Du covidisme à la covidose

Le Covid est un virus, et bien plus encore : c’est devenu une idéologie, une sorte de nouvelle religion, et une névrose aussi. Démonstration, affranchie des précautions sanitaires d’usage.

Le virus qui se propage connaît des déclinaisons étonnantes, qui ne sont pas seulement épidémiques. Ainsi en va-t-il de ce que j’appelle le covidisme, et la covidose. Ceux-ci gagnent du terrain, contaminant la société, affectant les relations et infectant les esprits.

Le covidisme, c’est la dimension idéologique et religieuse, tout à la fois, de la manière dont le virus « est vécu » mentalement et moralement par une partie de la population. Un humoriste a proposé un sketch qui cartonne en ligne, précisément intitulé « le Covidisme ». Face écran, l’humoriste décrit son quotidien de covidiste d’un air pénétré, comme touché par la grâce ! Il donne le détail de ce qu’est selon lui une secte à part entière. Rendons à César (Karim Duval en l’occurrence) ce qui lui appartient, et proposons une déclinaison théorique de cette étonnant covidisme. Cette religion (qui est aussi une idéologie, avec un versant politique assumé) trouve sa finalité morale dans la poursuite d’un idéal : la santé, mais précisément la santé biologique. L’OMS rappelle que « la santé est un état de bien-être général, moral, mental, social ». Le covidisme n’a cure de ces dimensions : son obsession : le bilan sanguin vierge. Des fidèles dépressifs, précarisés par millions ? Qu’importe, le salut est ailleurs. Etre sain, c’est presque être saint n’est-ce pas ? Et de « santé » à « sainteté », il n’y a qu’un pas, que les covidistes franchissent allègrement.

La vertu cardinale du covidisme, dans son application sociale, c’est l’hygiénisme. Il a ses gestes, qui doivent être « bons » (comme la distance à respecter), ses règles de comportement scrupuleuses : le « sans-contact ». On se souvient du « Ne me touche pas ! » de Jésus à Thomas. Mais si par malheur, contact avec l’impureté – le mal ! – il y a le gel, distribué aux fidèles par de nouveaux bénitiers placés à l’entrée de tous les lieux publics. Et puis le masque, signe de reconnaissance que les adeptes arborent fièrement, allant du haut du nez au menton. Les pratiquants non croyants osent le porter négligemment, heureusement, on sait les rappeler à la règle rituelle.

Et la finalité de tout cela serait – sera ! – une société débarrassée des microbes et des virus. Il y a un travail, certes, mais au rythme évangélique auquel avancent les adeptes du covidisme, la guerre contre le mal sera gagnée bientôt. D’autant que la grâce viendra du « Saint Vaccin », le Pape Delfraissy l’a promis sur le canal officiel, « Bien Faire Moralement » (abrégé en BFM). D’ailleurs, il l’affirme aussi, un monde nouveau s’est mis en place, et « plus rien ne sera comme avant ». Si ce n’est pas de l’assertion mystique, ça….

Et puis il y a la covidose. La covidose est une névrose obsessionnelle ayant le virus pour point de crispation, abcès de fixation. Car l’axiome est valide, selon lequel « covidiser la société co-divise le social ». Jamais il n’y a eu autant de heurts, de disputes, d’accrochages (famille, travail, lieux publics…) que depuis que le Covid est dans nos vies. D’ailleurs, « le » ou « la » Covid ? Les explications de textes commencent sur son genre, fuyant… Et en effet, le « virus rend fou » (dixit BHL), il rend compulsif, obsessionnel, névrotique, agressif. Se laver sans cesse les mains, tout purifier, aérer, fuir les microbes, le virus, à toute force. Et persuader les déviants de rentrer dans le rang…

La covidose connaît même un versant psychotique quand le rapport au réel est altéré par une grille de perception de celui-ci entièrement covidisée ; et que toute la vie est régie par ce qu’il faut faire et ne pas faire, toucher et ne pas toucher, etc. Certains, saisis de ce que l’on appelait jadis les « fièvres obsidionales » ne sortent plus, confinés volontaires, reclus comme des bernard-l’hermite, considérant que tout est devenu impur et dangereux. Obsessionnelle la covidose, car elle est une grille de perception rendant, plus encore que méfiant, véritablement paranoïaque. Et agressif, car si autrui est négligeant voire dangereux, il faut à toute force le rappeler à la raison, et ramener la brebis galeuse, au troupeau ; non sans qu’elle ait consentie à faire amende honorable. Les adeptes du covidisme frappés de covidose sont sûrs d’incarner la Bonté. On ne peut pas leur donner tort ; en ce sens, ils épousent l’air du temps. Mais attention, covidistes de tout poil : « révélation » n’est pas loin, historiquement et phonétiquement, de « révolution ». Et gare aux retours de flammes…