Si vous êtes vendeur ou acheteur, d’une maison ou d’un appartement, dans le neuf ou l’ancien, les tableaux que vous pouvez découvrir dans le dossier spécial de ce numéro de Dijon l’Hebdo, vous seront des plus utiles. Il faut dire qu’ils illustrent l’évolution du marché entre le 1er juillet 2018 et le 30 juin 2019, autrement dit sur 12 mois. Nous avons demandé à Me Pascal Massip, de la Chambre départementale des Notaires de la Côte-d’Or, à l’origine de cette Conjoncture départementale immobilière réalisée par Immobilier Statistiques, de commenter ces dernières données.
Les grandes lignes de la conjoncture
Me Pascal Massip : « Notre analyse se fonde sur l’évolution du marché immobilier entre le 1er juillet 2018 et le 30 juin 2019, autrement dit sur 12 mois. Nous avons différencié l’évolution des prix des appartements ainsi que celui des maisons, parce que ce sont deux marchés légèrement différents répondant également à des demandes différentes. Néanmoins, sur cette période, nous constatons une hausse moyenne des prix identique pour ces deux marchés. Celle-ci est, pour l’ensemble de la Côte-d’Or, de 1,6%. Il faut noter une situation différente entre le Dijonnais et le reste du département. Dans la capitale régionale, les appartements connaissent une augmentation des prix de 1,9% alors que, pour les maisons, c’est une stagnation (-0,1%). Ce marché est très soutenu parce qu’à l’heure actuelle nous constatons un manque important de biens à la vente dans Dijon intra muros et dans toute la périphérie. Cette pénurie d’offres fait inévitablement monter les prix et les acheteurs, qui peuvent difficilement négocier, doivent prendre les biens qui se présentent à eux ».
Les appartements anciens à Dijon
Me Pascal Massip : « Ce sont les appartements anciens de 3 et de 4 pièces qui composent la part la plus importante du marché. Les 3 pièces représentent tout de même à eux seuls 31% du marché et les 4 pièces 20%. En revanche, nous nous apercevons que les prix sont les plus élevés aux deux extrémités du marché. Ainsi, pour les studios, le prix moyen est de 2390 €/m2, ce qui est très élevé. Ce qui est dû au fait que Dijon est une belle ville universitaire avec un afflux d’étudiants important entraînant, de facto, un fort besoin de logements. Des investisseurs n’hésitent pas à jouer la carte des studios pour la location nue ou meublée. La forte dimension touristique de Dijon favorise également ce phénomène. Des investisseurs se tournent, en effet, vers des acquisitions de petites surfaces (studio ou 2 pièces) pour en faire des locations meublées de tourisme. Dans le même temps, les prix du segment opposé progressent aussi, puisque nous avons une pénurie de grands appartements sur Dijon. Les 5 pièces et plus ne représentent que 7,5% du marché mais avec un prix médian au m2 supérieur à celui des 2 pièces (2090 €). Nous sommes sur des unités d’habitation s’élevant en moyenne à 220 000 €. Cela dénote bien le manque de produits ainsi que les prix élevés qui en découlent ».
Un rééquilibrage dans les quartiers centraux
Me P. M. : « Comme toujours, les quartiers centraux de Dijon ont les prix les plus élevés. Nous avons tout de même assisté à un rééquilibrage. Il y a quelques années, c’était le centre Nord qui était en tête. Aujourd’hui, dans ce secteur, nous sommes en valeur médiane à 2330 €/m2 alors qu’au centre Sud nous sommes à 2440 €/m2. Nous restons tout de même sur des tarifs élevés, en sachant que le Centre Sud a enregistré une augmentation de 3% en un an, le Centre Nord ayant quant lui affiché une hausse de 5,7%. Cela grimpe même à 6,7% dans les faubourgs Nord et à 8,9 % dans les faubourgs Sud ».
Des quartiers moins prisés qu’avant
Me P. M. : « Nous nous apercevons que les prix stagnent, voire baissent, dans des quartiers qui étaient autrefois prisés. Hormis pour les studios, on le voit bien à Montmuzard ou encore dans le quartier du Parc (à l’exception des allées). Là nous avons tout de même constaté une baisse de 6,6% des prix. Un quartier souffre toujours, dans l’attente des opérations de renouvellement en cours menées par Dijon Métropole. A la Fontaine d’Ouche, nous avons une valeur médiane au m2 de 750€, avec une baisse du prix moyen de 16,5%. Pour les personnes qui ont envie de se loger ou pour les investisseurs, il existe peut-être de belles opportunités à saisir dans ce quartier ».
Les appartements neufs à Dijon
Me P. M. : « Le marché des appartements neufs est stable, avec une progression de 0,2%. Le niveau de prix reste relativement élevé, avec 3530 €/m2 de valeur médiane. Dans un marché clairement d’investisseurs, puisque 51% des appartements vendus sont des 2 pièces. Et c’est sur ce type de biens que se crée la valeur médiane puisque nous sommes à 3580 €/m2. Des programmes se lancent, à l’instar des grandes opérations d’urbanisme menées par Dijon Métropole dans le style du quartier des Maraîchers, de l’Arsenal, etc. Mais en dehors de cela, il existe une clientèle pour des programmes neufs en diffus. Car, dans ce domaine, nous constatons un relatif manque de produits. Si on élargissait l’offre d’appartements neufs en diffus, on éviterait aussi l’augmentation dans l’ancien. Il existe un véritable engouement pour les programmes de petite taille, les grands ensembles étant de nature à effrayer les acquéreurs ».
Les maisons anciennes à Dijon
Me P. M. : « Nous avons, en ce qui concerne les maisons anciennes, un marché stable en moyenne. La maison est un logement traditionnellement de plus grande taille que l’appartement. La maison moyenne est de 5 pièces et plus. 32 % des maisons vendues sont des 5 pièces, 34,5% des 6 pièces et plus. Plus on est sur des grandes tailles, plus le prix médian augmente. Ainsi il est de 232 000 € pour les 5 pièces et plus, 325 000 € pour les 6 pièces et plus. Les disparités sont relativement importantes par quartier. Alors que les Bourroches avaient bien augmenté les années précédentes, ils enregistrent une baisse de 12,2%. En revanche, à Montchapet, un quartier traditionnellement recherché, nous assistons à une hausse de 14%. Idem dans le quartier Jouvence… »
Dans la métropole
Me P. M. : « Pour arriver dans des valeurs plus raisonnables, les acquéreurs n’hésitent pas à sortir de Dijon. A Chevigny-saint-Sauveur, la valeur médiane d’une maison, qui a pris 5,9%, est ainsi de 248 000 €. Nous avons, là aussi, un rééquilibrage puisque Fontaine-lès-Dijon affiche une baisse de 1,6% (285 000 €) et Talant, qui était plus bas, augmente de 9% (275 000 €). La valeur médiane d’une maison dans l’agglomération, hors Dijon, est aux alentours de 250 000 à 270 000 euros ».
Une bulle immobilière
Me P. M. : « Le manque d’offres, selon moi, représente aujourd’hui une situation qui n’est pas raisonnable. Cette espèce de bulle qui est en train de se créer par suite de manque de produits est dangereuse. Et je ne parle pas de spéculation. Chez les acquéreurs, je pense qu’il y a une volonté d’acheter pour se loger, pour louer mais pas pour spéculer. Néanmoins, et on le sait par expérience, lorsqu’il y a des effets de hausse, on risque ensuite des stagnations, voire des corrections à la baisse. Aussi, aujourd’hui, lorsque l’on est acheteur, il faut savoir raison garder. Quand l’on est vendeur, il faut profiter du niveau très haut de prix. Il ne faut pas hésiter à accepter une négociation afin d’arriver à un niveau de prix qui satisfasse tout le monde et qui permette à l’affaire de se réaliser. Les vendeurs, qui attendraient une hausse des prix, pourraient avoir un réveil désagréable. N’oublions pas que le marché immobilier actuel est dopé par des taux d’intérêt excessivement bas. On peut même aller parfois jusqu’à dire que l’argent n’a plus de coût. Pour les acheteurs, c’est le moment d’emprunter sur du long terme, et, pour les vendeurs, c’est le moment de céder leur bien, car ils ne savent pas de quoi les lendemains seront faits ».
Propos recueillis par Camille Gablo