François Rebsamen : « Dijon doit être la ville du bien vivre »

Première pierre de la Cité internationale de la Gastronomie et du Vin, fréquentation du musée des Beaux-Arts, transition écologique, maintien du taux des taxes, gouvernance de la Métropole, transfert de compétences, relation avec le Département… François Rebsamen, maire de Dijon et président de la Métropole, fait le tour d’une riche actualité… parfois un peu chaude.

Dijon l’Hebdo : Dijon qui décroche la première place des villes de 80 000 à 250 000 habitants où il fait bon vivre. Voilà une belle consécration pour la politique que vous menez avec votre équipe en cette dernière année de mandat municipal ?

François Rebsamen : « C’est une bonne nouvelle même s’il ne faut pas prendre ces classements au pied de la lettre. Mais quand les bons classements se succèdent les uns après les autres, ça donne une idée du travail qui a été fait et ça permet, si on reste modeste, de mesurer ce qui reste à faire. C’est en tout cas la confirmation que l’action municipale a été une réussite et continue d’aller dans le bon sens ».

DLH : Bon vivre, bien vivre… Comment cela se traduit-il dans une ville comme Dijon ?

François Rebsamen : « Cela se traduit par une forme de sérénité avec un centre ville apaisé, où les voitures ne viennent plus. Un centre ville qui a su préserver sa beauté patrimoniale, ses pierres remises en valeur, ses façades refaites, un écrin comme le musée des Beaux-Arts… Vraiment, Dijon est une des plus belles villes françaises avec un des plus beaux musées de France qui attire les touristes. C’est ça le centre ville apaisé, serein dont je rêvais. Et puis il y a beaucoup de choses qui sont faites dans les quartiers, dans toute la ville pour l’amélioration des conditions de vie, la qualité de la desserte, la mobilité, les investissements sur le bâti, les aménagements pour les espaces verts… Bref, une ville qui s’apprécie dans son ensemble et qui je pense vit bien. »

DLH : 4 juillet 2019 : une autre date qui marquera l’histoire de la ville avec la pose de la première pierre de la Cité internationale de la gastronomie et du Vin. Il était temps serait-on tenté de dire…

François Rebsamen : « Et vous auriez raison de dire ça. De recours en recours, ce sont deux ans qui ont été perdus pour les entreprises, le rayonnement de la ville. Des recours qui ont été déposés par un conseiller municipal qui ne pense pas à l’intérêt de la ville, à l’intérêt de l’économie. Qui ne pense finalement qu’à faire des procédures, à être contre tout ce qui est proposé. Je n’ai jamais entendu la moindre idée intéressante, nouvelle dans la bouche de l’opposition. Je le regrette parce qu’il faut être plusieurs pour que le niveau démocratique soit de bonne qualité. Une opposition qui s’explose en petits morceaux. On ne sait même pas qui est le chef, qui est le leader. Ils se chamaillent entre eux, ils passent leur temps à se diviser. Ca vaut pour En Marche, ça vaut pour les Républicains. C’est dommage pour la ville et, finalement, je leur ai souvent dit -et avec le recul du temps, je peux l’affirmer- que pour être maire il faut aimer sa ville ».

DLH : Quand pensez-vous que la Cité de la Gastronomie pourra accueillir ses premiers visiteurs ?

François Rebsamen : « C’est à la fin de l’année 2021 que l’on devrait ouvrir la Cité de la Gastronomie. Il faudra donc attendre un peu plus deux ans pour accueillir les premiers visiteurs ».

DLH : Son contenu est-il complètement calé ?

François Rebsamen : « Bien sûr. Et heureusement que toutes celles et tous ceux qui avaient pris l’engagement de venir sont restés. J’ai craint, un moment, que l’attentisme, le fait que ça ne démarre pas, pouvaient être un frein. Je prendrai un seul exemple : l’école Ferrandi, elle n’est pas venue toute seule. Il a fallu aller à Paris, rencontrer ses dirigeants, les convaincre que c’était à Dijon qu’il fallait installer une école de formation. Après deux années de recours, je sentais bien que la situation devenait compliquée et que si cela avait du durer, je ne sais pas comment cela se serait terminé. Les investisseurs eux-mêmes mettaient en avant la nécessité de lever ces recours qui pesaient sur la Cité. La Métropole n’a pas eu d’autres choix que de garantir l’hôtel pour affirmer notre conviction que ces recours allaient être rejetés et qu’il fallait nous faire confiance ».

DLH : Et le Marché des Halles y sera-t-il transféré comme certains le craignent ?

François Rebsamen : « Voilà les rumeurs qui vont recommencer. Bien sûr que non. Il n’est pas question de transférer les Halles. La chance d’une ville centre, c’est son hyper centre. Et à Dijon, ce sont les Halles. Il suffit d’y faire ses courses, de s’y promener pour s’apercevoir que c’est un lieu magique qui attire tous les publics.

On va entendre comme ça beaucoup de choses fausses. En Angleterre, on punit ceux qui profèrent des fausses nouvelles, des fake news. Si cette mesure était en cours en France, je pense qu’il y aurait déjà eu beaucoup de gens condamnés ici ».

DLH : Les travaux de la Cité vont-ils rapidement entraîner la piétonisation de la rue Monge ?

François Rebsamen : « Certainement pas rapidement. On ne fait pas les choses comme ça même si cela entraîne déjà forcément une réflexion sur la requalification de cette rue en fonction de certains paramètres comme les visiteurs. Il y en aura 500 000, hors les salles de cinéma, que nous attendons sur ce nouveau site. Il faudra voir comment se fait la liaison pour intégrer la Cité de la Gastronomie à l’hyper centre. Il y a effectivement un cheminement assez naturel par la rue Monge. A Dijon, il n’y a pas de fleuve qui coupe la ville mais il y a une barrière qui est beaucoup plus difficile à franchir, c’est la voie ferrée et il faudra prendre en compte le fait que la Cité de la Gastronomie sera un prolongement du centre ville. Et pour aller cheminer en ville, il y aura nécessité à revoir certainement le circuit piéton, le circuit de la Chouette ».

DLH : Cette Cité de la Gastronomie sera-t-elle la figure de proue de votre ambition en matière viticole ?

François Rebsamen : « Elle sera un des éléments. La figure de proue, c’est la reconnaissance par l’INAO des côtes de Dijon. C’est aussi la replantation de cent hectares de vignes sur le plateau de la Cras. La Cité de la gastronomie, pointe avancée de la route des climats, sera un lieu d’excellence où on pourra montrer l’excellence ».

En quoi la Cité de la gastronomie s’inscrira-t-elle en synergie avec l’un des projets majeurs de votre mandat pour la culture et le tourisme, sans doute celui qui vous a tenu le plus à cœur, le musée des Beaux-Arts ?

François Rebsamen : « Tout ce qui concourt à amener du monde à Dijon est bon pour développer l’activité économique de la ville. Et le musée des Beaux-Arts y contribue déjà largement. Et, demain, la Cité internationale de la Gastronomie et du Vin y contribuera tout autant. Avec l’Hôtel Dieu de Beaune, nous aurons les trois lieux majeurs du tourisme en Bourgogne – Franche-Comté. 400 000 visiteurs annoncés à Beaune. C’est l’objectif fixé pour le musée des Beaux-Arts et c’est celui qui sera dépassé pour la Cité internationale de la Gastronomie et du Vin. La complémentarité sera nécessaire et je souhaite qu’on avance ensemble malgré les blocages du président du Département ».

DLH : Etes-vous retourné au musée des Beaux-Arts depuis son inauguration, le 17 mai dernier, rien que pour le plaisir ?

François Rebsamen : « Oui, deux fois. L’autre jour, j’ai même fait le guide pour la délégation de Rhénanie-Palatinat. Elle n’avait pas le temps de faire tout le musée et je leur ai fait découvrir l’expo Ming et une présentation rapide du bâti et des évolutions architecturales qu’il y a eues sur le Palais des Ducs ».

DLH : Le nombre de visiteurs enregistré jusqu’à ce jour est-il conforme à vos attentes ?

François Rebsamen : « Cinq semaines après l’inauguration, ce sont 77 300 visiteurs qui ont franchi l’entrée du musée. C’est énorme. Avant les différentes phases de travaux, quand il fonctionnait en totalité, le musée des Beaux-Arts accueillaient 200 000 visiteurs par an. On sera sur les 400 000 visiteurs sur une année pleine. C’est notre souhait ».

DLH : Vos prévisions sur l’emploi du secteur privé dans la métropole ont été confirmées par le directeur de l’URSSAF. Tous les secteurs ont gagné des postes sur l’année dernière. Et les résultats situent Dijon largement au dessus de la région et de bon nombre de métropoles de France. Voilà qui aurait tendance à démontrer à la fois l’efficacité des stratégies mises en place mais aussi le dynamisme des entrepreneurs ?

François Rebsamen : « L’économie marche bien à Dijon. Elle se développe dans le cadre d’un cercle vertueux. Il y a à peu près 7 % de chômeurs. C’est un tôt relativement bas même si l’on peut considérer que c’est toujours trop élevé. Notre faiblesse aujourd’hui, c’est la difficulté de recrutement dans un certain nombre de secteurs, dans l’industrie, le commerce et l’artisanat. C’est ça la difficulté qui contrarie le développement économique. Nous avons des entreprises qui cherchent à s’installer à Dijon parce que le fait d’être la première ville en qualité de vie ne laisse évidemment pas insensible. Des entreprises qui ont envie de se déconcentrer mais qui se heurtent à un bassin d’emploi qui manque de formation. Aujourd’hui, les chefs d’entreprise me disent qu’ils ne recrutent plus forcément sur les compétences. Ils recrutent sur le savoir être. Ils affirment qu’ils préfèrent former quelqu’un qui sait bien se comporter, qui a envie de travailler, qui est de bonne composition sociale. Dans certaines entreprises, elles se reconnaîtront, les embauches se font par parrainage des salariés eux-mêmes ».

DLH : Ce dynamisme se traduit par de nouveaux habitants qu’il faut loger. Or la construction de logements neufs mais aussi le nouveau plan local d’urbanisme suscitent des réactions de la part de votre opposition. Ces constructions sont-elles vraiment nécessaires ?

François Rebsamen : « Bien sûr qu’elles le sont. Il y a encore 5 000 demandes de logements qui ne sont pas satisfaites. Je sais que le seul moyen de lutter contre la pauvreté, c’est d’offrir aux gens des logements. Il faut donc construire. Malheureusement, il y en a qui pensent que permettre à des gens qui vivent sous le seuil de pauvreté d’accéder à des logements « à loyer modéré », c’est perturber leur équilibre. Je crois que la cohésion sociale, c’est justement la mixité et la possibilité pour des gens plus aisés de côtoyer des gens plus modestes. Et l’inverse. C’est ça qui fait une ville et une ville, c’est à vivre pour tous. Il faut construire des logements. C’est favorable à l’activité économique. Le secteur du bâtiment, c’est aujourd’hui plus de 10 000 emplois et le seul reproche que je peux faire c’est que je ne l’entends pas beaucoup me défendre.

Oui, à Dijon, on construit. On densifie parce qu’il faut lutter contre le réchauffement climatique. On ne va pas s’étaler. On ne va pas faire des lotissements partout et consommer les terres agricoles. Ce qui est curieux, c’est que les mêmes qui disent défendre l’agriculture sont pour étendre la ville un peu partout. Nous, on est pour la concentrer. Ce qui ne veut pas dire qu’on ne protège pas les espaces verts, qu’on n’a pas de jardins partagés, des vergers conservatoires. Il est bon de rappeler que nous avons mis fin à l’urbanisation prévue du plateau de la Cras. On est vertueux en matière écologique mais on est volontariste pour construire parce que les gens ont besoin de logements. Et Dijon est une des villes où les prix n’augmentent pas trop parce que nous construisons des logements. Et nous gagnons des habitants. Pas énormément mais tout de même 10 000 habitants en 20 ans. Ils sont nombreux à revenir vivre à Dijon, notamment des seniors attirés par la qualité de vie ».

DLH : Les tensions sont de plus en plus fortes avec certains élus au sein du conseil métropolitain. Est-ce la fin du consensus qui a toujours prévalu dans la gouvernance de la Métropole ?

François Rebsamen : « Certains sont partis d’eux-mêmes. Je pense au maire de Talant qui a été pendant près de deux mandats un vice-président avec lequel on travaillait. Je pense qu’il a été perturbé par les dernières élections municipales où il a été plus que chahuté. Le voilà maintenant dans une opposition résolue. C’est son droit le plus strict mais c’est dommage pour la ville. Par exemple, Talant vient de sortir du plan lecture qui concernait les quartiers de la, politique de la ville. Ca ne lui coûtait rien. Il y avait un réseau de bibliothèques qui s’était mis en place avec Dijon, Chenôve, Quetigny et Longvic. Talant est partie. Je ne pense que c’est comme ça qu’on avance. Je préfère de loin l’attitude du maire de Saint-Apollinaire avec qui on collabore très bien ou encore le maire de Fontaine quand il ne cède pas aux sirènes du président du Département contre la Métropole ».

DLH : Les métropoles sont en première ligne du vaste chantier de la transition écologique. Quelles sont les actions mises en place et à venir sur Dijon et son agglomération ?

François Rebsamen : « On a fait beaucoup sur le fond. Les ressources en eau protégées, le traitement des déchets, la production d’électricité renouvelable, une usine complète d’incinération, un centre de tri… Tout cela, ce sont des actions écologiques. On a mis en place un réseau de chaleur qui va bientôt atteindre les 100 km. On installe tous les éléments qui permettent à Dijon d’être la ville verte européenne. Nous avons terminé 4e sur 9 villes européennes qui avaient été retenues. Pour une première candidature, c’est plutôt encourageant. Paris ne s’est pas fait en un jour et quand je vois que l’opposition brocarde le fait que nous sommes 4e, je réponds tout simplement que c’est bien. Nous sommes au pied du podium. Efforçons-nous d’y monter la prochaine fois.

Il y a 46 000 arbres à Dijon. Et j’entends certains dire qu’il faut en planter encore plus et notamment rue de la Liberté. Ces personnes savent-elles toute la complexité du réseau souterrain qui explique pourquoi il n’y a jamais eu d’arbres rue de la Liberté ? On va végétaliser, on va faire des îlots de fraîcheur… Et ce n’est que la partie la plus visible de l’iceberg. Notre action écologique, elle est en profondeur. Zéro phyto, lutte contre le glyphosate, protection de la nature et de l’environnement, de la biodiversité, jardin des sciences, replantation sur le plateau de la Cras. J’attends tout le monde sur ce sujet. Moi, je suis un social-écologiste qui considère que l’écologie, ce n’est pas punitif. Quand on fait un réseau de chaleur, c’est pour faire gagner du pouvoir d’achat aux gens les plus modestes, c’est à dire une économie d’un mois de chauffage sur douze mois. En plus, c’est utile pour la planète.

Toutes les mesures qu’on prend, je le répète, elles ont pour but aussi de redonner du pouvoir d’achat aux habitants, de préserver leur qualité de vie en matière de santé, d’alimentation. Quand on est maire, on se préoccupe de la ville et surtout de ses habitants ».

DLH : Promouvoir et de développer les productions locales, favoriser les circuits courts et encourager la défense du « bien manger local »… Ne serait-ce pas une mode éphémère à laquelle succombent les élus ?

François Rebsamen : « Non, ce n’est pas une mode éphémère. On doit manger moins de viande. C’est indispensable pour l’avenir de la planète. On a organisé tout dernièrement un intéressant colloque avec le Nouvel Obs sur l’alimentation durable en 2049. Une belle occasion de mettre en exergue notre projet TIGA -Territoire d’Innovation et de Grande Ambition- que je vais prochainement défendre à Paris. Nous croyons en l’organisation d’une agriculture liée à un territoire métropolitain. Comment améliorer les circuits courts, comment protéger l’eau, comment développer une agriculture de maraîchage, les marchés locaux, la qualité évidemment, comment faire bio dans les cantines… Dijon n’est pas une ville bobo dans le sens un peu moqueur. Ce doit être la ville du bien vivre. Il y a encore beaucoup à faire, bien sûr, tout n’est jamais parfait ».

DLH : A Dijon, 0% d’augmentation des taux d’imposition depuis 3 années consécutives. Le prix de l’eau continue à baisser, et cela, depuis 3 ans également. En sera-t-il de même en 2020 ?

François Rebsamen : « En 2020, ce sera pareil si le gouvernement ne change pas son dispositif. Il a pris l’engagement de ne pas toucher aux dotations versées aux villes comme cela avait été le cas sous Hollande. Elles seront maintenues. La contrepartie, c’est qu’il n’y aura pas d’augmentation des taux d’imposition. Maintenant, au gouvernement de nous dire comment il va compenser la perte pour les villes de la taxe d’habitation. En soi, c’est une bonne nouvelle pour les habitants. Ca va s’étaler jusqu’en 2023 et cela représente 20 milliards d’euros. Mais pour la ville, c’est un sujet d’interrogation. Comment leur autonomie fiscale sera-t-elle préservée ? Si c’est juste pour gérer des fonds d’État, il faudra nous le dire. Ce n’est pas le cas pour le moment.

En 2020, le prix de l’eau continuera de baisser. Le taux des taxes n’évoluera pas à périmètre constant. On ne touchera pas non plus au taux sur les enlèvements des ordures ménagères ».

DLH : Qu’est-il sorti de la série de réunions publiques organisées en lien avec le Directeur départemental de la sécurité publique et le procureur de la République ?

François Rebsamen : « C’est courageux ce qu’a fait Nathalie Koenders. C’est très bien car nous sommes très inquiets des évolutions en matière de tranquillité et de sécurité publiques. Gérard Collomb, quand il a quitté le ministère de l’Intérieur voici un an et demi, a fait un réquisitoire terrifiant de la situation de la sécurité dans les quartiers de la politique de la ville. Il a dit : « Jusqu’à présent nous vivions côte à côte. Je crains que demain nous vivions face à face ». Ce qui est en jeu aujourd’hui, c’est le manque d’effectifs de la police nationale, certes très bien mobilisée sur les gilets jaunes, qui est devenue une sorte de police de maintien de l’ordre et qui a perdu cette culture de la proximité. A cause de Nicolas Sarkozy qui a diminué de 10 000 le nombre de policiers. François Hollande a créé 10 000 postes affectés en priorité à la lutte contre le terrorisme. Je ne critique surtout pas ce choix là, loin s’en faut. Mais il n’empêche que nous n’avons pas retrouvé cette police de proximité qu’il y avait sous Lionel Jospin et encore moins cette présence rassurante des gardiens de la paix dans les quartiers de la politique de la ville. Je le regrette. Les villes essaient bien d’y pallier mais nous n’avons pas la compétence de la sécurité. La sécurité, elle relève du pouvoir régalien. Voilà maintenant plus de dix ans que je demande que les policiers puissent faire des contrôles d’identité. On va vous demander votre carte d’identité quand vous faites un chèque, dans un train… Mais un policier municipal n’a pas le droit de vous la demander. Voilà des choses qu’il faudrait corriger si on veut que demain nos policiers municipaux, dont je salue l’action, puissent être plus efficaces sur le terrain.

Et j’en profite pour redire que c’est inqualifiable de brûler des voitures. Je n’accepte pas et je n’accepterai jamais une forme de laxisme qui consisterait à se voiler la face. Incendier, c’est commettre un acte criminel. On l’a vu malheureusement pour le foyer ADOMA qui a fait tant de morts. On n’a pas le droit de mettre le feu.

Et j’en veux au président du Conseil départemental d’avoir supprimé la prévention spécialisée qui est de sa compétence et pas de celles des villes. Nous n’avons plus d’éducateurs spécialisés dans les quartiers. Ils encadraient des familles dont on savait qu’elles pouvaient poser des problèmes. Cela fait partie de la chaîne qui se dégrade et, en bout de course, on a des gamins, je dis bien des gamins de 14 / 15 ans qui caillassent la police et qui mettent le feu. C’est IN-TO-LE-RABLE ! Ce devrait être un sujet pour tous les pouvoirs publics ».

Vous parlez du Département… Où en êtes-vous du transfert de compétences en direction de la Métropole ?

François Rebsamen : « Beaucoup de contre-vérités ont été dites. Je ne veux pas polémiquer mais je veux, au travers de cette interview, dire qu’il est temps que l’État prenne ses responsabilités. L’État n’applique pas la loi qui précise que le préfet doit nous transmettre un projet de convention. Je sais que cette convention a été établie, qu’elle a été transmise par le Préfet à Paris. Mais depuis, pas de réponse. Est-ce qu’on a peur de M. Sauvadet ? Est-ce qu’il exerce des pressions par le biais de l’Assemblée des Départements de France ? Je passe sur les collèges dont le Président du Département a dit que la métropole voulait récupérer la compétence. Ca n’est pas vrai. Je passe sur les routes pour lesquelles m’aurait été proposé un accord que je n’aurais pas accepté. Il sait bien que ce n’est pas vrai, et tous les élus de la Métropole, toutes tendances confondues, savent aussi que ça n’est pas vrai : j’avais dit oui à sa proposition. Il prétend qu’on n’a pas l’habitude de l’aide sociale. C’est faux. C’est Robert Poujade lui-même, quand il était président du Département, qui a donné au CCAS de la Ville de Dijon la compétence sociale pour les personnes seules et les couples. Vous voyez qu’on en fait déjà la moitié… Ce n’est pas quelque chose qu’on découvre aujourd’hui. Et puis on assure la gestion sociale des bénéficiaires de l’APA, sans compensation financière du Département. La Côte-d’Or doit être le seul département français à ne pas financier les projets de sa métropole. Tant mieux pour la ville de Beaune qui reçoit 2 millions d’euros pour un projet de cité des vins uniquement financée sur fonds publics : mais on refuse d’accompagner à Dijon la future Cité internationale  de la Gastronomie et du vin. J’ai pourtant fait découvrir le site au président du conseil départemental. Il voulait un emplacement, je lui avais accordé. Il voulait voir le nom « Côte-d’Or » en bonne place, j’avais accepté. Cette année, la modification des règlements du Département entraine une perte subventions pour des petits travaux de rénovation. 600 000 € manqueront à la Ville sur lesquels nous ne pourrions plus recevoir que 60 000 €… l’année prochaine ! Je me demande d’ailleurs si une action en justice pour rupture du principe d’égalité ne pourrait pas être lancée. On verra ça à la rentrée. D’ici là, j’appelle le président du département à retrouver le sens de l’équilibre et de la mesure, et qu’il arrête de se comporter comme le maître des collectivités. La métropole souhaite nouer des relations avec toutes les communautés de communes qui le souhaitent. Mais le Président du Département fait tout pour contrecarrer les initiatives de la métropole, y compris en utilisant l’arme des subventions. Il serait bon qu’on puisse reprendre le chemin du dialogue dans l’intérêt des habitants. Il ne faudrait pas oublier que Dijon est capitale de la Côte d’Or et de la région Bourgogne – Franche-Comté. C’est peut-être pour l’avoir oublié qu’il n’a pas été majoritaire sur Dijon lors des dernières élections régionales ».

DLH : Ce mandat aura été celui de la construction et de la rénovation de tous les équipements nautiques. Le point d’orgue sera l’inauguration de la piscine du Carrousel en septembre prochain ?

François Rebsamen : « C’était indispensable non pas parce qu’il y a la canicule mais parce que nos équipements nautiques étaient insuffisants. D’où la construction de la piscine olympique, d’où la rénovation des piscines de la Fontaine d’Ouche et des Grésilles, d’où la refonte complète de la piscine du Carrousel qui va proposer un bassin de 50 m en plein air dans lequel on pourra se baigner même en hiver. Je suis sûr que cela rencontrera un formidable succès. Le toit sera végétalisé, on va replanter des arbres. Le tout dans un environnement exceptionnel ».

DLH : Etre maire est le plus beau des mandats dites-vous régulièrement… Ce mandat, souhaitez-vous le prolonger en mars 2020 ?

François Rebsamen : « Je redis quelque chose que tout le monde sait : maire, c’est l’anagramme d’aimer. Etre maire, c’est aimer les habitants de la ville et tout faire pour eux. Je pense avoir fait le maximum avec mon équipe. On avait une belle équipe et un beau projet, c’est plus facile pour avancer. Les personnes qui m’entourent sont formidables.

Je répondrai à votre question en disant que, pour le moment, on a encore du travail. J’entends tout le monde bruisser sur les élections, évoquer les têtes de liste ici ou là. Nous, on verra à la fin de l’année. Les Dijonnais seront dans les élections à partir de 2020 mais pas en juillet 2019 ».

Propos recueillis par Jean-Louis Pierre