Le maire d’Ahuy, Dominique Grimpret, est sur le pont afin de franchir au mieux la crise sanitaire. Il a ainsi pris l’initiative de proposer, via Facebook, aux routiers de bénéficier des infrastructures de sa nouvelle salle des fêtes afin qu’ils puissent faire une pause dans les meilleures conditions. Et, pour ses concitoyens, il s’active au quotidien.
Dijon l’Hebdo : Pouvez-vous nous dire comment se déroule la journée d’un maire d’une commune de la taille d’Ahuy en pleine crise sanitaire ?
Dominique Grimpret : « Après m’être occupé de l’entreprise, je passe le matin à la mairie. J’ai toujours un ou deux arrêtés à signer ou un peu d’administratif à faire. Nous sommes très concentrés, comme tout le monde, face au Covid-19. J’ai ainsi dû par exemple solutionner les problèmes rencontrés par une dame diabétique qui ne pouvait plus aller acheter ses médicaments parce que les bus ne passent plus. C’est ma femme qui s’est rendue à la pharmacie. Ou encore répondre à la demande de ce chauffeur routier de Metz qui a souhaité venir à la salle des fêtes pour prendre une douche. J’irai lui ouvrir et lui offrir le café ou une autre collation… Je fais également 2 à 3 rondes dans la journée en voiture ou à vélo afin de pouvoir constater si tout se passe bien. J’ai ainsi pu voir que les mesures de confinement sont très bien respectées à Ahuy ».
DLH : La distanciation sociale ainsi que les gestes barrière sont-ils également respectés ?
D. G. : « La boulangerie sur la place du village ainsi que l’épicerie du café Au bon Vin sont toujours ouverts. Dans ces deux commerces, la distanciation est particulièrement bien respectée. Les gens sont souvent à plus d’un mètre. Ils ont véritablement pris conscience du danger. C’est une première dans notre histoire. C’est phénoménal ce que nous vivons. Réussir à faire rester chez lui tout un peuple, que je qualifierais de plutôt rebelle, ce n’est pas évidemment. Les rues sont vides dans la métropole. Tout le monde a pris cela très au sérieux ».
DLH : Comment avez-vous organisé le travail des agents municipaux ?
D. G. : « Nous avons deux secrétaires de mairie. Afin de limiter a maxima les risques, elles ne se croisent pas et travaillent alternativement un jour sur deux. Nous n’arrêtons pas également de passer du produit partout. Les agents techniques œuvrent aussi de façon alternative. Pour ce qui concerne les personnels périscolaires, ils sont chez eux… »
DLH : Avez-vous eu beaucoup de demandes quant au dispositif que vous avez mis en place afin d’aider les transporteurs routiers ?
D. G. : « J’ai, en effet, proposé via les réseaux sociaux d’accueillir les routiers. Cette initiative a recueilli 6 000 partages sur Facebook mais nous ne devons pas être sur un axe très intéressant pour les transporteurs car je n’ai eu, après, que peu de demandes. Le principal, c’est que les routiers sachent qu’ils peuvent s’arrêter dans notre commune et bénéficier des trois douches de notre salle des fêtes L’Aqueducienne ».
DLH : Comment avez-vous fait pour conserver le lien avec vos habitants, et notamment avec les personnes âgées ?
D. G. : « J’ai demandé au Centre communal d’action sociale (CCAS) de téléphoner régulièrement aux personnes âgées ou aux personnes seules afin de voir si elles ont un besoin particulier »
DLH : La solidarité est-elle aussi de mise dans votre commune afin de vaincre le Covid-19 ?
D. G. : « Dans notre commune, la solidarité se manifeste entre voisins. Beaucoup s’entraident, notamment pour les courses. Les habitants d’Ahuy sont véritablement solidaires. J’espère pour ma part que l’on en tirera les enseignements pour après ».
DLH : Autrement dit, vous partagez l’analyse du président de la République, Emmanuel Macron, lorsqu’il dit que « plus rien ne sera comme avant » ?
D. G. : « Nous ne savons pas déjà si le monde d’après sera différent ou non ! Cependant nous pouvons espérer que des choses vont évoluer. Nous étions tout de même un peu en surrégime avant. Un seul exemple : il n’est pas normal que dans des grandes entreprises les salaires passent de 1 à 10 000 alors qu’en 1980 cette échelle était de 1 à 100. Il ne faut plus avoir des gens à 1 000 euros pendant que d’autres gagnent 1 million d’euros ! Ce n’est plus possible… Il faut trouver des rapports plus acceptables pour tout le monde. Je suis favorable au libéralisme mais pas à l’ultralibéralisme. Il faudra revenir un peu en arrière. En ce qui concerne le rapport entre les gens, je pense qu’après se fera jour la volonté de se retrouver. J’ai d’ailleurs proposé une idée à mes colistiers. Chaque année, nous avions habituellement des repas de quartier où les habitants viennent avec leur repas et leur boisson. Cela permettait de passer de vrais moments de partage. Dès la fin du confinement, je souhaiterais organiser, au cours de l’été, un repas de village sur notre belle place. Tout le monde sera enchanté, je pense, de pouvoir à nouveau échanger. Ce sera un événement important… »
DLH : En tant que chef d’entreprise, n’avez-vous pas des craintes quant à la reprise économique ?
D. G. : « L’économie m’inquiète bien évidemment. Comment va-t-on pouvoir s’en remettre ? Est-ce que 100 euros de 2019 et 100 € de 2021 auront la même valeur ? Est-ce que l’économie va repartir et, si oui, dans quelles conditions ? Quels secteurs nécessiteront d’être plus relancés que d’autres ? Les interrogations sont nombreuses ! »
DLH : Quel bilan faites-vous de la gestion gouvernementale de la crise sanitaire ?
D. G. : « La gestion de la crise par le gouvernement est, à mes yeux, exceptionnelle. L’intervention du Premier ministre Edouard Philippe le 28 mars aux côtés du ministre de la Santé et des professeurs de médecine a été, par exemple, remarquable. Cette intervention a été des plus explicatives. Pour ma part, je pense que nous n’avons pas en France aujourd’hui une opposition à la hauteur de notre gouvernement. Plutôt que d’être dans la critique systématique, elle ferait mieux de reconnaître que les choses sont faites au mieux. Regardons juste en face la situation des masques : il n’y a pas un pays au monde qui n’a pas manqué de masques ! A mon avis, on ne pouvait pas faire mieux. Imaginez si, en 2017, juste après son élection, Emmanuel Macron avait dit : « J’achète un milliard de masques ». Qui ne l’aurait pas alors jugé complètement fou ! Personne ne pouvait anticiper cette crise qui est une première à l’échelle mondiale… Le gouvernement tient la route, à l’instar des directeurs de service concernés au premier chef par la crise sanitaire ».
DLH : Quels seront les enseignements à tirer de cette crise mondiale sans précédent ?
D. G. : « Nous ferons les comptes après mais je pense que la France devrait apparaître à l’issue comme l’un des pays où la crise aura été le mieux gérée. Ce sera grâce au gouvernement mais aussi grâce à la structure médicale organisée dont nous disposons. Quand c’est bien fait, il faut le dire. Aujourd’hui, face au Covid-19, il faut s’accrocher ! Le soleil finira par se lever et nous reprendrons le cours de notre vie. Peut-être apprécierons-nous mieux la vie au quotidien après le coronavirus ? Il faut apprécier chaque moment à chaque instant ! »
Propos recueillis par Camille Gablo