Décidément, il est beaucoup question d’élections ces temps-ci. Un mois environ avant les municipales, un autre scrutin occupera le haut de l’affiche sur Dijon : celui menant à la présidence de l’Université de Bourgogne (UB) le 4 février 2020. Une chose est sûre : un nouveau nom viendra s’inscrire à la suite, si nous remontons seulement jusqu’aux années 1990, de Jocelyne Pérard, Bernard Laurin, Jean-Claude Fortier, Sophie Béjean et Alain Bonnin, ce dernier arrivant à l’échéance de son 2e (et ultime) mandat. Par un message adressé à l’ensemble de la communauté universitaire, son adversaire en 2016, Sébastien Chevalier, est le premier à se déclarer. Dans sa missive Internet, il place au service des missions fondamentales de l’université, à savoir la formation et la recherche, trois principes majeurs : « le respect de la pluridisciplinarité, le souci des territoires et le rôle social de l’UB ainsi que la volonté de placer personnels, usagers, citoyens au cœur d’un campus respectueux de l’environnement et ouvert à la société ». Interview…
Dijon l’Hebdo : Vous venez d’adresser un message à l’ensemble de la communauté universitaire où vous annoncez votre candidature aux élections à la présidence de l’Université. Quand avez-vous débuté votre travail de terrain. C’est le coup de l’envoi de la campagne…
Sébastien Chevalier : « J’ai, en réalité, débuté mes rencontres avec tous les directeurs et représentants de la communauté universitaire dès le mois de février dernier. Cela m’a permis de recueillir les attentes mais aussi les lister les dysfonctionnements. J’ai complété cela avec l’expérience que j’ai du conseil d’administration où je suis élu depuis 2016. Cela m’a donné une ébauche de projet que nous allons affiner lors des rencontres publiques qui débuteront à la mi-novembre jusqu’aux élections ».
DLH : Dans la missive que vous avez adressée, vous liez « le souci des territoires et le rôle social » de l’UB. Ils existent déjà aujourd’hui…
S. C. : « C’est un équilibre fragile. Il faut véritablement que l’on préserve le rôle de l’Université auprès des territoires. Nous avons un vrai rôle social à mener. Quand l’Université vient aux portes de la ruralité, cela me parle ! Nous devons donner de l’ambition à ces jeunes de sortir du Bac et d’aller plus loin qu’un BTS. Nous avons aussi un rôle à jouer sur l’économie du territoire en apportant toute la matière grise de l’Université, avec la recherche, l’innovation, etc. Je me suis aperçu qu’il est parfois tout aussi difficile de donner l’ambition de venir sur le campus de Dijon à un jeune de Chenôve qu’à un jeune Nivernais. Cela m’interpelle. Nous avons nombre de talents sur nos territoires, il faut aller les chercher partout où ils se trouvent ! »
DLH : Parmi les premiers principes que vous défendez, figure aussi le respect de la pluridisciplinarité. Pensez-vous réellement qu’elle soit mise à mal ?
S. C. : « La pluridisciplinarité existe mais, encore une fois, c’est un équilibre fragile. L’Université a eu des aléas financiers. Le contexte budgétaire est compliqué, le rôle que l’Etat joue reste complexe et confus. La tentation peut être de se dire : on regarde là où il y a du monde, là où il y a des pépites scientifiques… Et là où cela ne passe plus, on coupe. C’est ce qui s’était passé il y a 3 ans avec les Lettres classiques et l’Italien arrêtés brutalement à Dijon. Cela avait été très mal perçu. Je pense que notre force est la pluridisciplinarité. C’est d’assumer aussi bien les sciences et technologies, les sciences humaines et sociales que le grec ancien… Je souhaite encourager l’interdisciplinarité, les disciplines étant pour l’instant assez cloisonnées ».
DLH : Pourquoi proposer une nouvelle méthode de gouvernance avec « des conseils centraux et le comité technique qui soient des vrais lieux de débats et de partage des décisions » ? N’est-ce pas le cas actuellement ?
S. C. : « Je l’ai vécu de l’intérieur et je l’ai mal vécu. Le conseil d’administration compte 32 personnes et est ainsi à taille humaine. Cela devrait permettre un vrai débat de fond, une vraie contradiction, mais au sens positif, au sens où les opposants pourraient apporter des idées. Depuis 3 ans, mes prises de parole n’ont jamais permis d’infléchir une décision de la gouvernance. On écoute poliment les opposants mais cela ne sert à rien ».
DLH : Vous prônez « une université de service public, une université rayonnante que vous souhaitez éco-citoyenne et solidaire ». Vous avez vous aussi cédé aux sirènes de l’éco-citoyenneté… l’environnement étant actuellement sur toutes les bouches ?
S. C. : « Si c’est tarte à la crème, on passe à côté d’un grand enjeu ! Sachez que les premiers qui m’ont alerté sur ce sujet sont les étudiants : il n’y a pas par exemple de poubelles avec du tri à l’UB, c’est aberrant. Il faut améliorer les choses. En outre, nous avons une responsabilité vis-à-vis de la sensibilisation des jeunes mais également du personnel. Nous pouvons travailler un peu plus avec Divia. Il n’existe, aujourd’hui qu’un Diviaparc pour les vélos sur le campus. Nous devons œuvrer à la transition énergétique. Des bâtiments sont récents et d’autres plus anciens. Il est nécessaire de passer au remplacement des huisseries qui représentent 25% d’économie d’énergie. Pour l’ensemble du campus dijonnais, l’investissement est de 19 M€. C’est un projet pluriannuel mais c’est un engagement que peut prendre la nouvelle équipe sur 5 à 7 ans. La végétalisation des toits terrasses serait également une solution. Des efforts sont à faire… et ce, à tous les niveaux. Nous pourrions par exemple mettre en place une recyclerie. Nombre d’étudiants quittent leurs appartements en laissant la vaisselle, des draps… Nous pourrions remettre tout cela à disposition des nouveaux étudiants qui arrivent ou bien des salariés qui ont des difficultés financières. Un autre exemple : à l’échelle de l’UB, une centaine de colloques sont organisés chaque année. Il n’existe aucun encouragement à ce que les goodies (ndlr : les objets publicitaires offerts) ne soient durables. Nous pourrions, lorsque l’on accompagne un colloque, mettre un bonus à la prise de conscience écologique. C’est la somme de tous ces gestes qui fera que l’éco-durabilité ne sera pas qu’un effet de mode ! »
DLH : En 2016, vous aviez échoué face à Alain Bonnin, qui devenait, par là-même le premier président sortant de l’UB réélu. Etes-vous plus confiant 4 ans plus tard ?
S. C. : « Je suis très prudent et cette élection est très complexe. C’est un travail de longue haleine. J’ai pris de l’avance sur le travail de fond et de terrain que j’ai mené depuis le 4 février, soit un an avant l’élection. Cela aurait été, en outre, plus complexe de se présenter contre le président sortant. Même si l’on peut être contre sa politique, il est légitime de par sa fonction. Ce ne sera pas le cas puisqu’il est arrivé au terme de ses deux mandats… »
Propos recueillis par Camille Gablo