Guillaume Ruet fut le premier maire de la métropole à proposer, sur les réseaux sociaux, de mettre à disposition les moyens matériels de sa commune pour la campagne de vaccination. Le maire de Chevigny-Saint-Sauveur a lancé un appel au préfet et au directeur général de l’ARS (Agence régionale de santé) afin de solutionner « le problème du dernier kilomètre ». Objectif : accélérer la vaccination !
Dijon l’Hebdo : Vous êtes très rapidement monté au créneau et avez tiré la sonnette d’alarme en constatant le nombre (très) faible de personnes vaccinées lors de la première semaine…
Guillaume Ruet : « Même si j’entends les discours anti-vaccins, je suis favorable, pour ma part, à la vaccination et 40% des Français partagent ce point de vue. Il faut passer la seconde pour vacciner ces millions de personnes. Alors que le gouvernement avait prévenu qu’il était prêt, les débuts ont été difficiles. Nous étions à 500 vaccinations alors que l’Allemagne approchait les 200 000. Je pense qu’il est urgent d’accélérer. Je ne veux pas faire de polémiques stériles avec le gouvernement parce que ce ne serait pas à la hauteur des enjeux. Mais chaque jour de perdu représente la mise en danger de vies supplémentaires. Nous ne pouvons pas nous permettre de regarder le nombre de contaminations, de personnes en réanimation augmenter. Nous ne sommes pas loin d’un troisième confinement. Nous voyons bien l’Angleterre qui a déjà reconfinée. Il y a une véritable usure. La crise dure depuis bientôt un an, l’économie est à genoux… et la campagne de vaccination représente un véritable espoir pour le retour à la normalité, même si beaucoup craignent encore de se faire vacciner. Dans le même temps, nous avons une machine d’Etat qui prend son temps. C’est pour cela que tout le monde est révolté. Je comprends qu’il y a un ordre de priorité avec les EHPAD… mais nous avions plusieurs semaines pour prévenir, obtenir les accords, etc. Nous pouvions commencer plein pot ! Je suis assez stupéfait de la lenteur administrative alors que l’on nous a dit que nous étions en guerre. Il faut réellement que l’on s’y mette tous et que l’on ne connaisse pas un fiasco sur la vaccination ! Je n’ai pas envie pour ma part d’être vacciné en 2022 ».
DLH : Dans votre appel au préfet et au directeur de l’ARS, vous leur demandez de « faire confiance aux maires pour la politique sanitaire sur le dernier kilomètre ». Pensez-vous que l’Etat ne fait pas suffisamment appel à cet échelon de proximité ?
G. R : « Depuis le début, l’Etat gère cette crise sanitaire et oublie de faire appel aux collectivités locales. Pourtant, à chaque fois, ce sont celles-ci qui vont au charbon. Les maires trouvent des solutions innovantes. Ce fut ainsi le cas, par exemple, pour l’accompagnement social des personnes les plus fragiles. Nous connaissons bien le terrain, nous avons une légitimité que, manifestement, la machine d’Etat, la bureaucratie n’ont pas. Il faut que l’Etat s’appuie sur les collectivités locales et, notamment, les communes. C’est pour cela que, dès le début, je me suis interrogé sur l’absence des vaccinodromes, à l’instar de ce qui se fait l’Allemagne. Nous l’avions fait, je le rappelle, pour les campagnes de tests. J’ai proposé de le faire à la salle du Polygone de Chevigny-Saint-Sauveur. Nous pouvons la mettre à disposition durant plusieurs semaines en créant, en son sein, des boxes séparés, pour que les personnes prioritaires puissent se faire vacciner ».
DLH : Vous proposez aux autorités publiques la mise à disposition de la salle du Polygone pour les habitants de Chevigny et de tout l’Est dijonnais. Combien de personnes prioritaires pourraient y avoir accès ?
G. R : « Un chiffre m’a marqué : 91% des personnes décédées du Covid ont plus de 65 ans ! Ce sont aux personnes âgées que nous devons proposer en priorité de se faire vacciner car ce sont elles qui payent le plus lourd tribut du Coronavirus. A Chevigny, ce sont ainsi 3 000 à 4 000 personnes à qui il faut proposer rapidement une solution de vaccination. Il ne faut pas perdre de semaines, de jours. Une solution de proximité dans les communes, dans les endroits que les gens connaissent bien, peut permettre une véritable vaccination de masse. Et cela doit être complémentaire des acteurs de soin de proximité : les généralistes, les pharmaciens… C’est un appel à une vraie collaboration : Etat, collectivités locales, acteurs de santé. Si chacun joue sa partition de son côté, cela ne fonctionnera pas. Il faut travailler de concert ! Sans cela, nous n’aurons pas de perspective d’un retour à la normale. C’est ce qui me préoccupe. J’ai envie de tourner la page de cette crise. Le plus rapidement possible ! »
Propos recueillis par Camille Gablo