Christophe Lucand : « Le bien-être et le rayonnement de la commune ! »

Élu au premier tour à la tête de la commune de Gevrey-Chambertin, réélu conseiller départemental du canton de Longvic, Christophe Lucand a vécu des années 2020 et 2021 particulièrement chargées… Comme maire, il n’a eu de cesse de se mobiliser sur le front de la crise sanitaire, tout en plantant les premières graines de son programme. Particulièrement durable, celui-ci s’articule autour de deux piliers majeurs : « le bien-être de ses habitants et le rayonnement de la commune ». Interview d’un élu « de terrain… »

Dijon l’Hebdo : Gevrey-Chambertin est connu dans le monde entier avec ses 9 grands crus, un véritable record. Elle est donc exemplaire dans l‘univers de Bacchus mais vous avez souhaité qu’elle le soit également au niveau environnemental. La Halle Chambertin s’articule ainsi aussi bien autour du vin que de la nature. A-t-elle retrouvé les touristes après les longs mois de vaches maigres liés au Covid ?
Christophe Lucand : « Tout à fait. La Halle Chambertin a toujours bien fonctionné. Nous avons enregistré un nombre de visiteurs qui est loin d’être anodin. Au-delà de la fréquentation quotidienne et habituelle, des événements et des soirées dédiés, portés par la directrice Adeline Jeunot, rencontrent un beau succès. Ils s’articulent sur différentes thématiques qui couvrent notamment des conférences et des expositions. Ce sont également des cours de dégustation et d’œnologie, des stages œno-sensoriels, des rencontres avec des vignerons, une soirée vin et chocolat ou des balades et visites à la découverte de la ville comme le « Gevrey Bad Trip », un City Game cinématographique décapant, ou le « Halle ô Wine », une balade nocturne à faire frissonner. Pour toutes ses activités, la Halle affiche vite complet. On peut le dire, la Halle s’est installée. L’effet nouveauté est passé et elle est maintenant dans son rythme de croisière. J’en suis d’autant plus heureux qu’elle est devenue désormais un lieu incontournable doté de sa propre identité. Il faut saluer en cela tout le travail réalisé par notre Office de tourisme. ».

DLH : Vous avez été l’une des premières communes à installer un abri vélos solaire à la gare. Une façon de faire roi la Petite Reine à Gevrey-Chambertin ?

C. L : « Plus largement, nous avons installé des équipements dédiés aux vélos sur toute la commune. Et ce n’est pas terminé. Il faut rappeler que nous sommes traversés par la véloroute. Nous prolongeons notre identité vélo à travers un « Plan vélos » ambitieux. Et ça n’est pas un coup de com. C’est un axe fort de notre politique locale. Favoriser le développement du vélo passe par celui des pistes cyclables et nous aurons créé d’ici le printemps prochain 4 km supplémentaires de voies adaptées. Ce n’est pas rien… Nous améliorons la pratique du vélo, que ce soit pour circuler dans la commune, pour les loisirs, pour une utilisation plus sportive ou pour des trajets domicile-travail. Nous favorisons les supports vélos et, dans l’avenir, d’autres abris vélos et équipements verront le jour. Ce sera le cas avec des mobiliers de réparation, de gonflage des pneus, etc. Nous avons développé également un « Coup de pouce Vélo » attribuant une subvention à l’achat (jusqu’à 300€) pour tous les types de vélos, et un dispositif d’accompagnement vélo pour les enfants en lançant des opérations destinées aux élèves des écoles lors desquelles nous avons mis en place des séances d’éducation au vélo couvrant sa pratique en ville. Les familles et les enfants ont répondu présents. Ce succès nous conforte pour développer cette orientation. »

DLH : Où en êtes-vous de votre souhait de développer l’accès jusqu’à Dijon à vélo ?

C. L : « C’est une perspective ambitieuse encore à développer. Pour cela, il nous faut des partenaires afin de le faire en cohérence avec tous nos voisins. Dans l’immédiat, nous favorisons surtout aujourd’hui l’utilisation du vélo à partir des communes voisines et jusqu’à notre gare figurant comme la porte d’entrée au Sud de Dijon. L’association du vélo et du train est en effet faisable et aisée. C’est une pratique à soutenir. Elle est un moyen plus rapide et plus sécurisé pour relier notre petite ville et ses trésors, à la Métropole. Pour le reste, je mise sur les aménagements en devenir de l’entrée de Dijon Sud. Mais tout ne dépend pas que de nous ! »

 

DLH : Le réseau de petits parcs et jardins que vous avez lancé participe aussi pleinement à la lutte contre le changement climatique et à la préservation de l’environnement…

C. L : « Nous avons en effet lancé énormément de choses en cohérence avec notre identité. Je rappelle qu’avec près de 600 ha de bois et de forêts sur son territoire, Gevrey-Chambertin est une commune forestière. La ville est également propriétaire d’un espace exceptionnel et unique, la Réserve naturelle nationale « Combe Lavaux Jean-Roland ». C’est un poumon de biodiversité extraordinaire, niché au sommet de notre grand vignoble, rassemblant des espèces animales et végétales rares, voire uniques au monde ! Parallèlement, nous avons dénombré près de 800 arbres dans la zone dite urbaine de la commune. Pour accentuer la dynamique écologique que nous portons, nous nous sommes donnés l’objectif de franchir le cap des 1 000 arbres dès le printemps prochain. Celui-ci sera largement atteint. Cela se traduira par la création d’un nouveau parc municipal de 4 000 m2, le « Parc Bergis », qui va se développer dès la fin de l’année puisque nous engageons les premières plantations cet hiver. C’est évidemment un enjeu de taille pour notre petite commune. Nous réservons d’ailleurs pour cela un lot qui, à l’origine, était à urbaniser. Nous allons le reconvertir en un espace vert dédié à la population. Ce n’est pas anodin compte-tenu de l’investissement et du coût de cette réorientation. Nous le faisons aussi, dans cette période compliquée marquée par le Covid, afin de favoriser et d’entretenir le lien social ; les espaces extérieurs favorisant les rencontres, les échanges, permettant les jeux des enfants, les loisirs et les pique-niques. Nous développerons également des petits squares et des micro-forêts urbaines, où nous planterons des espèces atteintes aujourd’hui par le réchauffement climatique. Je pense notamment à celles que l’on retrouve dans nos forêts locales, à l’instar du hêtre. C’est une espèce menacée, composante de nos belles forêts. »

DLH : Comment avez-vous associé largement les habitants à l’avenir durable de leur territoire ?

C. L : « Nous avons lancé deux enquêtes publiques. L’une d’entre elles concerne le « Parc Bergis » qui a rencontré un beau succès. Pour cela, nous avons travaillé avec l’association Pirouette-Cacahuète qui a pris en charge une partie du travail de collecte et de co-construction du projet, dans une période où nous ne pouvions pas tenir de réunions publiques. L’autre enquête, toujours en cours, porte sur la réhabilitation du quartier dit des Écoles. Nous allons réhabiliter la totalité de cet espace de vie avec, bien sûr, des étapes qui vont s’échelonner sur plusieurs années. Nous allons débétonniser et, là encore, créer des espaces verts, familiaux, écologiques, éducatifs et ludiques. Les familles, les aînés, les enfants et les adolescents pourront trouver dans ces lieux des espaces récréatifs ou de repos. Nous voulons véritablement développer de petits « poumons verts », des lieux de verdure, de sociabilité… C’est complémentaire avec ce que nous avons établi et créé l’année dernière à travers un jardin pédagogique éducatif co-construit avec une classe de l’école élémentaire Gaston Roupnel. C’est également ici que se trouvent nos jardins partagés et un verger en devenir. Dans les faits, le développement durable est bien interprété par notre municipalité comme un tout. Il repose sur une dynamique écologique, mais pas seulement. Il est constitutif de liens sociaux, d’échanges, de partages et de relations humaines ! »

DLH : Et tout cela répond pleinement aux deux piliers sur lesquels vous avez adossé votre mandat : le bien-être et le rayonnement de la ville…

C. L : « Les deux sont bien imbriqués. Le bien-être est dédié à nos habitants, et à nos visiteurs et touristes qui en bénéficient. En ce qui concerne le rayonnement, nous profitons d’un bel héritage. Il est celui d’un nom sonore et réputé depuis des siècles dans le monde entier. Pour de nombreuses personnes partout ailleurs : Gevrey-Chambertin, c’est la Bourgogne ! En tant qu’historien, spécialiste des mondes de la vigne et du vin depuis plus de vingt ans, je sais ce que représente l’envergure de ce nom parmi les plus reconnus. Je sais ce que représente cet héritage. Aujourd’hui, c’est une marque territoriale dont nous héritons, mais qui nous oblige. Il faut en être à la hauteur. Cela passe aussi par l’embellissement de la ville. Nous y allons par petites touches, à travers la création de lieux d’intérêt, la réhabilitation de murets, l’installation et la création d’équipements dédiés. Dans quelques mois, nous allons entre-autres planter une petite vigne en façade de l’une des entrées de la commune, derrière un muret traditionnel marqué par une porte gravée au nom de la ville. Elle sera créée selon des modes ancestraux, comme il y a 150 ans. Cela fera partie des points d’attraction que je veux créer sur la commune pour la rendre plus attractive encore ».

 

DLH : Vous avez été élu avec 56,12% dès le premier tour aux municipales mais vous n’avez pas dû savourer votre victoire, puisque le premier confinement est tombé juste après. Comment avez-vous vécu ces premiers mois difficiles ?

C. L : « Effectivement. Notre liste a été élue le 15 mars 2020, mais je n’ai pris mes fonctions que le 25 mai suivant. Cela a été une période intermédiaire bien étrange ! Il se trouvait qu’à l’époque j’étais président de la communauté de communes. J’ai donc pu travailler en très grande proximité avec Bernard Moyne, mon prédécesseur. Nous avons pu co-gérer ensemble beaucoup de choses et cela a été très positif pour la ville et ses habitants. Nous avons finalement réalisé la traversée de cette crise au printemps 2020 main dans la main »

DLH : Quel a été l’impact financier de la crise sanitaire sur le budget de Gevrey-Chambertin ?

C. L : « L’impact a été réel mais nous l’avons surmonté parce que l’on a su anticiper les choses. Très tôt, nous avons réorienté les lignes de crédit qui avaient été engagées sur des éléments qui n’étaient plus d’actualité. Il se trouve que c’est moi qui ai fait voter le budget 2020, après mon élection, au mois de juillet. C’est cette anticipation et le pragmatisme dont nous avons su faire preuve qui nous ont servis. Au final, grâce à cela, l’impact de la crise a été relativement limité pour la commune. Nous tenons donc nos engagements, tout en assurant un bilan financier exemplaire. Cette situation très saine n’est pas une chance. Elle est le fruit d’un travail constant et quotidien et la conséquence de la mise en œuvre d’une politique responsable et exigeante ».

DLH : Si bien que vous avez pu maintenir votre politique d’investissements, et notamment pour le projet phare de la salle polyvalente ?

C. L : « Oui. C’est le projet majeur du mandat. C’est un projet ambitieux financièrement mais surtout très exigeant techniquement. Avec les conséquences de la crise, nous avons dû revoir le calendrier initial. En somme, le Covid nous a surtout impactés à travers la planification de nos projets. Nous avons également dû travailler différemment avec les entreprises qui étaient moins opérationnelles où qui subissaient des pénuries de matériaux ».

 

DLH : Lors du Congrès des Maires à Paris, le président Emmanuel Macron a souligné qu’ « il y avait les maires d’un côté et le gouvernement de l’autre mais que l’État était un tout ». Comment avez-vous perçu ce message ?

C. L : « J’ai bien perçu le sens et la portée d’un tel message. Et je réponds : Dont acte ! C’est aussi une façon de rappeler les élus locaux à leur devoir. Je réponds bien évidemment favorablement à cet appel dans la mesure où l’État assume, lui aussi, ses responsabilités. Le président a raison, la République est un tout. Mais les collectivités ne peuvent pas fonctionner sans l’appui de l’État. Et je ne parle pas que des dotations. L’État doit être juste, responsable et solidaire. Il doit s’assurer du maintien et de l’efficacité des services publics de proximité, pour le bien de nos habitants, dans l’intérêt commun de tous, et au quotidien. Il doit veiller à ce que ses services répondent aux attentes des collectivités aujourd’hui durement mises à l’épreuve par un contexte totalement inédit marqué par la défiance croissante de nos concitoyens. Dans le cadre de la crise sanitaire par exemple, l’accompagnement réglementaire a été plus que compliqué pour nous, élus locaux. Il faut en finir avec les décisions unilatérales venues d’en-haut, trop souvent incompréhensibles et contradictoires, comme avec les directives verticales, produites sans concertation, ni pragmatisme. Imaginez que depuis plus d’un an, nous avons dû appliquer – et faire appliquer – plus d’une cinquantaine de protocoles et de règlements sanitaires, parfois inadaptés, incompréhensibles ou inopérants sur le terrain. Dans ce sens, le président de la République a raison, les collectivités ne sont pas des contre-pouvoirs. Elles sont constitutives de l’État. Mais le pacte républicain ne fonctionne que si en retour l’État accompagne, garantit et protège, dans une convergence de vue et une cohérence d’intérêts bien compris de tous ».

DLH : En juin dernier, vous avez été également réélu, avec votre binôme Céline Tonot, conseiller départemental du canton de Longvic. En tant que Gibriaçois, vous avez dû déguster le score sans appel (58,50%) dont vous avez bénéficié ?

C. L : « Cela a été en effet une belle victoire électorale, bien que nous n’ayons pas pu mener une campagne dans des conditions normales. Nous l’avons regretté, car nous aurions fait un bien meilleur score encore. Quoi qu’il en soit, notre satisfaction a été réelle dès le premier tour en remportant plus de la moitié des voix face aux deux listes adverses (ndlr : un 2e tour a été nécessaire eu égard au nombre de votants inscrits). Ce score n’est pas dû au hasard. C’est le fruit de tout notre travail depuis 6 ans. Nous avons toujours été des élus de terrain, au contact de tous, quotidiennement et partout sur notre canton. Tous les jours, lorsque l’on nous appelle, nous sommes présents pour échanger, dialoguer, construire, accompagner et aider les communes et les habitants qui en ont besoin. Je crois que les habitants sont reconnaissants de cela. Pour preuve, notre présence est manifeste dans nos deux villes respectives, Longvic et Gevrey-Chambertin. Mais nous sommes toujours très impliqués dans les autres villes et villages. Les résultats enregistrés dans les plus petites communes expriment bien cela je crois. Par ailleurs, et ça n’est pas anodin, nous avons reçu, parfois spontanément, l’appui immédiat d’une large majorité des maires de notre canton. C’est là encore le résultat de notre travail. C’est aussi l’expression d’une responsabilité et d’une exigence que nous entendons bien poursuivre ».

Propos recueillis par Camille Gablo