Avec 56,12 %, la liste menée par Christophe Lucand s’est imposée, sans coup férir, dès le premier tour des élections municipales. Le conseiller départemental de Longvic a ainsi succédé à Bernard Moyne à la tête de la commune de la côte de Nuits qui a une double particularité : elle est à la fois aux portes de la Dijon métropole et possède, eu égard au nombre record de ses grands crus, une notoriété internationale exceptionnelle. Dans les 6 prochaines années, Christophe Lucand entend faire fructifier le rayonnement touristique, synonyme de retombées économiques, mais aussi améliorer la qualité de vie de ses habitants, par le bais d’une politique durable. Interview d’un des nouveaux maires de la Côte-d’Or…
Dijon l’Hebdo : Comment Gevrey-Chambertin a-t-elle fait face à la crise sanitaire ?
Christophe Lucand : « C’est une situation particulière puisque nous sommes finalement une petite commune avec un peu plus de 3 000 habitants. Nous sommes un village mais avec une notoriété au niveau international qui dépasse largement celle des métropoles de grande taille. J’ai été élu le 15 mars et nous avons vécu une longue période où mon prédécesseur était encore présent. J’ai dû gérer à distance mais sans être réellement installé. Nous avons bien mené les choses. Nous avons su anticiper à la fois à travers la commune et la communauté de communes. Nous avons piloté un grand programme d’achat de masques et je suis très fier que l’on ait pu anticiper nos commandes et, à l’exception de Dijon métropole, personne n’a commandé et reçu ses masques avant nous. Pour la communauté de communes, ce fut ainsi 45 000 masques que nous avons pu distribuer. Ce fut plus de 6 000 à Gevrey-Chambertin et nous les avons reçus en temps et en heure. Même si la difficulté majeure a été, durant le confinement, la communication avec nos administrés, nous avons mis une ligne directe en place pour nos concitoyens. Les services municipaux se sont rendus au domicile des personnes les plus fragiles pour le portage des repas. Les courses, qui ont également été organisées par le CCAS, ont été assumées par des bénévoles, élus et non élus. Tout a bien fonctionné avec les gestes barrière, une sécurité maximale. J’ai le sentiment que cela a replacé la commune, qui est au plus près des habitants, au centre des acteurs décisifs. C’est essentiel et nous en avons bien besoin quand l’on voit l’abstention phénoménale partout en France pour les élections municipales. J’espère que cette pandémie aura contribué à montrer aux gens que les services publics de proximité, l’attention, la vigilance, la sécurité primordiale, c’est finalement la mairie qui les assume ! »
DLH : Voulez-vous dire que le message de l’Etat, dans sa déclinaison au plus près des citoyens, n’a pas toujours été audible ?
C. L. : « Entre les grandes annonces du président de la République, les interprétations par les ministères puis leur déclinaison sur le terrain, ce n’était plus du tout ce qui avait été préconisé. Et, même, le temps que cela arrive jusqu’à nous, une autre annonce était déjà intervenue. Cela été particulièrement pénible et cela interroge sur le fonctionnement du service public. On ne peut pas attendre une intervention du chef de l’Etat pour savoir si on a le droit ou non d’ouvrir une école ou d’emmener les enfants à la cantine. Je trouve cela stupéfiant ! »
DLH : Comment s’est passée sur votre territoire la levée du confinement ?
C. L. : « Déjà, nous n’avons pas eu à regretter de drames majeurs sur la commune. Notre maison de retraite n’a enregistré aucun décès et les choses se sont globalement bien passées pour la population. J’en suis très heureux. Lors du déconfinement, la ville a repris vie assez vite et plutôt assez bien. Lorsque l’on se promène dans les rues de Gevrey, on s’aperçoit que deux nouveaux commerçants se sont implantés. Une fleuriste de notoriété nationale a choisi notre commune pour s’installer alors qu’elle était très courtisée par d’autres villes. Un nouveau restaurant a vu le jour, des terrasses se sont ouvertes… si bien que nous avons assisté sur notre territoire à des signes de reprise économique et commerciale. On n’est pas revenu à 100% des affaires mais il y a des signes positifs. Et nous voyons circuler dans les rues un peu de touristes : tout d’abord des Dijonnais que l’on ne voyait jamais avant dans la côte de Nuits mais aussi les touristes européens qui commencent à revenir. Nous sommes dans une période de réveil après le confinement et je veux rappeler que nous sommes une ville dynamique avec plus de 2 000 emplois et un niveau d’équipements très élevé pour 3 000 habitants ! »
DLH : Quel est l’impact financier de la crise sanitaire sur vos finances communales ?
C. L. : « Le coût financier pour la commune est à relativiser : ce sont essentiellement les achats de masques, des heures d’agent. Nous assumons et ce n’est pas un problème majeur pour notre commune dont les finances sont saines malgré l’effondrement des dotations. En revanche, pour la communauté de communes, c’est infiniment plus dur puisque nous allons perdre entre 400 000 et 450 000 € eu égard à la crise sanitaire ».
DLH : Maintenant que vous êtes installés, vous allez pouvoir déployer votre programme. Quels sont vos projets majeurs pour les 6 ans à venir ?
C. L. : « Nous allons travailler sur deux piliers principaux. En premier lieu, le bien être des habitants. J’ai à cœur de développer les jardins, les fameux poumons verts inscrits dans mon programme. Gevrey-Chambertin représente une commune où il fait bon vivre mais où il n’y a pas suffisamment de petits jardins, d’espaces verts et de parcs municipaux qui puissent permettre à la population de se retrouver, discuter, échanger, faire jouer les enfants, etc. Nous avons un vrai programme du bien vivre pour les habitants. Le second pilier est le rayonnement de la ville. Nous avons certes une marque territoriale et un nom mondial mais nous ne l’exploitons pas assez. Ce rayonnement passe par l’ouverture de la Halle Chambertin le vendredi 10 juillet qui représente un espace touristique remarquable dédié à la promotion de la ville, du village et des climats de Bourgogne. C’est un projet que j’ai porté et que nous avons fait aboutir avec pas moins de 32 vignerons en un temps record. D’un coût total de 519 481 €, cette Halle que nous avons faite ensemble comprend l’Office de tourisme, une œnothèque et une boutique sur les deux thématiques très importantes pour nous : le vin bien sûr mais aussi la nature, car nous avons une réserve naturelle nationale, la Combe Lavaux-Jean Roland, avec des espèces rares et uniques au monde (voir encadré). Bien être et rayonnement de la ville, voici les deux enjeux majeurs que j’ai fixés dans un programme qui, au demeurant, compte tout de même pas moins de 80 engagements. Et ce, en ayant pris celui de ne pas augmenter la fiscalité durant tout le mandat. C’est le défi que nous allons relever ! »
DLH : Gevrey-Chambertin (et vous-même) a fait le choix de se tourner vers Nuits-Saint-Georges pour écrire son destin intercommunal. Vous êtes pourtant aux portes de Dijon métropole, le plus grand pôle en terme d’attractivité de la région… Cet entre-deux est-il un avantage ou un inconvénient ?
C. L. : « Le train nous place à 9 mn de la gare de Dijon Ville et nous avons 15 arrêts par jour. Si bien que nous pouvons rapidement rejoindre le tram. Nous sommes véritablement une entrée de la porte Sud de la métropole. Je regrette pour ma part que tout bascule au Nord : les hôpitaux, les centres commerciaux. Depuis que la clinique de Chenôve n’est plus, il faut se rendre à Valmy. Si on veut un hyper, hors Quetigny, il faut également se rendre au Nord… Il faut espérer que cela change et que le basculement s’oriente plutôt vers le Sud. C’est un atout d’être en proximité de Dijon. Nous venons de rencontrer l’Office de tourisme de la métropole et j’espère que nous pourrons avancer ensemble. Dijon est une énorme locomotive et nous, nous possédons un nom. Sur un package de 3 ou 4 jours à Dijon, un passage à Gevrey peut être un plus en flirtant, chez nous, avec les Climats de Bourgogne et les Grands Crus. Nous sommes, je tiens à la rappeler, la ville en France qui possède le plus de dénominations dites Grands Crus (ndlr : Gevrey en possède 9 sur les 24 au total de la côte de Nuits). Nous aurons bientôt nos panneaux sur l’autoroute. Cela peut être un véritable plus et nous pourrions ainsi profiter d’une synergie avec Dijon ! ».
Propos recueillis par Camille Gablo
La Halle Chambertin… à déguster
Afin de favoriser le rayonnement touristique, synonyme de retombées économiques pour l’ensemble de sa commune, le maire et président de la communauté de communes, Christophe Lucand, inaugure le 10 juillet un espace contemporain qui fait la part belle au vin et à la nature. En lieu et place de l’ancienne mairie, à quelques pas d’un des emblèmes gastronomiques de la Bourgogne, le restaurant Chez Guy and Family, la Halle Chambertin participera à la promotion du vignoble mais aussi de la Réserve naturelle nationale Combe Lavaux-Jean Roland. A la fois ludique et pédagogique, elle proposera notamment une œnothèque élaborée en partenariat étroit avec les viticulteurs locaux. Au cœur des Climats de Bourgogne, classé au Patrimoine mondial de l’Unesco, ce futur haut lieu du tourisme permettra de rappeler que Gevrey-Chambertin, qui déroule le tapis rouge au pinot noir, représente une référence mondiale pour la viticulture de terroir.
La Halle Chambertin, nouvel espace touristique faisant la promotion du vin et de la nature qui sera inauguré le 10 juillet, tient particulièrement à cœur le maire Christophe Lucand. Il faut dire qu’il a rédigé plusieurs ouvrages sur l’histoire du vin