Sciences-Po brûle t-il ?

Les plaques tectoniques de la croûte terrestre bougent fortement dans l’hexagone, provoquant séismes et éruptions volcaniques en chaîne. Ces coulées de lave se répandent un peu partout : de Trappes à Paris en passant par Lyon, Bordeaux, Lille, Toulouse etc. Les origines de ces foyers éruptifs sont tout à la fois sans rapport les uns avec les autres à première vue, et procèdent pourtant d’un dénominateur commun : violence dans toutes les couches de la société assortie d’un besoin d’instaurer une rigueur morale qui – de légitime – peut vite tourner au puritanisme excessif. Quand ce n’est pas à une inquisition laïque ou un intégrisme religieux digne de Savonarole !

Les révélations de Camille Kouchner dans son livre « La Familia Grande » ont eu pour conséquence la démission précipitée de Frédéric Mion, directeur de Sciences Po Paris. Ce qui a déclenché une réaction en chaîne et sans lien à l’origine : des étudiants et anciens élèves ayant décidé de prendre la parole sur les réseaux sociaux. Sciences Po brûle-t-il ? Par le biais du hashtag #SciencesPorcs, ils/elles ont ainsi été nombreux (ses) à dénoncer les violences sexistes et sexuelles dont ils/elles auraient été victimes à Sciences-Po Paris ainsi que dans les différentes antennes implantées dans les métropoles régionales.

Ces univers de jeunes privilégiés et d’esprits élitistes – où se coopter de génération en génération entre gens bien nés et animés d’une pensée formatée est la règle – ont fait et font encore le bonheur des plus hautes sphères de la gouvernance française. Or, ces consortiums du savoir sont devenus des brasiers quasi insurrectionnels, menaçant d’incendie les autres chaînes de production de futurs ministres, conseillers, experts, administrateurs de banque ou hauts-fonctionnaires.

Avec opportunité, Alexandre Kouchner – et non un quelconque Kevin Macheprot né à Sarcelles ! – enseignant à Sciences Po,  fils de Bernard Kouchner et de Christine Ockrent, expliquait récemment à la radio que cette « culture globale sexiste ne se cantonnait pas seulement aux Institut d’études politiques (…) Il y a un fond extrêmement violent dans notre société » ajoutait-il. On appréciera le fait que cet illustre rejeton de la dynastie Kouchner/Ockrent ait mis autant de temps à prendre la mesure du climat dégradant qui prévaut dans les bizutages ou lors des sauteries de Sciences-Po and co (1). Bien évidemment, il serait souhaitable que de tels comportements fassent l’objet d’une procédure judiciaire, plutôt que de relever de l’empirisme des hashtag #SciencesPorcs ou des #MeToohashtag qui confinent trop souvent à un despotisme inadmissible, voire à une dictature des mœurs nauséabonde. D’ailleurs, à bien réfléchir, il n’y a pas loin entre un intégrisme musulman qui voile les femmes afin de les garantir de tout regard impur (?) et ces hashtags qui déboulent tels des volcans en éruption au point d’étouffer – oui, je sais j’exagère en écrivant ce brûlot- tout don de penser par soi-même ainsi que cette spécificité française qu’est l’esprit gaulois. Ave Caesar, ceux qui veulent vivre te saluent.

Marie-France Poirier

  1. La plupart de ses grandes écoles ont été fondées par Napoléon pour briser la noblesse de cape et d’épée qui, sous l’Ancien Régime, accaparait de tous les rouages d’Etat – au seul mérite d’avoir du sang bleu dans les veines. On notera les similitudes d’un royal passé avec notre époque: en 2021, il convient d’affirmer que l’ENA, Sciences-Po et tutti quanti produisent rarement de grands chefs d’Etat ou des ministres compétents. Cette dégradation date de la fin des septennats de Georges Pompidou ainsi que de Giscard d’Estaing … Emmanuel Macron voulait supprimer ces bastions, où il serait salutaire d’appliquer les principes de … l’apprentissage en alternance – histoire de tâter de la « vraie vie ». Le Président a renoncé à son intention première et paraît devoir faire perdurer un système devenu obsolète et parasitaire.