La restauration du Musée des Beaux-Arts, c’est une chrysalide qui, au terme d’une métamorphose de près de 20 ans, s’envole riche d’autres futurs, propulsée par le fer de lance que furent les siècles passés dans ce quartier dijonnais des Arts, au cœur du somptueux Palais des Ducs de Bourgogne. Les collections du Musée, parmi les toutes premières de France, vont s’offrir à notre regard dès le 17 mai prochain. A la plus grande joie de François Rebsamen, le maire de Dijon.
Dijon l’Hebdo : C’est un événement culturel majeur que Dijon s’apprête à vivre le 17 mai prochain…
François Rebsamen : « C’est un chantier qui m’occupe depuis que je suis élu. C’est donc l’aboutissement de trois mandats mais aussi du plus grand chantier culturel de Bourgogne – Franche-Comté de ces vingt dernières années depuis la construction de l’Auditorium. Si je dis que c’est une histoire qui se termine, ça voudrait dire que j’ai fini mon temps. C’est une partie de mon histoire qui se termine. Ce sera donc un grand moment pour moi, pour les élus qui m’accompagnent, pour les équipes du musée, pour les Dijonnais bien sûr, et, plus largement un grand moment pour le monde culturel dans notre pays. »
DLH : Qu’est-ce qui vous a poussé à vous lancer dans un tel chantier et en quoi était-il ambitieux comme vous avez pu le dire dès ses débuts ?
François Rebsamen : « Une volonté de renouer avec notre histoire. Ce musée avait perdu de son lustre et présentait un besoin impérieux d’être rénové, métamorphosé. Il manquait de mètres carré pour exposer toutes les pièces de collection que nous possédons.
Lorsque j’ai été élu maire, parmi les premières choses que j’ai voulu faire, c’est visiter de fond en combles ce musée qui porte notre histoire et une grande partie de l’histoire de France. J’ai été absolument effaré par ce que j’ai trouvé. Un musée absolument dénué de toute protection incendie. Les œuvres étaient entassée tant bien que mal, sans lieu dédié à la préservation. C’était, par certains aspects, un capharnaüm malgré la qualité des équipes qui y travaillaient.
Il m’a fallu du temps pour mesurer l’ampleur de la tâche. Robert Poujade avait fait beaucoup d’études, des mètres cube d’études, mais il a fallu tout recommencer parce que c’est une opération à tiroirs extrêmement complexe dans laquelle nous avons décidé de nous lancer. Quatre à cinq ans d’études, dès 2001, ont été nécessaires et tous les ministres de la Culture qui se sont succédé ont soutenu le projet.
Un chantier comme celui-là, on ne peut l’entreprendre qu’à l’occasion d’une véritable perspective historique. Si demain, par exemple, je décidais de me présenter aux prochaines élections municipales, je ne suis pas sûr d’avoir le courage de lancer un tel chantier. »
DLH : Quelles retombées attendez-vous de la réouverture totale du Musée ?
François Rebsamen : « Non seulement on a refait le musée mais on a aussi piétonnisé l’ensemble des voiries autour. Ca va être un musée dans un lieu de calme, de sérénité comme en connaissent certaines grandes villes en Europe. Un lieu exceptionnel dont j’attends une fréquentation qui va bondir avec la venue de touristes du monde entier. J’en attends aussi un développement économique pour la ville, une nouvelle manière d’appréhender la culture avec, à terme je l’espère, un grand parcours des musées à Dijon. »
DLH : Et vous maintiendrez malgré tout sa gratuité ?
François Rebsamen : « Elle sera bien sûr maintenue sauf pour les expositions exceptionnelles et temporaires. La gratuité, elle va dans l’idée que nous nous faisons de la culture. Le prix est souvent un frein surtout quand on a des enfants. La gratuité, on la pratique aussi pour les bibliothèques. Je veux une culture ouverte à tous, pas réservée à une élite. Ce musée, il appartient aux Dijonnais et je souhaite qu’ils se le réapproprient. C’est l’occasion de dire à tous : « Venez, c’est chez vous. Ce musée, c’est le vôtre. Découvrez-le dans sa belle diversité. Il y en a pour tous les goûts dans cette maison commune ».
DLH : Ce musée, vous avez voulu l’ouvrir sur l’extérieur. Pourquoi ?
François Rebsamen : « D’abord parce que c’était son histoire. Il est aujourd’hui dans toute sa splendeur sur une place qui a été refaite. La beauté, c’est la clarté. Ce n’est pas la noirceur. J’ai enlevé tous les stationnements de surface qui étaient autour de ce lieu magnifique qu’est le Palais des Etats. Ca va frapper tous les gens qui vont venir, notamment les Dijonnais qui ont vu avant et qui vont voir après. »
DLH : Cette rénovation est tellement réussie qu’elle va naturellement impacter les rues avoisinantes qui vont se retrouver sous la belle appellation de « quartier des Arts »…
François Rebsamen : « C’est vrai qu’il y a moins d’antiquaires mais il y a de beaux magasins d’art, de design. J’espère y faire revenir des bouquinistes. Il faut que la culture dans tous ses états réinvestisse ces lieux. Ce sera fait avec le musée. »
Quelles sont les œuvres qui vous touchent personnellement le plus dans ce musée ?
François Rebsamen : « Un peu comme le grand public, je suis touché bien sûr par l’histoire médiévale de la ville, par le tombeau des Ducs. Et puis par des œuvres plus modernes de l’école française d’après guerre. Que ce soit Vieira da Silva ou encore Nicolas de Staël. Dans la donation Granville, il y a des œuvres magnifiques… »
DLH : Et Ming, c’est la cerise sur le gâteau ?
François Rebsamen : « Le musée des Beaux-Arts, c’est son musée. C’est son histoire. C’est là qu’il a passé des heures et des heures à contempler les œuvres. Des après-midi complets il est venu trouver l’inspiration. C’était l’occasion pour ce grand peintre moderne, qui a fait l’école des Beaux-Arts de Dijon, de se réapproprier les lieux au travers de son exposition.
Ming, c’est le plus dijonnais des chinois mais aussi le plus chinois des dijonnais. Il n’est resté à Dijon que parce que j’ai été élu maire de Dijon. Il faut découvrir son exposition et notamment ses aquarelles des Pleurants. C’est absolument splendide. »
Propos recueillis par Jean-Louis Pierre