Martin Mignot : « Au début, les locaux de Deliveroo étaient installés dans un sous-sol »

Investisseur depuis 10 ans dans la plus grande société d’investissements européenne, le Dijonnais Martin Mignot a misé sur plusieurs start-ups aujourd’hui mondialement connues. Il nous explique les ficelles de son métier.

Dijon l’Hebdo : Vous êtes investisseur chez Index Ventures, société londonienne, comment se déroulent les recherches pour dénicher des start-ups prometteuses ?

Martin Mignot : « Certaines nous contactent directement et, de notre côté, nous faisons des recherches. Nous sommes notamment en lien avec d’autres investisseurs qui s’occupent davantage des entreprises tout juste nées tandis que nous intervenons quand une petite équipe est déjà en place ».

DLH : Votre travail consiste donc à fournir des fonds quand un projet vous intéresse ?

M. M : « Oui mais pas seulement. Les entreprises étant très jeunes quand nous investissons, nous nous impliquons beaucoup dans leur développement. Nous prenons généralement une place au conseil d’administration, et aidons les entrepreneurs au quotidien avec le recrutement de leurs équipes, la mise en relation avec des clients potentiels, le développement international… »

DLH : Ensuite vous touchez des bénéfices en fonction de la réussite ?

M. M : Oui et nous sommes à 100 % alignés avec les entrepreneurs puisque nous n’utilisons jamais de dette et sommes de simples actionnaires minoritaires. Si l’entreprise fonctionne, tout le monde est gagnant, sinon tout le monde est perdant ».

DLH : Vous visez quels types d’entreprises ?

M. M : Nous avons deux fonds : l’un pour aider certaines enseignes à démarrer, l’autre pour des sociétés plus importantes et qu’on aide à se développer. Notre objectif est de rentrer le plus tôt possible au capital d’une société et de l’accompagner jusqu’à une introduction en bourse. Nous investissons principalement dans des entreprises de software et de services internet/mobile.

DLH : Quelles start-ups ont émergé grâce à vous ?

M. M : « Deliveroo » en est une, on ne l’imagine pas aujourd’hui mais quand je les ai rencontrés, ils n’étaient que huit employés et leurs locaux étaient installés dans un sous-sol sans fenêtre qu’ils occupaient car il était en instance de démolition et donc gratuit ! Ils ne livraient que dans un seul quartier de Londres… Et maintenant dans plusieurs dizaines de pays. Il y a aussi eu « Blablacar » qui était déjà connu mais nous les avons accompagnés pour le développement international et la diversification de produits, la banque en ligne « Revolut », « Trainline », « Criteo »… »

DLH : Londres est plus dynamique que Paris dans ce domaine ?

M. M : « Il y a quelques années, c’était le cas mais plus maintenant. Depuis cinq ou six ans l’entreprenariat tech en France a décollé grâce à un changement de mentalité qui pousse à monter son entreprise, il y a aussi un plus grand accompagnement des entrepreneurs et puis des capitaux sont arrivés sur le marché. Car en France nous avons tous les ingrédients pour réussir dans ce domaine : des bons ingénieurs et des grands groupes possiblement acheteurs de nouvelles solutions ».

DLH : Quelles qualités sont nécessaires pour exercer ce métier ?

M. M : « Mes études à Sciences Po Paris option finances m’ont d’abord aidé à comprendre ce milieu, même si je suis d’avis que la finance devrait être enseignée dès le lycée mais c’est un autre débat. Ensuite, l’appétence pour l’entreprenariat est un ingrédient indispensable et, pour ça, je pense que mon père entrepreneur m’a beaucoup motivé et inspiré. Enfin, il faut avoir une curiosité tournée vers le futur, se demander comment on vivra dans quelques années, comment les technologies seront utilisées, comment, par exemple, le monde bancaire ou les sciences vont évoluer… »

DLH : Où vous verra-t-on dans quelques années ?

M. M : « Au même endroit. Je ne vois pas de meilleur boulot pour les compétences que j’ai, j’adore ce que je fais et tout dans ce métier me passionne ».

Propos recueillis par C. C