Marc Frot : « Les paysans parlent avec le cœur »

S’il y a bien un événement attendu sur la Foire de Dijon, c’est la Ferme Côte-d’Or. Durant 4 jours, petits et grands en prennent plein les yeux, et pas seulement en rencontrant les vedettes que sont taureaux, chèvres, chevaux… Les vrais stars ne sont autres que les paysans de la Côte-d’Or qui disposent d’une vitrine exceptionnelle. C’est ce qui compte le plus aux yeux du vice-président du conseil départemental, Marc Frot, qui nous livre, comme toujours, une interview sans langue de bois !

Dijon l’Hebdo : La Ferme Côte-d’Or, que vous implantez pour la 13e fois au cœur de Dijon, représente une vitrine de taille pour le travail des agriculteurs. C’est l’objectif premier ?

Marc Frot : « Lorsque l’on a décidé qu’il était indispensable que les paysans soient au cœur de la Foire gastronomique, cela me paraissait une évidence. Nous avons alors pensé que la Ferme Côte-d’Or était une bonne idée. Elle est destinée à l’ensemble des visiteurs, des familles mais aussi et surtout aux jeunes du Département. Nous trouvons tout à la Ferme : les animaux, bien évidemment, car c’est le plus porteur mais nous expliquons aussi par exemple la réalisation de la farine, de la moutarde, du cassis… Ce que j’aime par-dessus tout pour ma part, c’est le fait que ce sont des paysans qui parlent de leur métier. Ce ne sont pas toujours des professionnels de la communication, mais ils parlent avec le cœur. Ils disent ce qu’ils font, ils exposent aussi leurs états d’âme et, pour moi, c’est réellement bénéfique ! Il faut tout de même que ce soit ceux qui travaillent qui parlent de leur métier. La terre est basse lorsqu’il faut la gratter et j’en ai un peu marre que ce soit des gens qui n’ont jamais travaillé la terre qui évoquent l’agriculture ! »

DLH : Beaucoup de producteurs ont subi l’agribashing… notamment eu égard à la révolution bio. N’est-ce pas surtout pour lutter contre ce phénomène et pour remettre les professions agricoles au cœur du village, enfin là je devrais plutôt dire de la ville, que le conseil départemental est omniprésent sur la Foire de Dijon ?

M. F : «Les visiteurs vont pouvoir se rendre compte d’une chose : même si un paysan n’est pas écolo à 200%, il a fait des efforts du diable ! Lorsque je me suis installé, je me rappelle que l’on me disait : tu nourris le monde et il y a 2 tiers des habitants de la planète qui ne mangent pas à leur faim. Tu y vas plein pot quel que soit le prix. Aujourd’hui, il faut continuer de nourrir les gens mais il faut faire attention. Les paysans sont prêts à jouer le jeu. Même les plus récalcitrants sont dans cette démarche. Ils ne savent pas toujours le dire. Et nous, au niveau du Département, nous aidons la Chambre d’Agriculture, afin que les professionnels puissent réellement expliquer ce qu’ils font. Quand des gens me disent : on a vu deux fois en deux mois un paysan passer son appareil à traiter dans une céréale, les gens ne doivent pas forcément penser que c’est un irresponsable. Peut-être met-il tout simplement des petites doses… Et je veux répondre à ces gens : si vous avez un cancer, vous irez vous faire traiter et vous ne prendrez pas que des boules d’Arnica ou du miel ! Les rayons ne sont pas forcément bons pour la santé ou pour ceux qui vous les font. Au bout d’un moment, il faut remettre l’église au milieu du village ! Lorsque je vois une céréale ou un animal malades, il faut les soigner. On ne met plus 15 fois la dose pour que ce soit efficace mais il faut sauver la plante ou l’animal. Lorsque l’on dit que l’on gère une ferme en bon père de famille, ce n’est pas ringard. Quand l’on repassera la terre à nos successeurs, on veut leur transmettre une terre saine… »

DLH : Après « de la fourche à la fourchette », vous avez choisi l’appellation « de la terre à l’assiette » pour votre stand au cœur du Pavillon Côte-d’Or…

M. F : « Le concept de la terre à l’assiette me plaît. On a toutes les productions, sauf les fruits exotiques évidemment. Il faut dire aux gens : mangez des légumes pendant la saison. Manger des tomates en plein hiver, il ne faut pas s’étonner qu’elles viennent de pays où il fait chaud 12 mois sur 12. Mais doit-on manger des tomates au mois de décembre ! Ils doivent savoir qu’elles sont faites dans des serres où il y a du chauffage, où la nappe phréatique est mise à mal, où l’arrosage ne se fait pas par le Saint Esprit. C’est cela aussi qu’il faut expliquer aux gens… Ils y sont sensibles et ils réagissent bien ».

DLH : Et la marque « Savoir-Faire 100% Côte-d’Or » représente le meilleur marqueur pour que les gens achètent local…

M. F : « C’est réellement ce que nous voulons faire avec cette marque. Je veux que des gens se disent que, dans notre département, le local est de qualité. Cette marque est une vraie bonne idée et elle me plaît. Et le président François Sauvadet la défend et la porte très bien… »

Propos recueillis par Camille Gablo