Du 1er au 13 mars, le président de Vitagora, Pierre Guez, s’est rendu au Mexique pour un voyage d’agrément. Afin de vous aider à vous échapper du confinement, nous lui avons demandé ses impressions de voyage dans ce pays qui n’était, à l’époque, pas encore impacté par le Covid-19. L’ancien directeur général de Dijon Céréales en profite pour remettre « l’église (l’agriculture et l’alimentation) au cœur du village » et pour appeler à une remise en question de notre société à l’issue de la crise sanitaire. Interview… en espagnol !
Dijon l’Hebdo : Avant un retour difficile en France – nous étions déjà dans les prémices du coronavirus –, ce voyage s’est-il apparenté à une véritable bouffée d’oxygène ?
Pierre Guez : « Nous avons eu de la chance. Il n’y avait au Mexique aucun souci concernant le coronavirus. Nous n’en entendions pas parler et, comme vous le savez parfaitement, lorsque l’on ne veut pas chercher, l’on ne trouve rien. A tel point que mes enfants m’écrivaient, par textos, de rester un mois supplémentaire au Mexique parce que cela commençait d’être critique en France.
Nous avons fait un voyage formidable. Nous avons été reçus à Mexico par le fils d’un de mes amis minotier dans le Doubs. Présent au Mexique depuis 15 ans, notre hôte Mathieu a créé une entreprise de production de jus de fruit bio, Campo Vivo, mais aussi quatre boulangeries sous l’enseigne La Bohème qui cartonnent aujourd’hui. Pour ma part, c’était la première fois que je me rendais là-bas et j’été enchanté par ce que j’ai découvert. Nous étions en plein cœur de la capitale, en face du plus bel ouvrage, la cathédrale. Nous avons parcouru les rues, puisque nous n’étions en aucun cas dans la crainte du Covid-19. Nous nous sommes rendus ensuite dans le Chiapas et nous sommes tombés sur une guide archéologue et anthropologue incroyable qui nous a immergés dans les communautés d’indiens. Avec elle, le voyage a pris une autre tournure… Je conserverai un souvenir impérissable, par exemple, des temples mayas. Une première pour moi pour qui les Mayas, dans ma culture agricole, renvoient au maïs. N’ont-ils pas ainsi créé Yum Kaax, le dieu du maïs, associé à la vie et à l’abondance ! J’ai découvert ce peuple mexicain Maya d’une gentillesse incroyable et la culture espagnole. Nous avons terminé notre périple dans le Yucatan plutôt qu’à Cancun, l’Acapulco mexicain. C’était une ambiance extraordinaire ! »
DLH : Votre retour s’est-il effectué sans souci ?
P. G. : « Nous n’avons eu, le jeudi 12 mars, aucun problème pour reprendre l’avion à Cancun et revenir à Roissy. Nous sommes passés très facilement à l’aéroport. J’avais déjà quelques craintes avant de partir et j’avais hésité à annuler, de peur de ne pouvoir rentrer. Les sueurs froides ont évidemment commencé à notre retour en France où la situation s’était considérablement dégradée depuis notre départ ».
DLH : Que retenez-vous de votre périple mexicain ?
P. G. : « J’ai découvert un état qui fonctionne comme nous il y a 30 ans, où le cercle familial est encore essentiel. J’ai eu la chance de beaucoup voyager dans le monde mais lorsque l’on se retrouve dans ce type d’ambiance, dans cette culture espagnole, cela fait sincèrement chaud au cœur. C’est aussi là que l’on voit que notre société a trop dérivé, avec la montée de l’individualisme, du chacun dans son coin. Pour moi, il y aura un avant et un après le coronavirus… Nous avons devant nous encore X semaines difficiles mais, une fois que l’on en sera sorti, il faut que l’on réfléchisse sérieusement au phénomène de la mondialisation galopante. Nous devrons tirer les leçons de ce qui se passe. Nous sommes allés trop loin… »
DLH : Vous pensez notamment à la situation de l’agriculture…
P. G. : « Je n’oublie pas en effet mon rôle de président de Vitagora. Depuis le début de cette crise, nous redécouvrons les valeurs importantes que sont l’agriculture et l’alimentation. Là, comme par hasard, nous n’entendons plus parler d’agribashing ou du glyphosate par exemple. Il est nécessaire de remettre aujourd’hui l’église au milieu du village. L’agriculture n’est pas délocalisable – c’est la plus belle des choses – et il faut que le président de la République la soutienne dorénavant ! »
Propos recueillis par Camille Gablo