Dijon Congrexpo qui gère le Palais des congrès et le Parc des expositions de Dijon est évidemment frappée de plein fouet par la crise générée par le COVID-19. Pour autant, Jean Battault, son président, garde un moral intact et le souci constant d’aller de l’avant. Entre bonnes et mauvaises nouvelles, il fait le point de son activité.
Dijon l’Hebdo : Dijon Congrexpo qui gère le parc des expositions et congrès de Dijon vient d’obtenir la certification ISO 20121. Une bonne nouvelle qui ne tombe pas au meilleur moment mais qui vient un peu réchauffer l’ambiance délicate que vous vivez en cette période de crise sanitaire et économique ?
Jean Battault : « C’est incontestablement une très bonne nouvelle qui, en temps normal, aurait été fêtée comme il se doit. C’est le fruit d’environ deux ans de travail qui ont précédé cette certification qui a une visée stratégique sur un plan économique mais aussi environnemental. Cette certification n’aurait pas pu être acquise sans une volonté très forte de la direction, sans la mise en place de personnes clés, et sans beaucoup de pédagogie. Cela ne concerne pas seulement les personnels de Dijon Congrexpo mais aussi tous nos prestataires de services, tous nos fournisseurs… qui doivent aussi se mettre dans les conditions de la norme ».
DLH : Concrètement qu’est-ce que va vous apporter une telle certification ?
J. B : « D’abord une gestion efficiente de tous nos consommables. On a du mal à croire que la Foire génère plusieurs dizaines de tonnes de déchets. Mais cela va au-delà de ça : cela concerne aussi tout ce qui touche à l’énergie, les consommés dans les services administratifs, les services techniques qui montent les stands… Il y a une grande vigilance qui est précédée d’une réflexion. Car derrière la dimension environnementale, il y a l’intérêt économique ».
DLH : Voilà déjà plusieurs années que vous travaillez sur cette thématique RSE – responsabilité sociale des entreprises. Quels objectifs cherchez-vous à atteindre ?
J. B : « Je vais commencer par un constat : la mairie de Dijon a clairement affirmé sa volonté de gestion environnementale. Il était donc indispensable de se mettre dans les pas de cette démarche. Ensuite, ce qui me semble important, c’est cette prise de conscience qui veut que toute décision prise à l’intérieur de l’entreprise a un impact sur le personnel, les clients, les fournisseurs… sans oublier l’impact sur les riverains. Toute décision de gestion doit être regardée sous l’aspect des conséquences sur l’environnement. Cela nous amène naturellement à des schémas de pensée qui sont différents. Nous touchons là à la notion de responsabilité que revendique tout chef d’entreprise ».
DLH : Comment Dijon Congrexpo s’est-elle organisée face à cette crise générée par le Covid-19 ? Vos personnels sont-ils en chômage partiel ou bien en télé-travail ?
J. B : « Nous sommes dans le secteur de l’événementiel qui subit de plein fouet cette crise sanitaire. Plus rien ne se passe. La conséquence, elle est facile à mesurer : plus aucune ressource. Il a donc fallu prendre les mesures idoines : mettre le personnel en chômage partiel. Par contre, notre équipe de direction est focalisée sur les deux événements majeurs à venir, à savoir la Foire internationale et gastronomique et Florissimo. C’est désormais notre priorité ».
DLH : Combien avez-vous enregistré d’annulations de manifestations programmées au Palais des Congrès depuis le début de la crise ?
J. B : « 33 événements ont été annulés, 16 reportés au second semestre 2020 ou en 2021. C’est une perte de 67 % de chiffre d’affaires par rapport à l’exercice précédent. Dans notre année commerciale, le premier trimestre ne nous rapporte rien. Il n’y a pas de congrès en janvier. Il y a très peu de manifestations. Notre activité débute véritablement dans le second trimestre. En intégrant le report d’événements sur le deuxième semestre, on peut estimer, s’ils peuvent se tenir, la perte annuelle de chiffre d’affaires au minimum à 40 % par rapport à notre budget. Il est difficile d’évaluer avec précision l’ampleur du déficit dans la mesure où on ne connaît pas précisément la date des reprises. On sait très bien que la date du 11 mai ne marque que le début du déconfinement ».
DLH : La Foire internationale et gastronomique pourrait donc être menacée ?
J. B : « On voit les dates de la Foire arriver et on ignore aujourd’hui dans quelles conditions elle pourra se tenir et s’il y aura des restrictions. La Foire, c’est un grand moment festif dont toute la population a besoin. C’est surtout une manifestation qui a une énorme incidence économique sur l’ensemble de la communauté urbaine de Dijon. Les retombées, nous les estimons à dix millions d’euros sur les hôtels, restaurants, taxis, magasins…C’est énorme. Et je n’intègre pas les billets TGV des congressistes. Pour nous, la Foire est vitale. Elle représente 60 % du chiffre d’affaires de l’année ».
DLH : Maintiendrez-vous un hôte d’honneur comme vous le faites chaque année ou bien considérerez-vous que le plaisir de faire la foire se suffira à lui-même ?
J. B : « Je maintiens l’hôte d’honneur en choisissant un pays qui est connu pour son côté chaleureux. Ce sera l’Irlande dont chacun connaît ou a entendu parler de la chaleur de ses pubs où on boit, on chante, on parle à tout le monde… C’est un pays qui tombe à pic.
Il n’y a pas de vin irlandais. Il n’y aura donc pas de Vinidivio. Et on ne le remplacera pas par un Whiskydivio ou un Bierredivio… On fera une manifestation spécifique sur le thème « Bière et gastronomie ».
Cette prochaine édition de la Foire verra se renforcer le nombre d’exposants locaux pour donner encore un meilleur reflet de l’activité agro-alimentaire de la région.
Après tout ce qu’on aura vécu ensemble, il y aura un grand besoin de convivialité et quoi de mieux que le premier événement festif et populaire de Bourgogne – Franche-Comté ? Aussi j’ai pris l’initiative d’inviter l’ensemble des membres du personnel du CHU pour leur exprimer notre reconnaissance et nos remerciements. Dijon Congrexpo a par ailleurs décidé d’apporter son concours financier au projet de recherches sur les réponses immunitaires spécifiques des pneumopathies graves récemment lancé à Dijon par un jeune médecin infectiologue.
Le coronavirus aura montré un formidable élan d’entraide qui fait plaisir à voir. Il fallait qu’on apporte notre pierre ».
DLH : Qu’est-ce que vous inspire cette crise profonde que nous traversons ? Et la gestion qui en est faite vous semble-t-elle être la bonne ?
J. B : « Les chefs d’entreprise, les entrepreneurs ont été exemplaires dans cette crise. Tout le monde dit « il y aura un avant, il y aura un après » et moi ce que je voudrais c’est que cet « après » soit bien inspiré. Je pense notamment à une refonte du code du travail et y voir retiré tout ce qui crée une suspicion systématique vis à vis des employeurs. Ce serait un changement de tonalité important. Ensuite, la France s’endettant comme elle s’endette, il va falloir produire de la valeur ajoutée. Et pour produire de la valeur ajoutée, il faut travailler plus. Je verrai bien un « 35 heures à l’envers » où on valorise le travail dans tous les sens du terme. Recréer du pouvoir d’achat mais surtout mettre le travail comme une valeur essentielle dans l’existence des gens. On voit très bien ce que cela fait actuellement d’être privé de travail.
Quant à la gestion de la crise, il m’est difficile d’en faire un commentaire dans la mesure où je ne dispose pas de tous les éléments. Nous sommes dans un pays où il y a 63 millions de sélectionneurs pour l’équipe de France de foot. On découvre aujourd’hui qu’on a aussi 63 millions d’infectiologue. Le dernier discours du Président, fait d’humilité et d’altruisme, est un bon repère. Sur le plan organisationnel, je pense qu’il faut retourner au travail le plus rapidement possible avec bien évidemment les précautions qui conviennent. On ne peut pas rester dans cette situation ».
Propos recueillis par Jean-Louis Pierre