Isabelle Grandin : « Notre secteur est très impacté ! »

L’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie de la Côte-d’Or (UMIH 21) regroupe quelque 600 adhérents qui subissent de plein fouet la crise sanitaire. La très grande majorité d’entre eux ont dû fermer leurs portes le samedi 14 mars à minuit… En contact permanent avec eux depuis le début du confinement, la secrétaire générale de l’UMIH 21, Isabelle Grandin, n’a de cesse de les épauler et de les rassurer. En période d’inactivité de ses professionnels… l’UMIH est on ne peut plus active !

Dijon l’Hebdo : Comment vos adhérents vivent-ils cette période compliquée ?

Isabelle Grandin : « C’est plus que compliqué ! La situation est aujourd’hui dramatique pour certains. Financièrement, ils étaient tous avec des trésoreries plus que tendues. J’ai une pensée particulière pour ceux qui ont acheté récemment des établissements ou encore ceux qui devaient ouvrir durant cette période de confinement. Nous attendons des mesures fortes pour pouvoir les rassurer. Cela serait susceptible de leur redonner une certaine confiance en l’avenir qu’ils n’ont plus actuellement car ils ne savent pas quand ils pourront rouvrir. Et, le jour où ils pourront à nouveau accueillir des clients, peut-être que le gouvernement limitera le nombre de personnes parce que qui peut imaginer que l’on puisse renvoyer du jour au lendemain des millions de personnes dans tous les établissements après une épidémie comme le Coronavirus ? Personne ne sait quand lactivité économique redémarrera ! »

DLH : Comment faites-vous pour maintenir le lien avec l’ensemble des professionnels du secteur durement frappés par la crise sanitaire ?

I.G. : « En télétravail depuis le début du confinement, j’anime notre page Facebook ainsi que notre site Internet (www.umih21.fr) que j’actualise régulièrement. Nous avons créé une rubrique spéciale Coronavirus sur notre site afin de les informer en continu. Les adhérents me joignent par téléphone ou par mails. Mon rôle est surtout de les aider dans leurs démarches, de leur donner les dernières informations, les aides auxquelles ils ont droit, de les conseiller au mieux, de faire des enquêtes sur leur situation, afin davoir des chiffres locaux sur limpact de cette crise. Nombre d’entre eux sont confrontés à des bugs sur les plateformes numériques. C’est ainsi le cas lorsqu’ils doivent réaliser leurs déclarations auprès de la Direccte pour le chômage partiel. Ces dysfonctionnements suscitent évidemment des tensions. Ils m’appellent naturellement en me disant que cela ne fonctionne pas, aussi dois-je régulièrement faire le tampon et surtout les rassurer. Ils sont en effet plus qu’anxieux et c’est bien normal étant donné que la mesure de fermeture de leurs établissements leur est tombée brutalement dessus. Le 14 mars, ils ne l’ont sue que quelques heures seulement avant. Cela a évidemment posé des problèmes dans la mesure où la majorité n’ont pas réussi à se retourner. Je pense notamment aux restaurateurs et à ce qu’ils avaient en stock dans les chambres froides. Pour le personnel aussi, cela a été particulièrement brutal ».

DLH : Comment les professionnels de l’hôtellerie et de la restauration perçoivent-ils l’action gouvernementale les concernant ?
I.G. : « Le gouvernement, qui communique beaucoup, a l’air d’être à l’écoute des professions que nous représentons. Cependant, souvent, les mesures sont annoncées mais nos adhérents doivent attendre les modalités d’application que certains ne manquent pas de juger tardives. Et il est nécessaire de patienter jusqu’à la publication de ces décrets pour savoir réellement comment les mesures vont être mises en pratique. Nous nous battons aussi bien pour les droits des employeurs que de leur personnel ».

DLH : Beaucoup des professionnels de votre secteur jouent également la carte de la solidarité…

I. G. : « La profession est solidaire. Pour la très grande majorité des professionnels, les activités ont malheureusement cessé. Que ce soit les restaurants, les cafés ou les bars ambiance musicale, tous ont fermé leurs portes. Ajoutons à cela la peur panique dans les hôtels vis à vis des salariés dont les professionnels, qui ne disposaient pas des EPI (équipements de protection individuelle) – on l’a bien vu avec les masques qui manquaient déjà dans les hôpitaux ! –, ont privilégié la santé et la sécurité. C’est la raison pour laquelle la très grande majorité des établissements hôteliers sont aussi fermés. Ceux-ci souffrent également des annulations en cascade enregistrées sur les mois d’avril, de mai mais aussi de juin. Cependant, des hôtels sont tout de même restés ouverts afin de participer à l’accueil des personnels soignants. Certains restaurateurs sont aussi impliqués afin de franchir au mieux cette épreuve du Coronavirus. Je fais référence à ceux qui font de la vente à emporter pour le personnel soignant en priorité. Ils permettent aussi de rendre service à la population confinée des communes où ils sont implantés. Ceux-ci méritent d’être salués : je pense à l’Atelier de Sophie à Mirebeau-sur-Bèze, à l’Agastache à Volnay, au Château de Courban, au Pinocchio à Auxonne ou encore au Noti et aux Remparts à Dijon, Dans la capitale régionale, plusieurs ont essayé, à l’instar du Café Gourmand ou de la Brasserie des Loges, mais malheureusement ils n’avaient pas suffisamment de commandes pour maintenir ce service, si bien qu’ils ont abandonné au bout de quelques jours. Sachez également que Jean-Bernard Jacques, propriétaire de la Brasserie Le temps des Ducs, place de la Libération à Dijon, fabrique gratuitement des kits de protection pour les commerçants avec son autre société Gringos Production basée à Genlis (voir page suivante) ».

DLH : L’UMIH se multiplie sur tous les fronts pour épauler ses adhérents…

I.G. : « L’UMIH est on ne peut plus active : nous avons par exemple réussi à obtenir pour l’ensemble de notre secteur une suspension de la part de la Sacem de toutes ses factures. La mutuelle santé et prévoyance de la profession ne va non plus prélever pour le deuxième trimestre 2020. L’UMIH est également montée au créneau pour le chômage partiel. Le gouvernement ne reconnaissait dans ce cadre-là que les 35 heures, or, dans notre activité, nous sommes sur un régime de durée conventionnelle de 39 heures. L’UMIH a réussi à obtenir gain de cause sur cette question avec la publication d’un décret du gouvernement en date du 25 mars. La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, a véritablement été à l’écoute des arguments de l’UMIH et, grâce à cela, les salariés ne perdront pas environ 10% de leur rémunération ».

DLH : Les collectivités locales ont-elles été également sollicitées ?

I.G. : « J’ai reçu beaucoup d’appels de nos adhérents s’interrogeant sur ce que les municipalités allaient faire quant aux droits de terrasse. Les Villes de Dijon et de Beaune ont été à l’écoute de nos revendications, en ce qui concerne les droits d’occupation du domaine public. Nous leur sommes reconnaissants. C’est un geste fort, qui pourrait s’étendre à toute l’année 2020 comme nous le souhaitons, afin d’aider l’ensemble de nos professionnels qui, il faut le savoir, regarde le ciel en désespérant. Imaginez que, paradoxalement, la météo clémente n’arrange rien. Chacun se désespère en voyant le soleil au zénith puisqu’il se dit que, dans une situation normale, l’activité aurait été particulièrement forte ! Les terrasses auraient forcément été prises d’assaut ! »

DLH : Quel message souhaitez-vous adresser à l’ensemble de vos adhérents qui nous lisent très régulièrement alors que le confinement se poursuit ?

I.G. : « A distance, je reste disponible pour aider nos adhérents. Notre cellule de crise est à leur disposition. Une rubrique spéciale Coronavirus sur notre site Internet les informe également au quotidien. Nous pouvons répondre aux interrogations qu’ils se posent. Nous demandons que le gouvernement reconnaisse l’état de catastrophe sanitaire afin que les banques indemnisent la perte d’exploitation, certaines assurances ont remboursé la perte des matières premières et jincite les professionnels à en faire la demande. Il faut aussi à tout prix que les assurances soient solidaires… Je veux absolument rassurer nos adhérents en leur disant qu’ils ne sont pas isolés, que l’UMIH est à leur écoute. Ils peuvent compter sur nous pour les soutenir et nos nombreuses démarches vis-à-vis de lEtat et des collectivités montrent que nous défendons tout un secteur. Il faut rester optimiste, lavenir est devant nous, ce sera long, il faut sarmer de patience. Avec le télétravail, je suis encore plus au travail qu’à l’accoutumée… »

Propos recueillis par Camille Gablo

www.umih21.fr