Histoires insolites de la littérature

Dans cet ouvrage, où l’érudition reste à la portée de tous, Gérard Durozoi, auteur de livres de critique littéraire et d’histoire de l’art moderne, invite le lecteur à entrer par effraction dans cette inépuisable réserve de surprises qu’est l’univers des livres et des bibliothèques.

Il met en évidence les stratagèmes, les supercheries, les hasards, les coïncidences, les passions et les entêtements qui ont permis l’acheminement jusqu’à nous des textes constitutifs du patrimoine de l’humanité.
Il y envisage tous les aspects du livre : le texte (éventuellement absent) et sa langue (inventée, naturelle ou se voulant universelle),  son auteur (fictif, anonyme, dissimulé), son public espéré (du bibliophile averti aux enfants), sa conservation (parfois bien problématique), ses relations avec d’autres écrits et ses usages plus ou moins convenus. 

Il n’omet ni ses illustrations (luxueuses ou non) et leurs rapports variables avec les mots qui les suscitent, ni la reliure (du métal à la peau humaine), ni les représentations picturales,  ni le façonnage de ses pages (parfois découpées en fonction de différentes intentions) pas plus qu’il n’oublie d’évoquer leurs tranches (peintes, gravées).
Comme dans un cluedo, l’auteur articule son propos à partir de questions irrésolues : de la paternité d’une œuvre (Homère, Molière, Shakespeare, Ossian) aux trésors perdus (les Manuscrits de la mer morte, la bibliothèque d’Alexandrie) ; des livres interdits (Sade) aux lectures qui fourvoient (le lai d’Aristote) ; des emplois détournés aux usages imprévus ; du livre-objet (Depero, Exter) au livre-question (Borges, Ghérasim Luca) ses « Histoires insolites du patrimoine littéraire » se lisent comme autant d’enquêtes passionnantes.
Libre à vous ensuite de continuer la quête pour découvrir à votre tour des textes curieux, des bibliothèques improbables, et des modes d’écriture profitant des multiples relations que l’auteur peut entretenir avec le public.

Occasion de rappeler qu’il y a immense profit à relire Pascal Pia et ses « Feuilletons littéraires », André Blavier et ses « Fous littéraires » et plus près de nous la somme époustouflante du Dijonnais Guy Costes et de son compère Joseph Altairac, « Rétrofictions » (Belles Lettres/Encrage), deux volumes et près de 2 300 pages consacrées aux récits de « conjecture rationnelle romanesque » de Rabelais à Barjavel, quatre siècles de songes et d’anticipation déclinés sous toutes les formes possibles, du buvard publicitaire au film long-métrage en passant par le roman, la nouvelle, le poème, la pièce de théâtre, etc.

« Amis de la littérature, bons désoeuvrés qui sans émoi flânez à cette devanture, entrez, payez, emportez moi ! » ( Georges Fourest )

Pierre P. Suter