La clinique Bénigne-Joly, qu’il n’est pas besoin de présenter tellement elle fait partie intégrante du patrimoine historique (et médical) de Dijon, dispose d’un nouveau directeur en la personne de Christophe Berardi. Ayant effectué toute sa carrière dans l’Economie sociale et solidaire, il avait le costume idéal pour porter les valeurs d’humanisme de la Mutualité Française Bourguignonne propriétaire, depuis 2004, de cet établissement implanté à la fois à Talant et au Pôle Santé de Valmy. Un établissement qui arrive à conjuguer proximité et innovation. Pour preuve, il est avec le CHU Dijon-Bourgogne le seul à être doté du robot chirurgical « DaVinci Si ». Le nouveau directeur nous détaille les enjeux de cette clinique qui a su se tourner vers l’avenir… sans oublier son passé.
Dijon l’Hebdo : Que de chemin parcouru depuis le XVIIe siècle lorsque Bénigne Joly fonda la Congrégation des sœurs hospitalières de Notre-Dame de la Charité. Vous dirigez ainsi un établissement emblématique de la capitale régionale…
Christophe Berardi : « La clinique Bénigne-Joly représente, en effet, un établissement historique de Dijon que l’on doit à cette Congrégation de sœurs hospitalière. Elle était, à l’origine, installée au sein de l’hôpital Général. Les lois de séparation de l’Eglise et de l’Etat ont conduit les religieuses à quitter ce site. Elles ont alors créé la première clinique chirurgicale de Dijon, rue Gagnereau pour être plus précis. Elles en ont ouvert ensuite une seconde, dite médicale, route de Gray. Ces deux établissements ont été réunis en 1978 à Talant par la Congrégation. En 2004, la Mutualité Française a acquis cette activité. Cela a donné lieu, à l’époque, à d’importants investissements et à de nombreuses remises à jour, avec, notamment, l’installation de la dialyse. Aujourd’hui nous sommes, par exemple, avec le Dr Majbri l’un des plus grands pôles de dialyse de la région… »
DLH : N’êtes-vous pas l’un des rares établissements à être doté du robot chirurgical « DaVinci Si » ?
C. B. : « Cette acquisition lourde est une illustration de l’engagement de la Mutualité à destination des patients de Bourgogne à l’initiative de Michel Martin, président de la Mutualité Française Bourguignonne qui a beaucoup porté et soutenu le développement de l’établissement. Après l’Institut Mutualiste Montsouris, la clinique Bénigne-Joly a été la deuxième clinique mutualiste de France dotée d’un tel appareil. Aujourd’hui, sur les 140 établissements sanitaires de la Mutualité Française, 5 d’entre eux seulement possèdent ce robot. En Bourgogne Franche-Comté, nous sommes, avec le CHU, les seuls à pouvoir offrir une telle prise en charge aux patients. Nos praticiens sont particulièrement aguerris à ces techniques de pointe, les taux d’utilisation sont largement au-dessus de la moyenne d’après les données collectées par le fabricant. Au niveau viscéral, c’est, par exemple, le 4e robot le plus utilisé dans l’Hexagone, le 26e en matière d’urologie. Le docteur Cyrille Kuperas est « Practor », chirurgien-référence et formateur sur ce robot pour des praticiens français et européens qui sont accueillis à Talant plusieurs fois par mois ».
DLH : Dans le domaine de l’innovation, quels sont les prochains investissements de taille programmés ?
C. B. : « Plusieurs équipements de pointe sont acquis ou à l’étude dans différentes spécialités, telle que la technologie laser Holep pour la chirurgie de la prostate, ou l’étude de dispositifs de neuro-localisation pour des interventions très sensibles notamment sur les sinus frontaux à proximité du cerveau, une nouvelle antenne de dialyse est en construction à Beaune… J’ai découvert près d’une centaine de médecins et chirurgiens très engagés dans la clinique, pointus dans leurs spécialités, nous essayons de faire en sorte qu’ils puissent bénéficier des équipements les plus pertinents.
Mais l’innovation ne se limite pas à la technologie, le soin c’est d’abord une relation humaine à laquelle contribuent les personnels soignants, techniques et administratifs. Comme directeur, je considère que ma mission est d’être à leur service pour lever tous les dysfonctionnements organisationnels et pour utiliser au mieux les ressources qui sont les nôtres. »
DLH : Vous réussissez à innover tout en demeurant une clinique de proximité. Est-ce cette alchimie que vous souhaitez voir perdurer ?
C. B. : « Tout à fait. C’est le charme et l’intérêt de cette clinique à taille humaine – 400 personnes travaillent pour les patients sur nos deux sites. Quelqu’un qui arrive dans nos murs n’a qu’à faire 30 m pour être accueilli par le service qu’il recherche. Certains parlent d’une prise en charge « familiale » par les équipes soignantes. Pour ma part, c’est une qualité précieuse. Et, dans le même temps, même si quelques aspects de notre immobilier peuvent encore paraître « vintage » malgré les importantes rénovations qui ont été réalisées, nous avons de la robotique, des laser, mais aussi le scanner ou l’IRM du cabinet de radiologie…
Ce n’est pas un paradoxe, c’est une alchimie réussie qui tient à la fois à l’histoire de la clinique mais aussi à la continuité de la Congrégation fondatrice à la Mutualité dans l’approche humaniste des prises en charge. La clinique dispose de pôle d’excellence reconnus notamment en ORL, viscéral, urologie, pneumologie, dialyse, chimiothérapie, chirurgie esthétique et de reconstruction, nutrition, médecine du vieillissement en chirurgie comme en soin de suite…
L’identité de la clinique Bénigne Joly c’est ce plateau technique suffisamment large pour permettre une prise en charge globale du patient. Si le praticien suspecte quelque chose d’autre sur un patient, ce que l’on appelle une comorbidité, celui-ci peut bénéficier d’un accès direct et rapide à d’autres spécialistes : cette approche globale et coordonnée réduit les pertes de chance pour les patients. »
DLH : Comment vous positionnez-vous par rapport au CHU Dijon-Bourgogne et au groupe Ramsay Santé sur la place dijonnaise ?
C. B. : « Dijon, bénéficie d’une offre de soins diversifiée. Nous avons un pôle privé lucratif, l’HPDB de Ramsay-GdS, qui a développé ici un vrai prototype du concept d’intervention qui est le sien à partir de la fusion de 3 cliniques historiques. Il apporte ce savoir-faire qui, il faut le dire, a permis de sauver des activités cliniques. Car il ne serait plus viable aujourd’hui d’avoir 5 ou 6 petits établissements comme précédemment. Ensuite, nous avons la chance d’avoir un CHU important qui, en plus, est à la fois en bonne santé médicale et économique, ce qui est très rare en France aujourd’hui. Il est dynamique et innovant sur ses spécialités. Nous sommes, pour notre part, une clinique mutualiste à but non lucratif. Nous avons, ainsi, sur Dijon les trois types d’acteurs qui font la richesse du système de santé français. Cette diversité est une chance pour le territoire. C’est à préserver… »
DLH : Quels rapports souhaitez-vous avoir avec ces autres acteurs de la Santé ?
C. B. : « Je ne me situe pas en concurrence, mais dans un esprit de coopération afin que nous puissions enrichir ensemble l’offre de soins sur la métropole. La clinique se positionne dans la continuité du service public, en partenariat avec le CHU dans tous les domaines où nous pouvons avoir ensemble une plus-value pour répondre aux besoins de santé de la population. Nous avons une expertise et une agilité, de par notre taille, pour co-construire des réponses rapides et innovantes. Je suis favorable, pour ma part, à l’accentuation de ces collaborations… »
DLH : Avec le CHU Dijon Bourgogne, le Centre Georges-François Leclerc, l’Université ainsi que les représentants des industries du secteur, Dijon métropole vient d’acter la naissance d’un Technopôle Santé. Allez-vous y prendre part ?
C. B. : « Cette question peut se poser au-delà de la clinique. La mutualité est l’un des principaux acteurs de la Santé, au sens large, singulièrement en Bourgogne avec plus de 4.000 personnels dans les secteurs : sanitaire, médico-social, handicap, personnes âgées, insertion… il est dans l’ADN de la Mutualité de participer et d’apporter sa contribution à cette dynamique de l’agglomération. Le monde de la Santé est en train de changer. Comme nous le montrons à la clinique, par l’alliance de l’humanisme et de la technologie dans nos prises en charge, la Mutualité peut être un acteur qui permet d’aller de l’avant, d’innover, de développer l’intelligence artificielle, la robotique, sans jamais perdre cette conviction : prendre soin est une relation humaine. ».
Propos recueillis par Camille Gablo
Une carrière dans l’économie sociale et solidaire
Christophe Berardi a réalisé toute sa carrière dans l’économie sociale et solidaire, au sein des entreprises à but non lucratif. Il a notamment œuvré à la Confédération générale du Logement auprès de l’Abbé Pierre. Il a également travaillé 10 ans au sein de la Fédération d’éducation populaire Léo-Lagrange, en Picardie puis au comité de direction national, une structure associative regroupant, rappelons-le, plus de 5000 salariés, puis 7 ans comme expert financier au sein d’un cabinet d’expertise comptable sous statut coopératif. Avant son arrivée à Dijon, il était, depuis 2 ans, adjoint de direction d’un important SSR pédiatrique en Seine-et-Marne, avec des activités en pédopsychiatrie, nutrition et en neurologie pédiatrique.
La clinique en chiffres
– 330 salariés
– 98 praticiens
– 220 lits et places à la clinique de Talant
– 132 lits et places de Soins de Suite et de Réadaptation au Pôle Santé de Valmy (SSR)
– 33 000 journées d’hospitalisation MCO/an (dont 6000 en ambulatoire)
– 17 000 séances de dialyse/ an
– 4 000 séances de chimiothérapie / an
– 11 000 journées d’hospitalisation à domicile