux parties. Ainsi, nous baisserons à la fois les charges des locataires et nous sécurisons le site. Avec deux espaces distincts, une partie Super U et un îlot qu’il faut renforcer, le nombre de clients peut évoluer. Je rappelle qu’aujourd’hui ce centre représente 60 salariés et 1 400 clients au quotidien. Nous avançons pour rendre l’ensemble plus attractif. Les études seront achevées fin septembre pour une désignation de l’architecte d’ici la fin de l’année et le début des travaux en 2023 ».
DLH : Si une chose a bien changé depuis votre élection, c’est l’approche municipale de la sécurité et notamment la gestion de la police municipale…
F. R : « Là aussi, notre ville a changé de braquet. Nous avons mis en place une police municipale alors qu’elle était inexistante il y a deux ans. Nous avons utilisé plusieurs leviers : nous avons mis en place l’armement létal et non létal. Nous avons équipé nos agents de caméras piétons, de gilets parce balle… Nous avons dorénavant 5 agents municipaux. Nos policiers municipaux ont été les premiers armés de la métropole et nous avons été suivis depuis. Nous avons trouvé un ancien gendarme pour piloter ce service. Et nous sommes en train de monter un partenariat avec la commune voisine de Daix pour disposer d’un 6e agent. Une mutualisation gagnant-gagnant pour nos territoires. Nous avons également doté la Police municipale de deux véhicules électriques, des Peugeot, fabriquées à Sochaux, en Bourgogne-Franche-Comté ! A partir du 1er septembre, nous allons étendre les horaires de fonctionnement de ce service particulièrement en soirée. Au sein du poste de Police municipale, une personne sera quant à elle chargée de l’accueil de jour au quotidien, elle pourra épauler les habitants afin de réaliser leur pré-plainte et obtenir un rendez-vous auprès de la Police Nationale. Dans le même temps, nous développons la généralisation de la vidéo-protection sur l’ensemble des quartiers. Un exemple : dans le Bourg de Talant, nous sommes passés de zéro caméras en 2020 à 15 d’ici 2023. Les établissements scolaires, les entrées et sorties de la commune vont être équipées… En substance, nous avons remis les valeurs de la République au cœur de notre commune. C’est vrai aussi pour une démarche très pro-active avec nos militaires. Pourquoi ne pas envisager un nouveau partenariat avec la Marine nationale ? Cela peut permettre à des jeunes de se rendre sur un bateau pour voir tous les métiers possibles… Nous avons aussi replacé les anciens combattants à leur juste place… »
DLH : Que faites-vous pour la lutte contre le changement climatique et la transition écologique ?
F. R : « L’adjoint à l’environnement est, à Talant, délégué à l’administration générale, car cette transition concerne toutes les délégations. Avant déjà de dire aux autres ce qu’il faut faire, nous agissons par nous-mêmes. Et notamment au niveau de l’isolation thermique de nos bâtiments. Nous avons arrêté un programme pluriannuel et d’ici 4 ans nous l’aurons achevé sur la vingtaine de bâtiments dont l’on dispose. Nous nous sommes battus pour obtenir le réseau de chaleur urbain qui limitera les factures énergétiques de la commune mais aussi de nos habitants. Les voies cyclables, avec la métropole, se développent. Ainsi avec la rénovation de la Combe Valton, il y en aura des deux côtés. Nous avons mis en place une aide pour l’acquisition de vélos à assistance électrique, cumulable avec celle du conseil départemental. Nous avons lancé un appel d’offres groupé pour l’achat de vélos électriques mais aussi d’énergie. Nous avons aussi pris l’engagement de planter 1 000 arbres sur la commune d’ici 2026. Progressivement, l’ensemble des véhicules de la mairie seront électriques. L’avènement d’îlots de fraicheur, les plantations et la désimperméabilisation des cours d’école, sont également en cours… Nous sommes passés au bio pour l’alimentation scolaire. Et nous réfléchissons à la destination des déchets verts des écoles vers la future usine de méthanisation de Hauteville. Et la liste est loin d’être exhaustive… »
DLH : Les relations entre la Ville de Talant et Dijon métropole ont considérablement évolué. Pourquoi ?
F. R : « La guerre politique qui a existé entre Talant et la Métropole était une aberration ! Heureusement les choses ont changé ! Notre philosophie est de prendre tout ce qui peut être intéressant pour la commune de Talant même si cela vient d’ailleurs. Et entre gens intelligents, cela fonctionne très bien ! Sur la partie voirie, la métropole est, par exemple, dorénavant à nos côtés et l’ensemble des habitants peut en profiter pleinement. Nous avons aussi adopté des dispositifs intéressants, à l’image du dispositif lecture. Sur la partie sociale, nous avons accepté d’être CCAS pivot pour que l’action sociale soit encore plus pertinente. Tout en conservant sa propre identité – ainsi nous ne souhaitons pas, à la différence d’autres, une augmentation de notre nombre d’habitants –, Talant a toute sa place dans la métropole. Avec, comme maître mot, la qualité de vie de nos administrés ».
DLH : Comment avez-vous fait pour baisser les impôts, une mesure qui n’est pas passée inaperçue ?
F. R : « Nous sommes les seuls à avoir baissé significativement les impôts dans la métropole. C’était capital pour le pouvoir d’achat mais pas seulement. Je rappelle que nous sommes confrontés à un taux de taxe foncière particulièrement élevé. Pendant que d’autres ont fait le choix inverse – le début du mandat en est souvent l’occasion –, nous avons donc baissé les impôts. Et ce, parce que nous réalisons des économies de fonctionnement en interne et que nous réussissons à contenir la masse salariale… Nous économisons 500 000 € sur le fonctionnement que nous rationalisons au maximum. Comme chef d’entreprise, je sais à quel point les finances représentent la clef, pour aujourd’hui et pour demain… »
Propos recueillis par Camille Gablo