Diffusé mi-avril sur France 5, un documentaire sur l’« Histoire du Salvator Mundi » de Léonard de Vinci a connu un énorme retentissement populaire, retentissement comparable à celui que l’achat de la toile la plus chère du monde avait connu lors de son acquisition par un prince du Golfe arabique.
Las, ce documentaire, répondant aux lois du genre, constitué par un amoncellement de commentaires pas toujours indiscutables, donne la priorité au sensationnalisme sur l’exactitude historique et scientifique, stigmatisant à coups de contresens et d’erreurs le professionnalisme de la National Gallery de Londres et de Christie’s et s’achevant sur une « fausse note » selon la juste formule de Vincent Noce dans une chronique qu’il donne à « La gazette Drouot » du 23 avril dernier.
« Le documentaire fait défaut d’honnêteté en affirmant que l’oeuvre n’a jamais été analysée », écrit notamment Vincent Noce, auteur de « L’affaire Ruffini », fruit de l’enquête qu’il a conduite durant cinq ans sur les traces de dizaines de faux de maîtres anciens. « Or, elle fut bien disséquée lors de sa restauration » précise le journaliste, « et étudiée par des spécialistes lors de son exposition à Londres avant que Christie’s ne reprenne un riche historique, même s’il a été discuté depuis. Par dessus tout, le tableau a été autopsié avec le plus grand sérieux par le Louvre et le laboratoire du Centre de recherche et de restauration des Musées de France qui ont bien conclu à l’attribution à Léonard , avec les précautions d’usage ».
En vertu de quoi, voulant vous faire une opinion sur le sujet, il est préférable que vous vous reportiez aux travaux pionniers de Daniel Arasse, de Martin Kemp, de Pietro Marani, de Carlo Vecce notamment dont les ouvrages illustrés sur Léonard de Vinci, sa vie et son oeuvre font autorité.
Mathieu Deldicque, docteur en histoire de l’art, spécialiste de l’art de la Renaissance et conservateur du patrimoine au musée Condé de Chantilly, commissaire de l’exposition « La Joconde nue » (Domaine de Chantilly – juin/octobre 2019) a consacré un passionnant et didactique « Que sais-je » à « Léonard de Vinci – Une esquisse de portrait », où tordant le cou à bien des idées reçues et à des mythes durables, il esquisse le portait de l’archétype même du savant de la Renaissance, curieux de tout et praticien multidisciplinaire : en peinture, dessin, architecture, musique, ingénierie, anatomie, cartographie, hydraulique, physique…
L’auteur réussit le tour de force d’embrasser et de résumer avec clarté en 120 pages le projet Léonardien en dépit de sa complexité et de son in-aboutissement. Une excellente entrée dans l’oeuvre du génie qui a changé l’art et peut-être même le monde.
Pierre P. Suter
Léonard de Vinci
pat Mathieu Deldicque
Que sais-je ? 9 €